Lors de notre séminaire de gastronomie moléculaire de juin, nous avons exploré les changements du café qui attend. Nous sommes partis de précisions culinaires qui stipulaient que le café qui attend dans une thermos change de couleur et prend de l’amertume. Vrai ? Faux ?
Le café, c’est la boisson que l’on obtient en infusant des particules solides, provenant de la torréfaction et de la mouture, dans de l’eau. Que l’on utilise des machines à expresso ou des filtres, il y a toujours ce fait qui est que les plus grosses particules ne sont pas dans la boisson, laquelle contient de très petites particules, invisibles à l’oeil nu. Pour les voir, il faut centrifuger très longuement, avec des appareils de laboratoire dont les cuisiniers ne disposent pas. En général, on récupère un dépôt, et un liquide clair et coloré.
Pour le goût, il y a cette fois le fait qu’une extraction légère, par infusion notamment, fait d’abord passer en solution des molécules volatiles, et, plus tard, conduit à l’extraction de composés phénoliques, ce que l’on nomme souvent à tort des « tanins ».
Les tanins et l’astringence
L’astringence ou l’amertume des infusions de tissus végétaux, elle, est due à des tanins, mais aussi à des composés phénoliques, de sortes que l’on serait bien avisé de parler plutôt de composés phénoliques que de tanins. Tout cela étant dit , on aurait pu donc imaginer que le café échangerait de goût lors d’un stockage, d’autant que l’on dit souvent « café bouillu, café foutu.
Un changement de goût ?
Nous avons pesé du café moulu, et l’on l’avons passé, dans un filtre, avec une quantité pesée d’eau bouillante, pour produire un premier café que nous avons laissé reposer pendant 40 minutes. Puis nous avons produit un second café, en tout point identique au premier, et l’on l’avons refroidi à la même température que le premier, car nous savons combien la température est essentielle, lors des tests sensoriels.
A la dégustation en aveugle, il est apparu qu’il y avait une véritable différence entre les deux cafés : aucune erreur de reconnaissance dans les tests triangulaires, où l’on donne trois échantillons dont deux sont identiques et le troisième différent, mais tout est à l’aveugle. Ce qui était plus merveilleux, c’est que c’est le café fraîchement produit qui a semblé le plus amer.
Je ne saurais terminer une telle description sans évoquer que le sel n’est pas un exhausteur de goût, puisque ajouté à du Schweppes, qui est sucré et amer, il augmente le sucré, mais diminue l’amertume. Dans les campagnes, on ajoutait souvent un grain de sel au café, afin d’en amoindrir l’amertume. Là encore, il y a une piste à suivre… pour une autre fois.
Par Hervé This