Certains ingrédients culinaires changent de couleur, en cours de cuisson, et les cuisiniers sont sensibles à offrir à leurs hôtes des couleurs fraîches, de sorte qu’il n’est pas étonnant que le monde culinaire se soit préoccupé du brunissement des haricots verts, du noircissement des pommes ou des poires, des champignons de Paris ou des avocats, par exemple. On sait aussi que les artichauts, notamment, changent rapidement de couleur, soit quand on les tourne, soit quand on les cuit, et, empiriquement, les cuisiniers ont cherché des moyens pour prévenir ce brunissement.
Le jus de citron a été beaucoup utilisé, mais aussi la farine, dans les blancs, ou l’huile, notamment l’huile d’olive, le sel, le bicarbonate, etc.
Lors de notre dernier séminaire de gastronomie moléculaire, nous avons voulu explorer la question, et, plus précisément, nous sommes partis d’une citation de Joël Robuchon, dans Les dimanches de Joël Robuchon, p. 16, écrit : “Dans une grande casserole, faire bouillir de l’eau. Saler à raison de 10-18 grammes par litre ; ajouter un jus de citron entier. Verser cinq cuillerées à soupe d’huile d’olive. Je déconseille le procédé classique qui consiste à ajouter de la farine dans l’eau de cuisson pour préserver la couleur des fonds d’artichaut. Je préfère le jus de citron et l’huile d’olive, qui fait office d’isolant”.
Pour nos études, nous sommes partis de deux casseroles analogues (mais intérieur porcelaine dans un cas, téflon dans l’autre) avec la même quantité d’eau (75 cL).
Dans une des casseroles, on met une quantité de farine correspondand à cinq grosses cuillerées à soupe.
Dans l’autre casserole, on couvre la surface d’huile d’olive.
On porte l’eau des deux casseroles à ébullition.
Juste après, un petit artichaut poivrade a été tourné, coupé en deux et au même moment une moitié a été placée dans chaque casserole.
Après cuisson, le résultat était nettement visible :1. Les artichauts poivrade sont cuits les premiers. Celui qui est cuit avec l’huile d’olive est plus blanc (légèrement vert/bleu), moins jaune ; de l’huile d’olive apparaît clairement dans le foin, par capillarité. L’autre artichaut, cuit avec la farine et le jus de citron, est plus jaune, et il brunit/rosit progressivement.
2. Pour les gros artichauts, on observe le même effet, mais bien plus nettement.
Nous avons alors refait l’expérience, en prenant des photos avant la cuisson, pour bien être sûr que les deux demi artichauts sont identiques, du point de vue de la couleur. Le même effet final est observé que pour la première expérience.
Pour interpréter les phénomènes, on devra tenir compte du fait que le citron contient de l’acide ascorbique, qui prévient le brunissement enzymatique ; l’huile d’olive contient également des composés antioxydants.
Toutefois, on doit observer que les deux casseroles n’étaient pas identiques, de sorte qu’il faudra refaire les expériences avec deux casseroles identiques, afin de lever le doute (très léger) qui subsiste.
On pourra aussi comparer de l’eau pure avec les deux préparations précédentes, ce que nous n’avons pas pu faire faute de temps. Idéalement, on testerait :
– eau
– eau et citron
– eau et farine
– eau et huile
– eau et citron et farine
– eau et citron et huile.
Chacun est invité à faire l’expérience. Les résultats peuvent être envoyés à icmg@agroparistech.fr