Catherine Barrier, fille du chef triplement étoilé disparu en 2009, vient d’investir le restaurant Charles Barrier, anciennemtn 3 étoiles Michelin, lieu pour y installer son agence de conseil et communication dédiée à la gastronomie et créé un espace hybride pour faire revivre le savoir-faire et les archives de son père, Meilleur Ouvrier de France.
Durant près d’un demi-siècle, le restaurant de Charles Barrier a été le rendez-vous de nombreux gourmets au 101 avenue de la Tranchée, à Tours. Meilleur Ouvrier de France en 1958, le chef décroche sa première étoile au guide Michelin dès 1955, une deuxième en 1960, et ce sera la consécration, avec un troisième macaron, en 1968. Une reconnaissance que Charles Barrier a partagé avec son épouse, Nicole Barrier, complice, femme de l’ombre et bras droit du chef en coulisses.
En 1996, à 80 ans, le chef précurseur de la Nouvelle Cuisine, au même titre que Paul Bocuse ou Michel Guérard, fait ses adieux aux fourneaux tout en restant propriétaire des murs.
Une agence et un lieu d’exposition
« Au printemps 2023, à l’issue du dépôt de bilan de notre dernier locataire, présent depuis 1996, notre famille a dû repenser la destination du lieu », explique Catherine Barrier, fille du chef étoilé. Avec sa mère Nicole, elles décident de réinvestir cet espace autrement avec la volonté de mettre en avant les archives liées au parcours de Charles Barrier.
Notes, textes, recettes, menus, livres, photos, films… tous les souvenirs de Charles Barrier ont été précieusement classées, rangées, hiérarchisées par sa fille Catherine, archiviste de formation.
Un trésor culturel, culinaire et artistique, que le public pourra découvrir dès le mois de septembre, sur des plages horaires spécifiques. Exposées dans l’ancien salon d’accueil du restaurant, ces archives retracent le parcours du chef étoilé, de la Touraine au Japon, en passant par Paris et Monaco. Les élèves des établissements scolaires et lycées hôteliers seront aussi invités à revivre la trajectoire singulière d’un jeune paysan sans le sou. « Un formidable message d’espoir pour les nouvelles générations », souligne Catherine Barrier.
Les 300 m2 de l’ancien restaurant de Charles Barrier, avec son trio de lustres en cristal et sa terrasse, où le chef aimait sculpter des compositions en glace destinées au service en salle, héberge désormais l’équipe de l’agence de conseil et communication fondée par sa fille Catherine en 2016. Une agence ciblée sur les métiers de la gastronomie, les chefs attachés à leurs terre et territoire et les institutions impliquées dans la valorisation d’un patrimoine culinaire. « En récupérant les clefs du fief familial courant juillet 2023, j’ai eu la possibilité d’y installer mes bureaux, commente Catherine Barrier. Le phénix, logo de mon agence, apposé sur la façade, symbolise la renaissance. J’y ai vu un signe fort… »
Lieu volontairement hybride, le 101 avenue de la Tranchée se veut aussi rendez-vous de chefs français et internationaux, de jeunes pousses et de talents confirmés. L’idée : faire vivre le patrimoine culinaire de Charles Barrier en s’emparant de ses recettes emblématiques. À l’instar de la fricassée de poulet au vinaigre de framboises, « une recette simple, populaire que j’aimerais proposer et servir au plus grand nombre », détaille Catherine Barrier.
Appel à témoignages
Les convives venus déjeuner ou dîner chez Charles Barrier, lorsqu’il était encore derrière ses fourneaux, sont invités à raconter leurs meilleurs souvenirs face à une caméra qui sera installée au 101 avenue de la Tranchée à Tours. Ces témoignages alimenteront un site web (en cours de finalisation) consacré au chef triplement étoilé. Du vécu en version très originale.
Charles Barrier, un chef ancré en Touraine
Né Touraine en 1916, apprenti pâtissier à Langeais dès ses 12 ans, fondateur de son restaurant à Tours en 1944, Charles Barrier aimait profondément sa région dont il travaillait les viandes, les poissons de Loire, les fruits, les légumes… Mieux encore : il faisait son propre pain, fumait son saumon, créait son chocolat. Un circuit ultra-court avant l’heure. « Charles Barrier était un véritable ambassadeur du Val-de-Loire. Originaire de Cinq-Mars-la-Pile, il était issu d’une famille pauvre et paysanne, attachée à la terre. Pour lui, la cuisine venait forcément de cette terre nourricière, colonne vertébrale de sa vision de la gastronomie », explique Catherine Barrier. S’installer à Paris ? « Pourquoi y aller ? Ici, j’ai mon cœur, je connais les routes, les arbres que j’ai plantés. Avoir deux restaurants, c’est avoir le double d’emm… Avoir plus d’argent ? Plus de nénettes, de godasses neuves, d’impôts ?… », avait répondu Charles Barrier, avec son franc parler habituel, au journaliste François Simon, dans les colonnes du Figaro en mai 2006.