Sylvie et Gilles Grucker devant le Pressoir de Bacchus à Blienschwiller

La cuisine de Sylvie Grucker, “Ni bistrot, ni Gastro”

C’est en 2004 que Sylvie et Gilles Grucker rachetent les murs et le fonds de commerce du restaurant le pressoir à Blienschwiller (près d’Epfig) et le transforment en Pressoir de Bacchus pour mettre à l’honneur les 22 viticulteurs du même village avec une carte des vins, 100% issue de Blienschwiller.

Comment définir la cuisine de Sylvie Grucker ? Telle est la question que nous avons posé à la dynamique présidente de l’association des femmes chefs de cuisine d’Alsace. Le Bib Gourmand décerné par le guide Michelin en 2008 et le titre de maître restaurateur en 2010, attestent si besoin était, de l’excellent rapport qualité prix de la table de Sylvie.

C’est par une douce soirée de novembre, jour de l’ouverture des marchés de Noël en Alsace, que nous arrivons, sinuant de nuit à travers les vignes et les bois de la commune de Blienschwiller. Passant sous un petit pont, on découvre le joli village, situé sur la route des vins d’Alsace, qui se caractérise par sa forte concentration de belles demeures et de viticulteurs. 37, dont 22 qui vont jusqu’à embouteiller et commercialiser leur production de l’année. C’est ce qui a donné l’idée à Sylvie et Gilles Grucker, de faire une place d’honneur et de laisser l’exclusivité de la composition de la carte des vins aux viticulteurs du coin. “Je me souviens encore de ma première rencontre avec Michèle et Hubert Metz pour leur expliquer notre projet” raconte Sylvie Grucker.

Le joli Pressoir de Bacchus s’élève au cœur du village, illuminé sur la thématique de Noël , accueillant chaleureusement le passant. L’intérieur, qui par la prégnance du boisé, pourrait évoquer la winstub, est des plus confortables, agencés avec des nappages clairs, banquettes et coussinets.

La douce lumière réconforte la salle intime réservée à 25 convives (à la carte et 30 en banquet) pas plus ! Mais, en même temps, ils sont que deux. Sylvie en cuisine et Gilles en salle.

Accroché de part et d’autre de la porte d’entrée, le tableau aimanté des mets fait la part belle aux producteurs locaux. Originaire d’Obernai, Sylvie Grucker, fille de restaurateurs, diplômée en sténodactylographie et obtenant son brevet de monitrice en gymnastique, se destinait à une autre carrière professionnelle. Rejoignant le Châtelain puis le Clos des délices à Ottrott, elle y restera une quinzaine d’années (de 1989 à 2002), suivant les cours du CAP restaurant et cuisine en candidate libre au lycée hôtelier d’Illkirch; décrochant une MC sommellerie, commençant même un brevet de compagnon en pâtisserie. Mais c’est en salle qu’elle officie, au Clos des Délices.
Sa rencontre avec Gilles Grucker, va conduire l’ébéniste de métier, également issu d’une famille de restaurateurs, à une reconversion professionnelle. Il obtient rapidement son CAP et BEP de cuisinier, formé chez Fernand Mischler au Cheval Blanc à Lembach et chez Emile Jung au Crocodile à Strasbourg.


Sylvie et Gilles en dégustation dans le caveau de Michèle et Hubert Metz à Blienschwiller
Au Pressoir de Bacchus, le couple de restaurateurs a “switché” leur poste. En 2004, ils décident d’inverser leur place, Sylvie ayant officié au Clos des Délices, remplaçant un soir un chef de cuisine absent, prolongeant la situation pendant trois ans, s’est prise de passion pour ce métier, complétant ses diplômes par de nombreuses formations, notamment à l’école Alain Ducasse à Paris ou s’inscrivant au trophée Henri Huck, organisé par la Fraternelle des cuisiniers d’Alsace.

Il va sans dire que la connaissance de leur métier, dans une belle réciprocité, est une force et une complémentarité professionnelle indéniables.


en Amuse-Bouche :Saumon Gravlax maison
Seul restaurant du village, le Pressoir de Bacchus ne doit pas seulement son succès à cette exclusivité. Observant avec assiduité la règle de 3 : 3 couleurs, 3 saveurs, 3 textures, la femme chef inscrit sur son ardoise du foie gras de canard maison, une cassolette d’escargots aux tomates et pesto ou les escargots selon Papy Raymond, la soupe de choucroute au lard virtuel, un velouté de champignons et ses saint-jacques poêlées, à moins qu’en entrée, vous ne choisissiez les Saint-Jacques pochées, épatantes de douceur, dans un bouillon de fenouil, gingembre et citronnelle, dont la puissance gustative réjouit nos papilles.


Saint-Jacques pochées dans un bouillon de fenouil, gingembre et citronnelle
La carte des poissons décline avec envie un dos de cabillaud et son foie chaud de canard, ou par exemple une raviole de carpe et sa sauce fumée/crémée. Les viandes mettent à l’honneur le ragoût de jeune faon de biche et sa sauce poivrade, le filet mignon de porc alsacien, sauce à la bière, une selle d’agneau, quinoa de fruits à l’essence de thym à moins d’opter avec joie pour le Pithivier de canard, sur lit de chou rouge, sauce aux épices de Noël, fleurant bon la girofle et la cannelle, joliment escorté d’un Pinot Noir de chez Bohn en 2008.

Les desserts font la part belle aux classiques avec la crème brulée à la poire, le fondant et coulant à souhait moelleux au chocolat et sa glace café, le vacherin “selon Sylvie” ou encore le goûteux tiramisu aux noisettes.

Pithivier de canard, sur lit de chou rouge, sauce aux épices de Noël
Est-ce bien nécessaire de préciser qu’au Pressoir de Bacchus, tout est fait maison, alors que Sylvie Grucker a obtenu son titre de Maitre-restaurateur en 2010. La présidente de l’association des femmes chefs de cuisine d’Alsace annonce l’inscription dans leur association de femmes chefs en provenance de d’autres régions et que de nombreux projets sont en cours, notamment un prochain concours de cuisine, 100% féminin sur le salon Festivitas à Mulhouse en février 2013.


Le moelleux au chocolat et sa glace café
Alors “ni bistrot ni gastro” (marque déposée) la cuisine de Sylvie se découvre, se réinvente, s’interprète au gré de ses envies, et se qualifie sans l’emprisonner dans aucune catégorie.

Libre de créer, d’associer et de composer, affranchie de toute désignation, voguant de recettes traditionnelles, en winstub, de brasserie en gastronomie, sans omettre le terroir, il y a un panachage de créativité culinaire, qui réjouit chaque jour la fidèle clientèle.

Par Sandrine Kauffer
Crédit photos ©Sandrine Kauffer

Le Pressoir de Bacchus
50 route des vins
67650 Blienschwiller
Tél. 03 88 92 43 01
Menus : 14,55€, 28€, 47€ ou 65€
Carte : 35-60 €