Mardi 26 juillet 2022, au cœur de la Halle aux Vins c’est Alexis Albrecht, chef du Vieux Couvent* à Rhinau qui a cuisiné un plat signature de son établissement, une dédicace fleurie à son jardin. Pour l’occasion, il était entouré de Nicolas Rieffel pour l’animation du cook show et de Romain Iltis, Meilleur Sommelier de France 2012 et l’un des Meilleurs Ouvriers de France en Sommellerie 2015, chef sommelier exécutif de la Villa René Lalique, 2* Michelin à Winger-sur Moder.
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Un deuxième jour sous le signe de la gastronomie et pas qu’alsacienne aujourd’hui, puisqu’Alexis Albrecht a fait un hommage à ses origines italiennes, il était d’ailleurs accompagné de Julia et Lorenzo, deux commis italiens ! Le temps a filé sans temps morts, offrant aux curieux un cook show riche en anecdotes, culture gastronomique, vinique et surtout plein de bonne humeur !
Au menu, un risotto de légumes du jardin d’Alexis Albrecht
Le chef est reconnu pour son engagement dans la cuisine éco-responsable et locavore, récompensé d’une étoile verte au Guide Michelin en 2021. Relire.
Ce cook show était indubitablement placé sous le signe des couleurs, s’exprimant dans l’assiette, le discours fleuri du chef qui a composé autour des légumes de son jardin. « Je me suis levé à la “fresh” ce matin, spécialement pour vous » affirme le chef, fier de montrer son plan de travail comme un tableau coloré. « Je suis impatient de voir ce que va proposer Romain, car ma recette n’est pas si évidente à accorder au niveau des vins » poursuit-il.
« Alexis est un vrai passionné de nature et de son environnement, c’est un fin connaisseur des aromates et de ce que peut offrir le monde végétal, surtout pour composer des recettes pleines de gourmandise » explique Nicolas Rieffel.
Au menu de cette danse des légumes, le chef explique que son plat évolue quotidiennement, en fonction de sa récolte du jour.
« Pour le risotto, mon riz préféré est le Carnaroli qui a un grain plus épais, ce qui permet de faire prolonger le côté al dente que l’on aime dans le risotto. Je l’ai accompagné de cucurbitacées du jardin telles que les courgettes bicolores avec leur goût noisette et des pâtissons, des haricots, des carottes et du chou-fleur cru et cuit. »
Enfin, le dressage se veut zéro-déchet, car le chef a réutilisé le pâtisson qu’il a creusé pour y placer tous les éléments de sa recette.
À déguster avec Romain Iltis
Le Meilleur Ouvrier de France a longuement parlé de son métier et de l’art de la dégustation, toujours avec une grande éloquence. Son métier, sa passion, il les décrit comme tel « nous ne sommes que les traits d’union entre les deux. Si l’accord mets et vins est un succès, c’est que nous avons réussi à faire honneur au travail du chef et du vigneron, c’est cela l’essence de notre profession ».
Dès les premières effluves et à la vue des éléments de la recette, Romain Iltis a débuté ses explications « aujourd’hui, j’ai choisi deux vins qui sont issus d’un terroir calcaire et pour souligner l’engagement du chef, il s’agit de deux terroirs situés à seulement 5 km de Colmar du côté d’Eguisheim. »
Le sommelier mentionne directement la difficulté de faire des accords sur des plats qui misent sur le végétal « dans cet univers c’est l’assaisonnement qui fait tout, puisque c’est cela qui met en valeur le légume. Aujourd’hui dans la vinaigrette du chef il y a des marqueurs qu’il fallait prendre en considération, comme de la ciboulette plate qui a un petit goût aillé, de l’huile de noix et de l’acidité apportée par le vinaigre de xérès ».
Pour débuter, le sommelier a présenté un Pinot Gris Letzenberg 2019 de chez Jean-Baptiste Adam. Le terroir de ce vin est situé plein nord, ce qui permet de garder la fraîcheur et l’acidité du cépage sans altérer son corps et sa gourmandise. Ici, le vin est sec, aromatique et dense ce qui permet de valoriser le côté salin du parmesan ajouté à la fin dans le risotto.
Romain a ensuite sorti son cépage joker… Le sylvaner ! Ce cépage offre un jeu d’amertume très intéressant pour sublimer les légumes dans un plat « techniquement végétal » souligne-t-il. Nicolas Rieffel en a profité pour rebondir, « je viens du village où le sylvaner est roi, à Mittelbergheim donc j’adore ce type de vin, je suis content de goûter cet accord. »
C’est donc un sylvaner “Cuvée E” de Kuentz-Bas qui est situé sur le Eichberg un grand cru d’Eguisheim, “les raisins grandissent sur des vieilles vignes avec un sol argileux et riche qui apporte de la complexité au vin”. C’est notamment grâce à l’âge des vignes qui permet de mieux maitriser les rendements et donc de gagner en concentration dans les raisins. Le vin est gouleyant et plein de gourmandise, l’attaque est dense et assez sec, avec des notes de pain frais, une sensation florale. Le vin prend de l’ampleur au fur et à mesure au palais, avec une touche salée la finale qui rappelle le terroir et permet de mettre en valeurs ses légumes primeurs.
Par Margot Reinartz