Une soupresse ? Y aurait-il quelque chose que l’on met « sous presse » ? Non, même si l’on trouve quelques restaurants modernes qui le prétendent… en faisant sans doute des fautes d’orthographe. Car les soupresses sont d’anciennes recettes : on les trouvé déjà chez François Massialot, en 1705. Et en voici la recette : on hache de la chair de poisson, et l’on ajoute du beurre, des câpres, des fines herbes. On travail l’appareil, que l’on cuit dans un linge, avec du vin blanc. On égoutte, puis on coupe en tranches « comme du jambon.
Avant toute chose, je voudrais insister sur le travail de l’appareil, car j’ai récemment entendu dure que cela faisait sortir l’ « albumine »… C’est là utiliser un vocabulaire qui a un ou deux siècles de retard : oui, le travail de chair hachée conduit progressivement à un changement de consistance de la mêlée, comme le savent bien les charcutiers, qui malaxent quotidiennement de la chair de porc hachée, mais ce qui sort n’est pas de l’albumine, mais des protéines, qui sont sans doute des actines et des myosines, majoritairement. Et ces protéines qui sortent des fibres musculaires broyées font tenir la masse, à la cuisson, parce qu’elles coagulent, selon le bon vieux principe des terrine, par exemple.
Cela dit, comment nommerait-on une préparation telle que la décrit Massialot ? Une terrine ? Non, puisque ce n’est pas cuit dans une terrine. Une farce ? Non, parce que l’appareil ne vient pas farcir une pièce. Une mousseline ? Ce serait ce qu’il y aurait de plus convaincant, sauf que l’on utilise ici un linge qui n’est pas nécessairement une mousseline… et j’en profite pour rappeler que la différence entre mousse et mousseline tient au fait que l’appareil est cuit dans le linge mousseline, pour faire les mousseline.
Bref, résolvons-nous à nommer cela une « soupresse », d’autant que c’est un appareil particulier, avec du beurre, des câpres, des fines herbes, et une cuisson dans du vin blanc. Bien appétissant, non ?
Hervé This