La folle soirée des eaux-de-vie Massenez chez Julien à Fouday

Samedi 23 novembre 2013, Bernard Baud, Président de la Distillerie Massenez à Dieffenbach dans le Val de
Villé (67), mais également Président des Grandes Distilleries Peureux de Fougerolles, a tenu une conférence sur les eaux-de-vie de fruits et le parallèle qui peut s’établir entre elles (mémoires de leurs fruits d’origine) et la mémoire de l’Homme. Une démarche originale, qui au final, ouvre une toute autre approche de la compréhension et de la dégustation des Eaux de Vie de fruits.

Cette conférence hautement instructive et didactique s’est déroulée dans le nouvel espace de restauration de l’Hotel-restaurant Spa Julien à Fouday (67) en présence de personnalités du monde politiques, économiques et gastronomiques. Un dîner, préparé par Gérard Goetz et Philippe Jego a sublimé la subtilité d’une cuisine élaborée, aux saveurs des eaux-de-vie Massenez.

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“Mais qu’est-ce qu’une Eau-de-Vie de fruits”, interroge Bernard Baud ? “C’est une boisson spiritueuse obtenue par la fermentation alcoolique et la distillation d’un fruit charnu en présence ou non de son noyau”.

Bernard Baud, président de la Distillerie Massenez depuis 2010, a endossé les apparats du conférencier le temps d’une soirée pour animer avec pédagogie et convivialité une conférence présentant les trajectoires parallèles de la mémoire du fruit (projeté en eaux-de-vie de fruits) et celle de l’Homme pour mettre en exergue les accointances, les interdépendances liées à l’environnement (interne et externe) qui participe au process de restitution d’un gout, d’une mémoire, remettant finalement à chacun des participants, des clés de compréhension facilitant la dégustation.

Cette étape didactique a toute son importance pour justifier ce qui nous permet d’identifier ou d’apprécier une eau-de-vie de fruits plutôt qu’une autre. Tout n’est pas que question de compétences ou de palais; la dégustation fait également appel de manière subtile aux souvenirs. “Par contre, tout est question de goût”, souligne Bernaud Baud. “Oui, mais aussi de l’accessibilité à la mémoire de l’Homme et du fruit. Si la mémoire humaine est la résultante d’une double activité à la fois biologique et psychologique, nous allons voir que la genèse de l’eau-de-vie de fruits en est étonnamment similaire”.

À l’instar de l’Homme, le fruit enregistre dans sa mémoire des indications précieuses : météorologiques, géologiques, géographiques, traitements, mais aussi les nutriments apportés par l’arbre nourricier ou sa récolte. Il va restituer ces souvenirs au cours de la fermentation (transformation du sucre en alcool grâce au travail des levures). C’est lors de cette étape, que certains arômes primaires seront transformés et d’autres seront créés (secondaires). Puis avec la distillation, sera créée la dernière famille d’arômes (les arômes tertiaires).

De la même manière, l‘Homme enregistre en mémoire des souvenirs plus ou moins marquants, en fonction de son état émotionnel; des événements, des lieux, des personnes en présence… des souvenirs, qui dans leur récolte, mémorisation et restitution, s’enrichissent d’émotions primaires , secondaires et tertiaires …


‘La dégustation est le moment de retrouver les différents spectres d’arômes primaires, secondaires et tertiaires des Eaux-de-Vie de fruits et de comprendre les raisons de leur succès plus ou moins direct face au grand public.”, enseigne le conférencier, s’appuyant sur de multiples tableaux et schémas d’explications.

Par exemple, Eau-de-Vie Poire Williams, avec ses arômes primaires très puissants, est l’Eau-de-Vie la plus facilement identifiée par les consommateurs. Cette identification évidente, même pour des non-initiés, est l’explication du fait de la position de best seller qu’occupe cette Eau-de-Vie sur la totalité de la gamme des Eaux de Vie de fruits.


Puis le président de la Distillerie Massenez analyse devant l’assemblée composée notamment de Jean-Louis Hoerlé, président de la CCI, du député André Schneider, de Hélène Heimburger, de Manou Massenez-Heitzmann, mais aussi des clients de l’hotel Julien, invités à participer à la folle semaine des Eaux-de-Vie Massenez à Fouday, comment différencier les arômes : primaires (originels), secondaires (issus de la fermentation) et tertiaires (issus de la distillation) et le mécanisme de la transmutation, les révélant à différents degrés.

En effet, lors de la distillation s’opère l’extraction des arômes primaires et secondaires et cette opération génère la création des arômes tertiaires lorsque le cuivre réagit aux molécules de fruits.

Mais, tenant son fil conducteur analogique entre la mémoire de l’Homme et celle du fruit, Bernard Baud explicite l’encodage d’un souvenir humain et les facteurs extérieurs pouvant altérer la véracité des faits. L’encodage -ou la mémorisation- sont également hiérarchisés et plus ou moins pertinemment restitués.

“Nous possédons des souvenirs primaires très marqués, relevant souvent de la mémoire collective, à l’instar de l’attentat du 11 septembre 2001” précise Bernard Baud, “mais nous conservons aussi des souvenirs secondaires (ex un concert, une soirée d’anniversaire). Notre cerveau hiérarchise nos souvenirs en fonction de notre état émotionnel, et lors de l’extraction de ces souvenirs, (rappel de la mémoire), ils peuvent à nouveau être modifiés en fonction de notre état psychique.


La démonstration aboutit au constat suivant : lors de la dégustation, l’Homme extrait de sa mémoire des émotions primaires, secondaires et tertiaires qui lui permettent d’identifier et d’apprécier les différentes Eaux-de-Vie de fruits.

“La dégustation n’est pas seulement une démarche intellectuelle, s’appuyant sur les connaissances et le savoir. Il y a une grande part d’émotion, générée par les souvenirs suscités, qui nous permettent d’aimer ou non l’Eau-de-Vie de fruits” conclut Bernard Baud, invitant ses auditeurs à tester trois Eaux-de-Vie de fruits et appréhender la démonstration du conférencier.


Trois Eaux-de-Vie de fruits; Mirabelle, Poire Williams et Vieux Kirsch ont été comparées et passées aux spectres aromatiques et organoleptiques.

La Poire Williams est l’Eau-de-Vie de fruits la plus vendue dans le monde (60%) car ses arômes primaires sont dominants et très reconnaissables pour tous, tandis que le Vieux Kirsch est surnommé l’Eau-de-Vie des connaisseurs par excellence car ses arômes tertiaires sont prédominants et difficilement identifiables.

“Quand un client achète une Eau-de-Vie, il achète aussi un souvenir, un plaisir, une émotion, un goût d’enfance, tout simplement” révèle Bernard Baud. “Voilà les raisons pour lesquelles certaines Eaux-de-Vie de fruits (Poire Williams aux arômes primaires évidents) plaisent à un plus grand nombre de consommateurs. La dégustation est la fameuse rencontre de la mémoire du fruit et de l’Homme; un moment rare et fantastique”, s’exclame Bernard Baud.


Durant sa démonstration -suivie d’un exercice pratique avec dégustation- Bernard Baud a mis en évidence la façon dont la mémoire de l’Homme et celle du fruit, captée dans l’eau-de-vie, sont connexes.
Lors de cette conférence, Bernard Baud a remis à chacun des clés de compréhension de la dégustation. Gardons simplement à l’esprit que grâce aux Eaux-de-Vie de fruits, c’est avant tout la saveur aimée que le distillateur cherche à immortaliser. Une vapeur odorante emprisonnée dans une distillation savamment exécutée.

Cette alchimie permet de sauvegarder de manière exacte et intacte le souvenir du fruit conservé éternellement par l’alcool, tandis que la mémoire de l’Homme va s’altérer avec le temps. Mais afin de ne pas perdre cette mémoire et ces souvenirs, l’Homme a inventé une astuce. Il se les transmet à l’infini pour entretenir une mémoire collective et ainsi construire sa culture son identité de civilisation.

Par Sandrine Kauffer
Crédit photos ©JulienBinz et ©L. Heitzmann