Emile Jung et Didier Lefeuvre ©DanielZenner

L’Alsace à Marseille 3/3

Mais maintenant place au spectacle ! Que les trois coups de spatules résonnent ! En ce dimanche sous le soleil de Marseille, notre Grand, notre Immense, notre Généreux, notre Bon Emile Jung vient causer cuisine avec nous. Tout le plaisir est pour nous. Il est venu en compagnie de Didier Lefeuvre, ancien chef étoilé du Château d’Issenbourg. La veille déjà, je me réjouissais de sa venue. Nous dînons d’ailleurs ensemble dans un restaurant étoilé.

La première recette proposée à 12 heures est une recette d’anthologie : “Flan de cresson aux grenouilles” J’arrive à 8h30. Emile et Didier sont en tenue. De la vapeur s’échappe des casseroles. Le fumet de poisson réduit, comme les quatre litres de gewurztraminer grand cru ! Les grenouilles attendent, le cresson est frais. On goûte, on évalue, on discute. Emile cuisine comme si le public était l’hôte du “Crocodile”.

Son regard et ses mots pesés transpirent l’humanisme. Il m’impressionne toujours autant. Respect. Emile aime les gens et ce qu’il fait. Sa cuisine est l’élément de liaison de sa vie. Il communique dans les langues du monde entier grâce à son art : on l’observe, on le comprend, on l’aime. La salle est comble, on l’écoute.

“Flan de cresson aux grenouilles ©DanielZenner

Toujours dans la réserve, ma petite fille habitant Toulon et venue me voir en ce dimanche. Elle se régale du flan de cresson aux grenouilles. Merci Emile, Grand Maître Saucier. Dit moi Emile, quel homme célèbre a écrit : “On nait rôtisseur mais on devient saucier ?”

Deuxième recette : “Gambas rôtis, vermicelles grillés, sauce à l’orange” Un classique. Et toujours ses sauces, concentrées, réduites à point, sirupeuses, brillantes, équilibrées. Le piment d’Espelette joue le rôle de “la douce violence…”

Emile dit : “pour qui ai-je fais la sauce ?” Les réponses fusent : “pour nous ! s’exclame le public” Faux, répond Emile. “Pour les invités ?” Faux. “Pour soi-même ?” Faux. Mais alors Emile pour qui as-tu donc fait cette sauce à l’orange ? “Pour les gambas, on doit toujours faire la sauce pour l’élément principal qui l’accompagne”.

Toujours en coulisse, moi grand gourmand, je me régale…Merci Emile pour tes leçons de cuisine, les souvenirs que tu as laissé du côté de Marseille, l’émerveillement…

Le public marseillais venu nombreux ©DanielZenner

Si vous passer à Marseille, voici quelques bonnes tables testées par mes soins.

Fuyez les bouillabaisses sur le vieux port sauf au “Miramar” (comptez 80 €) 12, quai du Vieux Port
“Une Table au Sud” une étoile au Michelin (comptez 90 €) beaux petits vins. Cuisine savoureuse. Belle bouillabaisse déstructurée mais poissons trop cuits. Ce qui est normal dans une bouillabaisse classique, mais anormal quand les filets sont cuits à la plancha. 4, quai du Vieux Port
“L’épuisette” une étoile au Michelin (comptez 120 €) Conseillé par Bernard Leray, mais je n’ai hélas pas eu le temps d’y aller ! Paraît que ça vaut le coup de fourchette.
“Le Saint Cyprien” 56, avenue de Toulon. Comptez 30 à 50 €. Devinez qui officie en cuisine ? L’ancien chef du “Rendez-vous de Chasse” à Colmar, dans les années 80 ! Goûteux, savoureux, frais. Poissons cuits à l’Escoffier, c’est-à-dire un peu beaucoup…
Le Petit Nice-Gérald Passédat

“Le Petit Nice” Chez Passédat. Trois étoiles au Michelin (comptez 190 € à 300 €) Juste en quelques mots et d’après mes souvenirs car je n’ai pris aucunes notes. Belle salle donnant sur la mer. Service agréable et consciencieux, belle carte des vins, sommelier pressé. Superbe plateau de fromages et desserts à ne pas manquer. Nous avons pris le menu Passédat (190€) composé des grands classiques de la maison : un filet de bar cuit à la perfection baignant dans un nécessaire et généreux tsunami d’une huile d’olive remarquable. L’anémone de mer en beignet et en gelée couverte d’écume : saveurs de tourteaux, d’huitre et d’oursin. La mer dans sa plus pur expression iodée, tout en délicatesse. Le plat qui m’a marqué !

Un menu tout en poisson, amuse-bouche compris avec un excellent filet de pélamide (un genre de thon) servi cru avec une vinaigrette au yuzu. En revanche, le “Navarin de homard” était complètement raté : la queue entière était élastique et sentait à pleines vapeurs l’huile trop fumante. Le suc de rouget n’a pas eu raison de ce goût acre et tenace. Testez la bouillabaisse en trois façons (170€) ça doit valoir le détour !
Pas ou peu de cuisine moléculaire. Légèreté, saveurs, cuisine Provençale, bel hommage à la méditerranée et originalité sont les maitres mots de cette table à recommander. Mais sans le homard !

Par Daniel Zenner

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