Julien Binz et Richard Riehm

À la table de Julien Binz au Rendez-vous de Chasse

En mai 2010, Julien Binz a pris la direction des cuisines du restaurant gastronomique le Rendez-vous de Chasse à Colmar (68) au cœur du Best Western Grand Hôtel Bristol, un établissement 3*** presque centenaire de 90 chambres, qui héberge également l’auberge-brasserie, véritable reflet de l’Alsace typique et historique.

65 employés, deux chefs et deux brigades distinctes s’activent 7/7 pour satisfaire une clientèle d’affaires et régionale, mais également touristique et gastronomique. L’extension de 1500m2 qui a eu lieu en 2006 a étoffé l’offre de l’établissement qui se compose de plusieurs salles de réunions et séminaires (200 personnes), un espace de bien-être avec sauna, hamman et fitness, mais également un parking privé et souterrain, juste en face de la célèbre gare.

Construit en 1912 par le colmarien Eugène Fleck, acquis en 1960 par Germaine et René Riehm, hôteliers-restaurateurs strasbourgeois, l’établissement est dirigé dès 1971 par Richard Riehm qui crée la même année, L’auberge-brasserie. Il n’aura de cesse d’être un ardent acteur du développement et de la réputation de son établissement, le teintant irrémédiablement de sa personnalité, ne manquant jamais de venir saluer les invités, en directeur omniscient et omniprésent.
La façade du Bristol, juste en face de la gare de Colmar
Mais, en 2011 le restaurant étoilé au guide Michelin s’est vu “suspendre” sa gratification gourmande. “Chez Michelin, la règle est claire” a déclaré Richard Riehm, ” du moment qu’on change de chef, l’étoile est remise en jeu, sauf à s’appeler Ducasse ou Robuchon” prenant soin de conforter le chef Julien Binz, arrivé en mai dernier, chaleureusement recommandé par Emile Jung, ancien chef du Crocodile et Marc Haerberlin, de l’auberge de l’Ill, chez qui, Julien fut l’un de ses seconds.

On se souvient rapidement qu’il a été formé chez des chefs étoilés de la région, pur produit du savoir-faire culinaire alsacien : Philippe Gaertner, Antoine Westermann et Marc Haeberlin avant de prendre les responsabilités de l’auberge d’Artzenheim et du château d’Isenbourg.

La salle du rendez-vous de Chasse avec ses magnifiques lampes Artichok de Louis Poulsen
Sans rien n’avoir perdu de son enthousiasme ni de son envie créative, Julien Binz assure tout mettre en œuvre pour reconquérir cette distinction. “Ce n’est ni une sanction, ni une fatalité, tout au plus une remise en question, qu’il faut prendre en considération”, admet-il. “On retrousse ses manches chaque jour pour pour faire la démonstration d’un savoir-faire culinaire et, surtout faire plaisir aux clients de l’établissement. Là résident nos encouragements et notre première satisfaction.”

Aujourd’hui, sa cuisine contemporaine se balade dans l’air du temps, conjuguant modernité et authenticité, n’en perdant ni le goût, ni la quintessence des produits, toujours de saison.


Caroline Baur et Jean-Marie Dirwimmer
En salle, Jean-Marie Dirwimmer, maître sommelier et directeur de salle, se targue de 30 années d’ancienneté dans la maison, éclairant les gourmets sur les vins à marier, fin connaisseur des accoutumés, orchestrant leur venue dans le respect de leur moindre habitude, avec élégance, discrétion et retenue

Et voici ce que le maitre d’hôtel vous annonce à la table du Rendez-vous de Chasse:

“En amuse-bouche : espuma d’asperges vertes, gaspacho tomate-concombre, royale de foie gras, émulsion crustacés”.

Au Rendez-vous de Chasse, les amuse-bouche sont servis en trilogie, tout en délicatesse pour vous mettre en appétit.

“Oeuf poché, pointes d’asperges vertes et blanches, émulsion au jus de truffes noires, grosse mouillette”

C’est un plat plus gourmand qu’il n’y parait, puisqu’au fond, se niche une purée de pommes de terre qui apporte de la texture et de la rondeur à ce plat printanier. Quand on casse l’oeuf poché, le jaune s’écoule et se mélange parfaitement avec l’émulsion truffe. On se sert de la mouillette dans l’esprit d’un oeuf à la coque et on se régale avec ce que le chef nomme “une association évidente” ; asperges, oeuf, truffes et pommes de terre.

“Les jambonnettes de grenouilles poelées au beurre de cerfeuil, risotto noir et blanc”

Le fond de grenouilles monté au beurre est très corsé, relevé par un cerfeuil fraichement hâché, qui apporte une touche anisé très parfumée. Servi avec un risotto traditionnel, agrémenté d’un riz noir vénéré, le chef ne manque pas de souligner qu’il s’agit d’un clin d’oeil à la célèbre recette d’Antoine Westermann.


“Homard au bouillon de gruyère, pousses et ravioles d’épinard”

C’est un plat qui confronte avec succès légèreté et puissance, parce que le gruyère amène une force inattendue qui se marie bien avec le homard.


“Filet de turbot roti, carottes au gingembre, émulsion de jus de carottes à la moutarde”.

La brunoise de carottes, gingembre et graines de moutarde, est recouverte d’un tressage de carottes et courgettes. On s’aperçoit que le gingembre contrebalance la douceur sucrée de la carotte avec un piquant nerveux qui la réveille, encore différent de la force amenée par les graines de moutarde à l’ancienne.


“Cote de veau rotie, timbale d’asperges et morilles, jus de veau gras. “

La Cote de veau cuite en basse température est rehaussée visuellement par la timbale de spaghetti à l’encre de seiche, farcie d’une fricassée de morilles à la crème. Les asperges vertes et blanches sont posées sur ce petit jus gras de veau à l’ancienne.

“Déclinaison autour du cochon, petits pois à la française, jus d’oignons caramélisés”

Dans ce plat, se conjuguent à l’unisson le bon gout du cochon avec un filet de dos de porcelet, une poitrine salée confite au jus d’orange et à la vanille et laquée avec ce meme jus sirupeux, séparés tous deux par une compression de pommes de terre et de boudin. Dans une coupelle séparée, les petits pois à la française ont bon ton de sublimer la création, renforçant la thématique par ses petits lardons fumés.

Toute l’assiette se tient. Elle se déguste dans toutes les combinaisons, le mariage reste cohérent et les déclinaisons classiques du cochon sont travaillées de manière innovante.

“Hémisphère chocolat, framboises, guimauves et chocolat chaud. “

Jean-Marie Dirwimmer vient verser sur la sphère un chocolat chaud, qui va faire fondre la boule, pour laisser apparaitre une mousse chocolat et des framboises fraiches, révélant un contraste froid-chaud intéressant. On saisit les bâtonnets de guimauve pour les tremper, dans l’esprit d’une fondue au chocolat.

“Coque meringuée, coco citron vert, fraises, crumble chocolat blanc, glace marbrée banane-fraise”
Dans l’esprit cette fois d’un vacherin glacé, accompagné de fruits frais, on se fait plaisir avec un dessert rafraichissant, revivifiant, réveillant vos papilles gustatives dans un dernier soubresaut de gourmandise.

Par Sandrine Kauffer
Photos : ©SandrineKauffer

LE RENDEZ-VOUS DE CHASSE
GRAND HOTEL BRISTOL
7, place de la Gare
68000 Colmar
Tél. 03 89 23 59 59
Fax : 03 89 23 92 26