Paul Brunet, Meilleur Maitre d’hôtel et Sommelier de France en 1964 et Meilleur Sommelier de France en 1966 -DR

Paul Brunet : Ma plus belle récompense ; c’est la réussite de mes élèves

Paul Brunet, Meilleur Maitre d’hôtel et Sommelier de France en 1964 et Meilleur Sommelier de France en 1966, a exercé sa profession de 1951 à 1971 dans la restauration, avant de devenir enseignant en 1973. Professeur, formateur, conférencier, auteur d’ouvrages à succès, chroniqueur, animant également le blog des Experts du journal l’Hôtellerie-restauration, le Maitre Sommelier de l’UDSF (Union de la Sommellerie Française), a quitté l’Alsace en 2010 pour prendre sa retraite en région Nantaise. Mais, les liens qui l’unissent à notre terroir viticole sont indéfectibles. A 82 ans, il jouit d’une trajectoire passionnante, animée par l’envie d’apprendre, de transmettre, de voyager, de découvrir et de déguster les vins du monde entier. Sa plus belle fierté ; observer la réussite de ses anciens élèves. Le tableau de classe se transforme en tableau d’honneur, saluant la hauteur de son engagement.

La conjugaison des passions ; une somme de satisfactions

Né le 20 avril 1935 à Migne-Auxances (Vienne), le jeune Paul fit ses études à Tours s’initiant aux vendanges et à la vinification aux côtés de son oncle viticulteur. Son avenir professionnel semblait tout tracé.
De 1951 à 1972, il évolue dans différents établissements tels le Métropole à Tours, le Castel Marie Louise et L’Hermitage à la Baule, mais surtout à Nantes, où il gravit tous les échelons jusqu’à directeur de restauration.

«Arrivé en 1953, je pensais raisonnablement y rester 3 à 4 mois, mais j’ai prolongé pendant 19 belles années. C’était une époque formidable ! A la Duchesse Anne, nous recevions des artistes et je disposais d’une cave prestigieuse avec de très belles références. «J’en garde d’excellents souvenirs. C’est toute ma jeunesse ! (de 17 à 37 ans). Avec mon épouse, nous y avons des amis, que nous avons eu plaisir à retrouver tout en nous rapprochant de nos enfants».

En 1973, Professeur Certifié, il rejoint le Lycée Hôtelier de Strasbourg pendant 23 années -DR

Doublement distingué en sommellerie, Paul Brunet a été contacté par la Chambre des Métiers de Nantes pour assurer, une fois par semaine, des cours sur les vins pour les jeunes apprentis. «J’ai mis le doigt dans l’engrenage de l’enseignement et j’ai adoré !», se souvient-il. «J’ai eu envie de m’y engager pleinement et je me suis présenté au concours de recrutement pour l’Education Nationale.

En 1973, Professeur Certifié, il rejoint le Lycée Hôtelier de Strasbourg pendant 23 années. La renommée de la qualité de son enseignement fut telle, qu’il fut sollicité pour donner des conférences et dispenser ses cours dans le monde entier. «J’ai toujours adoré voyager ;c’est une passion transmise par mon professeur d’histoire-géographie en 5ème . A travers ses cours, il me faisait rêver et voyager. J’ai pu assouvir cette passion grâce à mon métier d’enseignant. J’ai eu la chance de me rendre en Iran avec des élèves du lycée Hôtelier d’Illkirch. Nous avons été accueillis par le shah d’Iran à trois reprises. Des voyages très marquants avec Monsieur Kocher, avec qui j’ai eu l’extrême privilège de travailler».

Ma plus belle récompense ; c’est la réussite de mes élèves ici avec Romain Iltis ©SandrineKauffer
«Et dire que lorsque j’étais étudiant à Tours, je rêvais d’aller à Paris !», s’exclame-t-il, inscrivant sur son passeport des destinations telles que le Togo, le Japon, la Réunion, le Brésil, la Russie, le Gabon, ou encore le Mexique. «Je suis encore sollicité pour donner des conférences à l’étranger» confie-t-il. «Mais, je pense qu’il ne faudrait pas faire le match de trop. Je laisse la place aux jeunes», raisonne avec humilité le pimpant octogénaire, comblé d’avoir conjugué trois passions ; l’enseignement, le vin et les voyages.

Fervent défenseur des vins d’Alsace

«J’ai vécu heureux pendant 37 ans en Alsace, nous avions avec mon épouse une jolie maison à Fegersheim, avant de nous installer à Illkirch pour se rapprocher du lycée hôtelier». Pendant ses années et sans discontinuité, Paul Brunet met ses compétences au service des vins d’Alsace, de son terroir et de ses acteurs.

Membre fondateur de l’ASA (Association des Sommeliers d’Alsace) avec Emile Jung et Jean-Marie Stoeckel, le sommelier met en exergue la richesse de son vignoble. «Depuis plus de 35 ans, je martèle, qu’aucune autre région au monde ne peut s’offrir une telle gamme de vins blancs, de cépages et de terroirs. Je dis toujours que les plus grands vins blancs du monde, du type moelleux, sont incontestablement les Gewurztraminer Vendanges Tardives et/ou Grains Nobles, qui jouissent d’un équilibre et d’une belle vivacité. Quand je parle des vins d’Alsace, je deviens lyrique », s’amuse-t-il, se remémorant lors de la conversation, une dégustation d’un Gewurztraminer 1941 chez G. Lorentz».

Lors des 40 ans de l’ASA. De G à D : P. Leonetti, R. Iltis, J-M Stoeckel, J-L Woerlé, P. Brunet, S. Dubs et Eric Zwiebel ©SandrineKauffer
De G à D : Paul Brunet, Serge Dubs, Jean-Marie Stoeckel et Emile Jung ©SandrineKauffer
Lorsqu’on lui fait remarquer qu’il a formé de nombreux sommeliers de talent et bon nombre de maitres d’hôtels renommés, il réfute modestement : «Je n’ai aucun mérite, j’ai tout simplement essayé de faire partager ma passion pour le monde fabuleux de la vigne et du vin». «Mais, je reçois encore aujourd’hui des courriers de mes anciens élèves qui me disent «merci ! C’est la plus belle des récompenses. Je suis extrêmement fier d’avoir vu s’accomplir mes anciens élèves», dit-il. J’ai eu dans mes classes Marc Haeberlin, Pierre Bord (Négresco) Annie Paul (ex-Cygne), ou encore Michel Falck (Au Millésime). Et, je suis d’autant plus fier de la réussite d’Antoine Woerlé, Pascal Obrecht ou encore Chantal Wittmann par exemple, tous trois titrés «Meilleurs Ouvriers de France des Arts de la table et du Service». «J’aurai aimé pouvoir tenter le concours du M.O.F. mais il n’existait pas encore en 2000. Et lors de la première édition, j’ai été sollicité pour faire partie du jury». La porte du prestigieux concours venait aussitôt de se refermer.

Un sommelier – littéraire

Il ne suffit pas d’être érudit pour transmettre avec pertinence et le meilleur pédagogue ne détient pas forcément toutes les connaissances utiles. Mais lorsque toutes les facultés s’additionnent et se multiplient, instrumentalisée par une belle plume, la somme des compétences de cette excellence voit naitre des ouvrages de références.
Edités à plus de 100.000 exemplaires, réédités en plusieurs langues, vecteurs d’une information exponentielle, d’une formation à grand échelle, la viralité des savoirs de Paul Brunet se répand dans le monde entier. Pour décupler le public en capacité de recueillir son expertise, Paul Brunet, évolue, tel un bon vin, en écrivain.
Auteur et chroniqueur, il consacra de nombreuses heures à la recherche, l’écriture, la préparation de conférences, et la rédaction de livres dont notamment : «Le vin et les vins au restaurant», un ouvrage de référence pour les candidats qui préparent les concours de sommellerie en France et dans de nombreux pays. Ce livre a obtenu le Grand Prix de l’académie nationale de cuisine, puis le prix de l’O.I.V. dans la catégorie «Découverte et présentations des vins». «Ce prix est incontestablement le plus important de ma vie !», admet-il. «J’en suis le plus fier. C’est mon bâton de Maréchal ! Vous vous rendez compte ? C’est une reconnaissance mondiale !».
Paul Brunet; Un sommelier – littéraire
Auteur de ; «Le vin et les vins étrangers», «Vins et autres boissons», «Vignes et Vins d’Alsace», Paul Brunet a également rédigé plus de120 chroniques hebdomadaires dans les Dernières Nouvelles d’Alsace et 200 billets pour l’Hôtellerie Restauration.

«J’ai eu plusieurs prix pour l’ensemble de ma carrière», conclut-il. «Mais, ce n’est de loin plus ce qui compte aujourd’hui», relativise-t-il. «Ma plus belle récompense, c’est la réussite de mes anciens élèves. Elle me remplit de joie et donne sens à mon engagement professionnel».

Le souhait de l’enseignant émérite, reconnu et respecté de tous, serait de continuer à écrire, de profiter des bons moments de la vie et pourquoi pas, d’accomplir un dernier grand voyage ; se rendre en Australie.

Par Sandrine Kauffer
Crédit photos Sandrine Kauffer et DR