Thierry Marx : le chocolat qui se "whife"

Thierry Marx : le chocolat qui se “whife”

Nouveau concept du chocolat qui se respire, une poudre qui s’aspire, du cacao qui se “whiffe”, selon le nouveau terme consacré. Thierry Marx parle également de gourmandise “techno-émotionnelle”.

Thierry Marx participe au salon du chocolat à Paris du 14 au 18 octobre 2009, pour présenter “le whif nouvelle version” afin de l’extraire de son milieu expérimental et de toucher le grand public.

Le Whif est un inhalateur de saveurs créé par David Edwards, le fondateur du Laboratoire, et développé aux côtés de Thierry Marx, chef doublement étoilé au Guide Michelin, au Relais-Château de Cordeillan Bages à Pauillac.

L’idée est de réaliser des expériences communes entre artistes et scientifiques. David Edwards travaille depuis une quinzaine d’années sur les aérosols médicaux. C’est lors d’un déjeuner chez Thierry Marx qu’est née l’idée de mêler ces aérosols et la cuisine du Chef étoilé, pour créer une nouvelle façon de manger par aspiration. L’équipe du “Laboratoire” a du résoudre deux principales difficultés : la taille des particules – elles ne doivent pas être trop fines et passer dans les poumons – et le design du Whif, pour que les particules soient dirigées vers les côtés de la bouche.

Le Whif est une nouvelle façon de manger du chocolat, En fait, “manger” est un bien grand mot, car ici, on inhale le chocolat par la bouche… comme une cigarette ! Cette expérience sensuelle est très éphémère, mais l’on peut recommencer à l’infini.

De la poudre aux yeux, une illusion gustative

Le tube de Whif
Le Whif se présente comme une alternative au traditionnel carré de chocolat qui accompagne le café.

Une innovation culinaire qui pourrait bien rapidement se décliner au féminin puisque la masse totale contenue dans le Whif est de 200 milligramme de poudre de chocolat (et non du cacao en poudre), représente moins d’une calorie par tube tout en apportant un plaisir gustatif aussi satisfaisant que la consommation d’une barre chocolatée. Car lorsque vous croquez un carré de chocolat, vos papilles gustatives ne recueillent qu’une faible partie de la saveur du produit ; pour satisfaire votre désir de goût intense, vous avez donc tendance à en reprendre plusieurs fois.

Avec Le Whif, l’arôme est immédiatement présent, optimisé par l’ergonomie de l’aérosol et toutes les sensations sont exaltées.

Mode d’emploi

Les 4 saveurs
Selon ses concepteurs, “whiffer” signifie l’acte de placer le Whif entre ses lèvres et d’aspirer la poudre fine de chocolat contenue dans le “Whif”.
L’inhalateur, qui ressemble à un gros cigare, est en réalité un aérosol grâce auquel la poudre de chocolat se dépose à l’intérieur de la bouche.

Pour l’utiliser, il suffit de tirer sur le bout coloré et de placer le côté marron entre ses lèvres. Ensuite, on aspire doucement et la poudre de chocolat quitte le tube pour se déposer sur votre palais et votre langue. Même si les microparticules de poudre de chocolat sont très fines et volatiles, elles ne sont pas réduites en fumée mais bien matérialisées, puisque leur diamètre est supérieur à 10 microns. C’est la raison pour laquelle, la poudre n’atteint pas les poumons comme certains consommateurs auraient pu le redouter.

Mais, l’innovation et la recherche engagée sur un tel concept réside dans le design fonctionnel et pragmatique de ce tube. Des ouvertures latérales invitent, à chaque inspiration, les particules à se diriger contre les parois de la bouche et non pas vers le fond de la gorge. Ainsi, elles excitent directement et durablement les papilles gustatives.

Selon l’intensité de l’aspiration, vous pouvez whiffer de quatre à six fois. Entre chaque utilisation, veillez à bien fermer le Whif afin que le contenu soit bien conservé et protégé entre chaque usage.
Lorsque votre Whif est ouvert, veillez bien à ce qu’il reste dans la position horizontale. Si vous le laissez dans la position verticale alors qu’il est ouvert, la poudre de chocolat s’échappera du Whif.

Le whiffing en devenir

David Edward et Thierry Marx
Les possibilités culinaires du whiffing ont été révélées lors de la tournée mondiale du Whif, lancée le 29 avril 2009 à Paris, et qui s’est poursuivie sur la plage du Majestic à Cannes pendant le Festival et a fait une apparition remarquée au salon international de la confiserie, le “All Candy Expo” de Chicago, en mai dernier.
Et l’objectif est de proposer bientôt d’autres saveurs que le chocolat avec cinq autres célèbres chefs.

Le ” Laboratoire ” continue par ailleurs de faire évoluer le Whif lui-même. Il devrait présenter à l’automne le ” Whaf “, un objet destiné à être mis sur la table pour que chacun puisse créer ses propres recettes de nuages à “whifer”…

L’inhalateur de chocolat ne serait donc que la première étape d’une révolution gastronomique.

“Grâce à l’union de l’art culinaire et de la science des aérosols, nous contribuons à faire évoluer les habitudes alimentaires. On appelle cela whiffer”. David Edwards annonce par ailleurs, la percée imminente de nouvelles innovations culinaires, développées par le FoodLab au Laboratoire; le centre de recherche scientifique et artistique qu’il a créé en plein coeur de Paris.

Quatre saveurs sont proposées : chocolat-mangue, chocolat-framboise, chocolat-menthe et chocolat-chocolat. (tarif à l’unité : 1,80 €, Pack de 6 Whifs : 9,95 €, Pack de 24 Whifs : 39 €). La boutique parisienne Colette commercialise le Whif, au goût de chocolat-cannelle, baptisé “American Whif”. Pour plus de renseignements, rendez-vous sur le site : www.lewhif.com

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Le Whif annoncerait “l’art de manger autrement : la cuisine par aérosol ! Exit fourchettes et autres couteaux ou cuillères… La gastronomie du XXIe siècle se voudrait plus légère et aérienne, emplie de nouvelles émotions, d’instants magiques et de redécouverte du goût. Nouvelle sensation gustative à la frontière d’une révolution culinaire”…

Ce produit semble révolutionnaire, reste à savoir s’il n’est pas trop en avance sur son temps.

Alors que la cuisine moléculaire d’El Bulli connaît bon nombre de détracteurs, il est fort probable que les conservateurs s’élèvent contre ces technicités avant-gardistes, qui anéantissent tous les plaisirs authentiques et traditionnels de la table.

En tant que professionnel, j’aborde le sujet avec passion et admiration, mais pour l’instant, force est de constater que l’innovation altère les sensations offertes par les saveurs d’antan, les produits du jardin. Le plaisir de la mache, du croquant sont psychologiquement inhérents à la prise d’un repas et à la sensation de satiété, d’avoir bien mangé.
La sensualité d’un jus qui coule, d’un fondant, d’une texture voluptueuse, éveillent des émotions, des souvenirs d’enfance, qui relèvent parfois de l’intimité.

La perception de la cuisine moléculaire peut sembler abstraite, virtuelle et immatérielle. Elle n’est demeure pas moins une belle évasion, une porte ouverte vers l’infinie possibilité en termes d’innovation et de création. Elle doit être cultivée comme une cuisine d’exception ayant pour finalité de surprendre le gourmet sans mettre en danger la gastronomie française en voie d’être inscrite au patrimoine immatériel de l’UNESCO.

J’adhère à une expérience sensorielle, occasionnelle, de l’ordre de l’exceptionnel, mais, qui ne pourrait se subsister aux produits vrais.

Par Sandrine Kauffer