Faire évoluer la carte sans trahir l’identité de la maison : le défi relevé par Julien Binz. Photo Jean-Frédéric Surdey

Une étoile en jeu et un chef bien armé pour la conserver

Revue de presse du restaurant Le Rendez-vous de Chasse, Hotel Bristol à Colmar et de son chef Julien Binz, paru dans le journal L’Alsace le 6 novembre 2010.

Embauché pour conserver l’étoile du “Rendez-vous de Chasse”, le chef Julien Binz évoque ce défi savoureux, six mois après avoir succédé à Michaela Peters.

Trente-trois ans que l’étoile brille au restaurant gastronomique de l’hôtel Bristol de Colmar, si l’on éclipse 1992 à 1995. Richard Riehm l’a confiée à Julien Binz, un jeune chef (38 ans) aux solides références dans le monde de la gastronomie : prix jeune talent 2006, coup de cœur 2005 au Gault et Millau.

Il a fait ses armes chez Philippe Gaertner à Ammerschwihr, au Buerehiesel, à l’Auberge de l’Ill comme second de cuisine de Marc Haeberlin, à l’Auberge d’Artzenheim et au Château d’Isenbourg. Le projet de création d’hôtellerie de luxe à Scharrarbergheim, dont il s’était vu confier la table en 2009, ayant tourné court pour les promoteurs, le Bas-Rhinois en avait profité pour créer un journal culinaire régional en ligne, qu’il alimente toujours avec sa compagne (www.julienbinz.com).

Julien Binz et Richard Riehm dans les cuisines du Rendez-vous de Chasse – photo Julien Binz
Comment vivez-vous cette première année au “Rendez-vous de Chasse”, au terme de laquelle le restaurant risque de perdre ” mécaniquement ” son étoile ?

Il est vrai que n’étant arrivé aux fourneaux que début mai, le guide Michelin pourrait estimer que je n’ai pas eu le temps de faire mes preuves, et choisir de ne pas nous inspecter cette année. Mais il y a de fortes chances que si, nous avons même quelques soupçons ! (Rires). Plus sérieusement, mon patron Richard Riehm a appris au printemps que Michaela Peters ne reviendrait pas de son congé maternité, et il m’a embauché pour conserver l’étoile. Depuis, on met tout en œuvre pour remporter ce défi. Sachant que les critères du Michelin sont parfois obscurs : contrairement à ce que prétendent certains, des restaurants étoilés ont parfois des couverts en inox par exemple.

Que change l’arrivée d’un nouveau chef dans un tel établissement ?

On repart de zéro, même si l’équipe de dix personnes en cuisine savait travailler de manière autonome. Tout le monde a suivi le changement de manière très positive. Aujourd’hui j’ai trouvé mes repères, mais cela prend un peu plus de temps pour la brigade de cuisine. Chaque plat de la carte a été élaboré et goûté en concertation avec l’équipe et M.Riehm, de manière à trouver l’équilibre entre créativité et consensus, tradition et modernité. Je propose une cuisine classique évolutive, sans doute plus légère et plus moderne que ce qu’il se faisait dans la maison. J’ai conservé des gibiers, qui font l’identité de la maison, tout en les revisitant. Mais hormis le foie gras à la cuiller et le soufflé au grand-marnier qui sont incontournables, toute la carte a changé.

En attendant le verdict du Michelin fin février/début mars, quelles sont les premières retombées ?

Nous n’avons perdu aucune distinction, et en avons gagné deux : une première étoile au Bottin Gourmand, et une toque supplémentaire au Gault Millau. L’étoile Michelin est l’objectif premier, mais pas une fin en soi : si on ne l’avait pas en 2011 il faudrait absolument la reconquérir, puis de toute façon continuer à innover.

Propos recueillis par Jean-Frédéric Surdey

Un article paru dans le journal L’Alsace le 6 novembre 2010