Stéphane Riss en Alsace juillet 2012.

3 questions à Stéphane Riss du site Cuisiner En Ligne

Samedi 22 février 2014, Stéphane Riss annonçait hier sur son site “Cuisiner en Ligne” qu’Olivier Nasti au Chambard à Kayserberg, obtiendrait sa seconde étoile. Ce jour les DNA et l’Alsace publient “la rumeur” s’appuyant sur une source “fiable”.
Mais qui est Stéphane Riss ? Comment obtient-il toutes ces informations ? Sont-elles fiables ? Toutes les réponses Lundi 24 février dès 11h avec des infos en direct de la conférence de presse à Paris. En attendant, nous vous proposons de relire un article paru en 2012.

(Juillet 2012) Il y a une quinzaine de jours, l’Alsacien Stéphane Riss, créateur du site Cuisiner en ligne est venu dans notre région rencontrer et filmer trois chefs alsaciens : Marc Haeberlin, Olivier Nasti et Julien Binz

L’occasion pour le journal de vous présenter Stéphane Riss, l’électron libre de la toile gastronomique, ex-candidat Masterchef de la saison 1 (qui a terminé 50ème) célèbre dans la profession pour annoncer le Palmarès Michelin, avant la publication du communiqué officiel. 3 questions à Stéphane Riss sur son parcours, le fonctionnement de Cuisiner en Ligne et les rumeurs du guide Michelin.

SK :Quel est votre parcours personnel et professionnel ?

Stéphane Riss : “Je suis né à Rosheim en Alsace, il y a une quarantaine d’années et j’y ai grandi jusqu’à mes 6 ans avant de rejoindre Paris. J’ai un BTS en action commerciale, un DEUG Ecla : Education, communication et Langage à l’université de Paris VIII. En 1995-96, je suis parti à Quebec faire une licence en communication, avec deux modules mineurs ; le cinéma et l’informatique, qui me seront fort utiles par la suite pour créer et animer le site www.cuisinerenligne.com. C’est du Québec que tout est parti, j’ai découvert le multimédia, Internet avec Netscape. En 1997, de retour à Paris, je m’inscris en maîtrise et je rédige un mémoire sur l’importance des nouvelles technologies et les changements possibles dans les années à venir, en même temps que j’effectue mon service militaire dans les Renseignements Généraux (R.G.), dans un corps inter-armé où je formais les militaires à l’Internet et aux recherches sur le net.

Professionnellement, j’ai très vite intégré une start-up en tant que développeur, on peut dire que j’ai “mangé du code”. J’y suis resté deux années et j’ai gravi différents échelons, avant de rejoindre le groupe Galerie Lafayette pour lequel j’ai créé des sites e-commerce. Ce qui était très intéressant, c’était d’avoir pu travailler pendant deux mois au centre de recherches d’IBM à La Gaude près de Nice avec leurs ingénieurs. On était en 2000, en pleine explosion de la bulle Internet. C’est là que je décide de rejoindre une webagency comme chef de projet, en gestion du compte du groupe Total, toujours dans le domaine de la conception, du développement de site et de la stratégie de communication Internet. Je suis devenu directeur des projets, avec des budgets atteignant les 1,5 millions d’euros et une équipe d’une quinzaine de personnes. “

Stéphane Riss dans les cuisines de l’auberge de l’Ill
SK : Comment avez-vous rejoint l’hôtellerie-restauration?

SR :”C’est par le biais de mon frère cuisinier Pascal et de mon père qui ont acheté l’Hôtel de France, Côté jardin à Saint Maximin. Ils m’ont demandé de les rejoindre dans l’affaire familiale et j’ai été responsable de l’Hôtel, du management, aux réservations, de sa commercialisation à l’accueil en réception. J’ai commencé par le faire certifier sur une norme Iso Le label Hotelcert, “la marque des hôtels de qualité”.”

“J’y ai travaillé 8 années pendant lesquelles, j’ai découvert les problématiques d’une profession. J’entendais mon père et mon frère qui avaient du mal à recruter. Alors je me suis demandé comment je pouvais apporter mes compétences à ce secteur de plus en plus sinistré ? J’ai démarré Cuisiner En Ligne il y a 7 ans. Je savais que la vidéo allait exploser alors j’ai lancé une chaîne sur Internet qui donnerait envie aux jeunes de rejoindre ce métier. La meilleure des choses était de laisser les chefs s’exprimer à travers une recette qui pouvait sublimer un produit. Mon souhait a été de proposer aux internautes de pousser les portes des cuisines pour rentrer dans le vif du sujet. Passionné par la cuisine, je voyais bien que le “centre d’intérêt” franco-français qui suscite tant d’émoi chez nos compatriotes ne trouvait aucun écho sur la toile; quand bien même il existait quelques sites en la matière, aucun ne proposait alors de contenu vidéo, limitant le propos à une analyse intello dépourvue de pragmatisme.

Le premier chef à accepter était Marc Veyrat. Je lui ai envoyé un mail lui expliquant mon projet. Deux jours après, il m’a répondu en me demandant pourquoi devrait-il soutenir mon projet ? Tout simplement parce qu’une émission télévisée est programmée tel jour à telle heure et sur internet, elle est diffusée 24h/24 toute l’année. Il a dit OK ainsi que les chefs Emmanuel Renaut et Gérald Passedat.

Stéphane Riss au Chambard avec Olivier Nasti
SK : Quelle est la force et l’impact de cuisiner en ligne ?

SR : “Je ne suis pas un webmaster, mais je maîtrise toute la chaîne du site Cuisiner en Ligne qui en est à sa troisième version, du développement, au design, de la vidéo à l’hébergement dédié. Je fais tout et je ne dépends de personne. Le site me coûte le temps que j’y passe. Il n’a pas de modèle économique, pas d’annonceur et c’est gratuit. Je suis libre du ton que j’utilise, je suis indépendant et je ne vais jamais, par principe, aux déjeuners ou opérations de presse, ni aux lancements de produits. Dès le début, j’ai eu envie de m’émanciper des dictats de la presse et des lignes éditoriales un peu trop rigides pour apporter une vision nouvelle, une fraicheur dans un propos clair et direct. CuisinerEnligne m’a donné l’occasion d’échanger et de rencontrer de plus en plus de professionnels, de rentrer dans ce cercle clos des chefs lassés par les copinages journalistiques, dont les jugements papiers peuvent à tout moment tomber comme des couperets, mettant en péril des années de métier, des carrières, des employés, des maisons…

La seconde force est d’avoir été l’un des premiers à réaliser des émissions de cuisine en direct, où 3000 internautes connectés pouvaient suivre un service pendant 3 heures et poser des questions au chef. Le lendemain, celui-ci proposait une technique culinaire autour d’un produit. Cuisiner En Ligne donne de l’info, des conseils et techniques de grands chefs pour ceux qui ne peuvent pas se payer des cours de cuisine. C’est un support de rencontre, je parle des chefs, dont j’ai découvert et apprécié l’univers.

Stéphane Riss à l’auberge de l’Ill à la table de Marc Haeberlin
Il y a 8 à 10.000 visiteurs uniques/mois et presque 3 millions de vidéos vues/an. Je diffuse aussi bien sur le site que sur les réseaux sociaux : You tube, twitter, ou facebook par exemple. Le site CuisinerEnLigne est presque devenu secondaire. Il apporte de la visibilité et du référencement, mais la viralité de l’information et de la diffusion des vidéos va se jouer sur les médias sociaux, où le flux est capté en permanence. La vidéo d’un repas chez Jean Sulpice , L’Oxalys à Val Thorens en Savoie a été vue 40.000 fois et bien évidemment cela lui a ramené des clients. Dernièrement David Toutain, de l’Agapé Substance à Paris me disait que la vidéo avait accéléré le rythme des réservations, idem pour Alexandre CouillonLa Marine à Noirmoutier. Les chefs viennent de comprendre qu’auparavant pour qu’on parle d’eux, ils devaient connaître des journalistes. Aujourd’hui on peut faire parler de soi en étant actif sur les médias sociaux.

SK : Petite question subsidiaire sur les “rumeurs du Michelin.”

SR : Cela fait 7 ans que je m’occupe des rumeurs Michelin. Je voulais montrer que les informations sont accessibles et circulent et pas seulement chez les journalistes. Cela me prend beaucoup de temps et d’énergie, mais depuis 3 ans, je publie le Palmarès Michelin avant la sortie du communiqué officiel. Mes infos sont fiables et pour alimenter les rumeurs Michelin, j’ai créé deux groupes sur Facebook. Un qui est ouvert (1200 membres) et l’autre qui est secret avec seulement 200 membres bien identifiés et cooptés. Ce qui est amusant c’est que les chefs le font vivre et l’animent, mais en toute confiance.

Le problème du Guide Michelin est de ne pas avoir anticipé la rapidité avec laquelle les informations circulent sur Internet. Quand je prends une photo d’un plat dans un restaurant 2* en Alsace et que je la compare avec une autre région, on peut vérifier une différence et remettre en question les critères du guide. Un autre souci avec leur nouveau site Internet, bien tardif, est l’absence de modération des avis des consommateurs, tout comme l’impossibilité de vérifier si ils sont bien venus. Récemment une personne, proche du guide, a déposé 5 avis identiques sur 5 restaurants 3* et les 5 ont été publiés. Preuve si il en était, des améliorations à apporter.”

La suite dans un prochain entretien….

Propos recueillis par Sandrine Kauffer
Crédit photos ©SK