Julien est illuminé pour les fêtes de fin d'année. Noel 2010.

Les portraits de Fouday, Yoichi Kishida

Gérard Goetz encourage et met à l’honneur deux membres de sa brigade de Hotel-restaurant “Julien” à Fouday. “Deux jeunes formidables, des bosseurs courageux qui méritent qu’on parle d’eux. Deux garçons qu’on voudrait garder près de nous longtemps et qui ont des histoires pas banales à raconter” précise en quelques mots le patron de l’établissement.

Vartan Arménian, que nous avons découvert la semaine dernière et Yoichi Kishida sont très appréciés pour la qualité de leur travail et leur personnalité, apportant à l’établissement une véritable valeur ajoutée.

Le Japonais Yoichi Kishida, surnommé Yo, est cuisinier chez Julien depuis un peu plus d’un an. Il est arrivé, lui aussi par le train à Fouday

Comme Vartan Arménian, il a poussé les portes de l’établissement inopinément, avec son sac à dos chargé de courage, vaillant et résolu. C’est Hélène qui l’avait accueilli à la réception et elle s’en souvient très bien. “C’était un mercredi vers 10h40. Nous ne l’attendions pas vraiment et une heure après, il était devant la plancha pour faire un essai. Encore une histoire incroyable ! ” s’exclame-t-elle.

Julien est illuminé pour les fêtes de fin d’année. Noel 2010.
Né il y a 27 ans à Yokashima, une ville située près de la tristement célèbre Hiroshima, il a débuté sa formation à Osaka, dans la prestigieuse école Tsuji (du nom de son fondateur Shizuo Tsuji, passionné de gastronomie). Il y découvre toutes les cuisines du monde, mais ressent très vite une préférence indéfectible pour la cuisine française.

Durant le cursus, les élèves sont envoyés en France à l’école Tsuji près Lyon, réservée aux étudiants japonais. Il va effectué un stage de 4 mois à Saint-Émilion, puis rentrera à Osaka au Japon, pour intégrer un restaurant qui propose une carte française. “Au Japon, je travaillais 6 jours par semaine de 8h à 1h du matin, avec seulement 2 X 30min de pause par jour pour déjeuner et 1 semaine de congés par an”.

Yo c’est la force tranquille en cuisine.
Yoichi revient en France en septembre 2009 pour se perfectionner et apprendre une cuisine française régionale. Son choix s’est porté sur l’Alsace, riche d’une identité gastronomique affirmée.

Pour accélérer sa formation, il voulait plus que tout s’immerger complètement. C’est la raison pour laquelle il se détourne de Paris et des grandes brigades étoilées où selon lui, il y a toujours 1 ou 2 Japonais. Ce qui amuse Hélène “c’est sûr qu’à Fouday, il ne pouvait pas être plus “immergé”. Et comme il ne parlait pas non plus anglais, il a été contraint d’apprendre très vite notre langue”.

Aujourd’hui, il est devenu une pièce maîtresse de l’établissement.
Yoichi, muni de son courage dans ses bagages, débarque en Alsace. Il ne connaissait personne et recherchait un emploi.
Attablé au restaurant le ” Cornichon Masqué” à Strasbourg, il discute “tant bien que mal” avec le sommelier Vincent (un ami d’Hélène) de son projet, lui précisant qu’il voulait travailler dans un établissement qui tournait fort avec ” beaucoup de travail”. Il s’entendit répondre : “j’ai l’adresse qu’il te faut ! “.
Et le voilà débarquant un matin à la réception de Julien, plus motivé que jamais, sans avoir vraiment rendez-vous.

“Une heure après, il était devant la planche à snacker, comme s’il avait toujours été là”, se souvient Hélène.
“Je ne faisais que cuire la viande au début, donc je n’avais pas besoin de beaucoup communiquer ou de connaître la carte, mais les morceaux de viande sont plus épais qu’au Japon, alors je devais tout de même faire très attention à la cuisson”, explique Yoichi, qui ne fut pas déçu tant par la qualité de la cuisine régionale que par la quantité de travail à fournir dans les cuisines de Gérard Goetz.


Yo avec Marc le compagnon d’Hélène
D’abord pris à l’essai et parlant encore mal français, tous les soirs, il demandait très poliment “est-ce que je peux revenir demain?”.
“Aujourd’hui, il est devenu une pièce maîtresse de l’établissement”, nous confie Hélène, pleine d’admiration.

“Yo est quelqu’un de très respectueux, très calme, avec néanmoins un humour fin et bien perçant. Il apporte beaucoup de sérénité à cette cuisine parfois survoltée. Quoiqu’il se passe, il reste constant, on ne l’entend pas, mais on sait qu’on peut toujours compter sur lui. Yo, c’est la force tranquille.”

Vartan, Hélène, Gérard, Eléonore et Yo dans la salle de restaurant Julien à Fouday
“Il a une force de travail incroyable”, souligne-t-elle aussi. “L’année dernière, nous étions fermés pendant 3 semaines. Alors, il est allé travaillé dans la cuisine du Clou à Strasbourg”. De plus, Yoichi se rend régulièrement chez Michel Stringer, le boucher avec qui travaille Gérard Goetz, pour apprendre à confectionner des saucisses.
“Il a une soif d’apprendre inépuisable. Les livres fondamentaux comme Escoffier, il les connaît tous, et il les lit maintenant en français. Il a une culture culinaire de notre pays que la plupart des cuisiniers français n’ont pas. C’est une encyclopédie vivante”. Hélène est visiblement impressionnée.


Yo, Hélène et Marc ; un trio complice
Passé le premier choc culturel, notamment la soirée “cochonnailles” qui l’a beaucoup impressionné et après avoir franchi la barrière de la langue, Yoichi, surnommé “Yo” par la Brigade, s’est très vite adapté et a su se faire apprécier. Ils ont enfin pu faire vraiment connaissance, partager leur préférence et leur différence. “Comme nous, il apprécie particulièrement les winstubs”, confie Hélène.
Avec Marc son compagnon et chef pâtissier chez Julien, ils se retrouvent toujours avec Yo, les week-end. “À Noël, nous étions ensemble autour d’un chapon”, raconte Hélène. On l’apprécie beaucoup et avec Marc, on n’image pas un jour de congés, sans passer du temps avec Yo. Dès qu’on sort au restaurant, on lui propose. “C’est mon fils adoptif” plaisantait ma soeur Eléonore, au vu du temps que nus passions ensemble. Mais derrière la boutade taquine se dissimule une affection profonde et sincère, un respect pour ce cuisinier japonais et toutes les valeurs qu’il incarne.
Vartan Vartan Arménian et Yoichi Kishida
Yo a pris de ‘importance chez Julien à Fouday, à tel point qu’ils craignent déjà de le voir partir. Un problème de visa à reconduire en septembre dernier, mais heureusement tout s’est arrangé. Son amie devrait bientôt venir du Japon pour suivre ses études dans une université strasbourgeoise.

Yo est très reconnaissant de cette gentillesse et à l’instar de Vartan, souhaite par le biais de ce billet, remercier toute la famille de Gérard Goetz de les avoir accueillis si généreusement et aujourd’hui de les mettre en avant.

Yoichi évoque également, du bout des lèvres, par modestie, son souhait de travailler chez Paul Bocuse et chez Michel Guérard avant de repartir vers ses terres natales pour ouvrir, pourquoi pas, un restaurant alsacien à Osaka.
Gageons qu’il saura honorer sa région d’adoption.

Hotel-Restaurant Julien
67 130 Fouday
03 88 97 30 09
www.hoteljulien.com