Paul Stradner, Sandrine Kauffer et Herve Schmitt ©Nouvelles Gastronomiques et Karine Faby

Menu photographié de Paul Stradner à la Villa René Lalique

À Wingen-sur-Moder, la Villa René Lalique a fêté ses 100 ans en 2020 et cette année, c’est la manufacture Lalique (1922-2022) qui s’apprête à célébrer son centenaire. Ce dernier est un indissociable des arts de la table, des pièces décoratives du restaurant et de l’Hôtel 5 étoiles, un véritable showroom de l’art de la cristallerie, poussé à son paroxysme et c’est jusque dans l’assiette que la magie opère. 

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En cuisine, le duo Jean-Georges Klein et Paul Stradner a pris fin en 2020, avec le départ à la retraite du chef (ex trois étoilé Michelin à l’Arnsbourg), de son épouse Nicole, de sa fille Julie, ainsi que du directeur de restaurant Patrick Meyer. L’institution alsacienne met désormais sur le devant de la scène un nouveau quatuor les « 4 magnifiques » comme les appellent les équipes de la Villa René Lalique.

Villa René Lalique ©Gilles Pernet

Hervé Schmitt, à la direction du restaurant, n’a de cesse de transmettre son savoir-faire en salle et en sommellerie, Romain Iltis, chef sommelier et directeur des vins de Lalique Group, Meilleur Sommelier de France 2012 et l’un des Meilleurs Ouvriers de France en Sommellerie 2015, compose la carte des vins et de crus d’exception et Nicolas Multon, le chef pâtissier sublime les créations sucrées de la carte.

Ensemble, ils jouent une symphonie de haute volée.

Paul Stradner, Hervé Schmitt, Romain Iltis et Nicolas Multon © Karine Faby

Paul Stradner, chef de la Villa René Lalique

Après plusieurs années passées aux côtés du chef triplement étoilé Jean-Georges Klein avec qui il partage les valeurs d’une « cuisine de goût plutôt que des assiettes complexes », Paul Stradner prend la responsabilité d’une gastronomie sans cesse renouvelée et lui offre désormais un ancrage plus fort encore.

À l’image des trois F – la Femme, Faune et Flore – qui caractérisent les sources d’inspiration de René Lalique, le chef Paul Stradner puise l’inspiration dans la nature qui s’invite à travers les larges baies vitrées du restaurant signées par l’architecte Mario Botta. Un cadre verdoyant pour une cuisine d’émotion résolument tournée vers l’avenir, c’est à dire indissociable de son territoire. C’est aussi pour faire écho aux valeurs d’artisanat et de savoir-faire chères à la Maison Lalique, que le chef a lui aussi à cœur de valoriser les richesses alentours : producteurs, pêcheurs, éleveurs, cueilleurs, en plus des nombreuses saisons qu’offre la vallée du Rhin et tout particulièrement l’Alsace.

Les arts de la table à la Villa René Lalique ©Karine Faby

Il n’y a pas de produit plus noble qu’un autre, c’est le regard que l’on pose dessus qui le sublime et peut lui offrir une toute nouvelle destinée. En ce sens, je veux faire (re)découvrir le terroir à ceux qui croient le connaître par cœur et donner l’envie aux autres de venir se laisser surprendre par une ruralité méconnue, explique Paul Stradner.

En déclinant des assiettes à la fois lisibles, pleine de sens et empruntes de souvenirs, le chef multiplie les clins d’œil à ses racines et au terroir qui l’a vu grandir dans sa quête d’authenticité, en travaillant le produit sans jamais le dénaturer. Né en Autriche, il a gardé le souvenir des femmes qui avaient tant plaisir à cuisiner les volailles de la ferme familiale. Aujourd’hui encore, c’est cet amour d’un bonheur simple et collégial qui le pousse à extraire la quintessence du goût des produits les plus bruts, pour délivrer des assiettes « justes » et sincères. Alléger le superflu, valoriser l’intelligence de la main et le cycle naturel des saisons, s’inscrire dans un rapport de confiance avec ses producteurs et limiter au maximum le gaspillage, voilà ce qui anime le chef dans sa volonté de tendre vers un cercle vertueux.

À la manière de ce qui signe toute la valeur ajoutée de la manufacture Lalique, ce sont les notions d’artisanat, de transmission et de respect du « temps long » que vient souligner la cuisine de Paul Stradner qui met l’humain au centre de sa cuisine.

Paul Stradner ©Karine Faby

Natif d’Autriche, Paul Stradner a officié dans les plus belles brigades d’Allemagne et de l’Est de la France depuis 2002. Après sept années au restaurant Schwarzwaldstube (trois étoiles au guide MICHELIN) de l’hôtel Traube Tonbach en Forêt-Noire, il choisit de rejoindre le chef Jean-Georges Klein à l’Arnsbourg, à Baerenthal en Moselle.

Trois ans après, prêt à signer sa propre identité culinaire, il prend la direction des cuisines du Brenners Park Hotel & Spa, fameux établissement cinq étoiles de Baden-Baden en Allemagne, membre de la Oetker Collection. Il y obtient d’un coup et en l’espace de quelques mois seulement, deux étoiles au guide Michelin. Une distinction qui fait alors de lui l’un des plus jeunes chefs doublement étoilé outre-Rhin. En 2016, le guide Gault & Millau le récompense de 18 points et de la gratification élogieuse d’étoile montante. Convaincu qu’il n’a pas encore fait le tour de son apprentissage auprès de son mentor, Jean-Georges Klein, il le rejoint en 2017, cette fois au sein de la Villa René Lalique, qui a ouvert ses portes deux ans auparavant, en septembre 2015.

Paul Stradner, Jean-Georges Klein et Nicolas Multon ©Karine Faby

Par ses valeurs et son ADN, l’établissement le convainc définitivement de son goût pour les entreprises familiales et à taille humaine. Depuis 2020, il a petit à petit endossé le tablier de chef, succédant avec fierté à celui qui l’a tant inspiré.

Dans la logique d’ancrer la gastronomie de la Villa René Lalique dans son terroir et dans une économie 100% locale, Paul Stradner a sélectionné des producteurs avec soin, qu’il s’agisse des écrevisses de Roland Frankhauser, des pois chiches de la Ferme Ysengrain ou des escargots d’Antoinette Christ, l’exigence de proximité rime avec excellence. Même démarche avec la volonté de proposer dans son menu « responsable » la possibilité de se passer de viande ou de poisson. Le déroulé au fil des sept plats n’en demeure pas moins gourmand avec des accords insoupçonnés entre le végétal et les bouillons, les réductions et infusions aromatiques.

Menu photographié – Septembre 2022

Le menu a débuté avec un clin d’œil aux origines autrichiennes du chef avec des amuses-bouches rappelant son parcours professionnel. À l’avant, la dégustation débute avec une cuillère au Radler d’Allemagne, sorbet bière et mousse citron, puis une tarte flambée revisitée pour l’Alsace confit d’oignon et anguille fumée, pour finir avec un bouillon de cuisse de boeuf en pot au feu et crème de raifort.

Voyage en Autriche, terre natale de Paul Stradner avec les amuses-bouches ©Karine Faby
L’huile de courge – Villa Rene Lalique ©Nouvelles Gastronomiques

L’huile de courge en tartine, clin d’œil régressif à la ferme familiale en Autriche et à ce qu’est le Kürbiskernöl* à la Styrie, surnommée « le cœur vert de l’Autriche ». Souvenir d’enfance du chef, toast pain de seigle, beurre montée à l’huile de graine de courge produite par son frère et graine torréfiée.

Oeuf parfait, beurre noisette, girolles et fromage blanc ©Nouvelles Gastronomiques
Déclinaison estivale pastèque, tomate et olive à la Villa René Lalique ©Nouvelles Gastronomiques
Caviar Osciètre maison Sturia, truite, huile d’olive et mousse parfumé au dashi ©Nouvelles Gastronomiques
Sériole, tourteau, chou-rave et combawa – Villa René Lalique ©Karine Faby
Homard bleu, pêche, verveine, amande et pâte au beurre de corail ©Nouvelles Gastronomiques
Dos de chevreuil, brocoli sauvage, sauce orge torréfié et gel framboise ©Karine Faby
Quetsche, melilot et zwetschkenfleck par Nicolas Multon ©Nouvelles Gastronomiques
Chocolat d’Équateur, de la fève au chocolat dans l’esprit d’un St Honoré par Nicolas Multon ©Nouvelles Gastronomiques

Par Sandrine Kauffer-Binz

Crédit photos ©Nouvelles Gastronomiques, Karine Faby et Gilles Pernet

villarenelalique.com