les nouveaux propriétaires l'Hostellerie Alsace -Masevaux ©Sandrine Kauffer

La renaissance de l’Hostellerie Alsacienne : des Jung aux Zeller

En juillet 2023, la place Émile Jung a été inaugurée à Masevaux dans le sud de l’Alsace. La cité choisie ne le fut pas au hasard, car c’est juste devant l’Hostellerie Alsacienne, réputée pour avoir vu éclore le talent de Monique et Émile Jung, qui y ont décroché leur première étoile Michelin en 1966, faisant rayonner la ville plus de 50 ans après.

La renaissance de l’Hostellerie Alsacienne  s’est faite grâce à Béatrice et Thiebaut Zeller, qui ont pris le relais succédant à trois propriétaires différents, depuis Monique et Émile Jung. Renaissance car l’établissement était fermé, sans activité, depuis 7 années.

Béatrice et Thiebaut Zeller ne sont pourtant pas restaurateurs de métier.

les boiserie des la salle de l’Hostellerie Alsacienne àMasevaux ©Sandrine Kauffer

Lui, à la tête d’une entreprise de travaux public, elle, à la tête de gites et passionnée par le patrimoine alsacien. C’est avec émotion que les anciens clients pénètrent dans cette petite salle d’un vert pastel, remise au goût du jour par Béatrice. Cette même salle de restaurant dans laquelle, Monique Jung évoluait de table en table avec élégance et bienveillance. Rafraichie dans sa décoration, elle est réservée aux réceptions privées. Quelle joie de s’imprégner de son passé, s’approchant de la photo-tableau, pour bien se représenter le lieu d’antan et son évolution. Les boiseries ont été éclaircies, une tapisserie « vintage » confère un charme fou et bucolique à cette pièce historique.

Video la salle du restaurant du temps Monique Jung

Une toute nouvelle équipe a pris place à la ré-ouverture. Aucun d’entre eux, n’a bien sur connu la belle époque des Jung ; d’abord les parents d’Émile Jung, Hélène et Pierre Jung, puis celle avec Monique et Emile. Mais tous ont découvert l’aura de ces personnalités de la gastronomie française.

Le chef Loïc Pichereau propose une cuisine bourgeoise de winstub, de belle facture. Une trilogie autour du saumon, un carpaccio de bœuf, un foie gras mi-cuit ou encore une belle tarte flambée (servie midi et soir) pour commencer. Pour suivre, les fleischnackas, le dos de cabillaud, le demi magret de canard du sud-ouest au sirop d’Espelette ou l’émincé de bœuf façon Strogonoff sauront ravir les gourmets. Tout en douceur, faire appel à la dame blanche, choisir le kouglof ou le nougat glacé à moins de suivre le conseil du chef et d’opter pour la bouchée à la crème diplomate et sa cascade de fruits rouges.

C’est dans l’ancien bar de l’hôtel restaurant que s’est installé le restaurant actuel, de 30 couverts. Les boiseries alsaciennes ont été conservées, sublimant le style winstub dans la salle ouverte sur la terrasse de la place Émile Jung. Béatrice fut ravie de pouvoir exposer ses collections de poteries alsaciennes.

Réveiller la belle endormie était une finalité pour les époux Zeller, qui n’en reviennent toujours pas d’avoir eu la chance de l’acquérir, et de son devenir. « C’est une belle aventure humaine », reconnait Béatrice Zeller, qui ne pensait pas être autant en salle. « C’est avec beaucoup d’émotion que nous avons reçue Monique Jung et assisté à l’inauguration de la place Émile Jung », confie-t-elle.

Pour ouvrir, ils ont entrepris des travaux de mises aux normes importants, installant aux étages 9 chambres d’hôtes/ gites. C’est leur domaine d’expertise, puisqu’ils possèdent déjà des gites à Mortzwiller.

video : un déjeuner à l’Hostellerie Alsacienne

 

Émile est né le 2 avril 1941 à Masevaux.

Pierre et Hélène, ses parents, exploitent “l’Hostellerie Alsacienne”. Avec Annette sa sœur ainée, et Monique sa sœur jumelle, Émile a été scolarisé à Masevaux, à l’école primaire, puis au collège. Après l’obtention de son certificat d’études, Émile quitte Masevaux pour l’école hôtelière, rue de Lucerne à Strasbourg et devient apprenti à la Maison Rouge, place Kléber à Strasbourg (actuelle FNAC). Puis il partira faire un stage au restaurant “La Mère Guy” à Lyon, sous la direction de Roger Roucou, deux étoiles Michelin. A Lyon, il aura la chance de rencontrer Paul Bocuse, qui l’invite régulièrement à sa table familiale, mais aussi la Mère Brazier, Vignard, Vétard et Nandron. Puis, Émile Jung se rend à Paris “Au Fouquet’s”,  chez “Ledoyen” avec le chef Guy Legay, puis à “La Marée” de Marcel Trompier et enfin chez “Maxim’s” avec le chef Michel Menant.

L’Hostellerie Alsacienne à Masevaux
archives -L’Hostellerie Alsacienne à Masevaux

La rencontre avec Monique Andres, future Madame Jung

Pendant ce temps, à l’Hostellerie Alsacienne, sa maman Hélène recrute Monique Andres, originaire de Sainte-Marie-aux-Mines (future madame Émile Jung). Elle est engagée pour seconder la maman d’Émile à l’administration, à l’accueil et au service de l’Auberge. Dès son retour de Paris, Émile Jung découvre la nouvelle employée. Il la courtise, de son propre aveu “sans précipitation”, mais “avec conviction”. Ils scelleront leur vie à la mairie et professionnellement. Ils reprendront ensemble “l’Hostellerie Alsacienne” la faisant évoluer avec intelligence, décrochant en 1966, leur première étoile Michelin. En 1971, le jeune couple s’engage dans le nouveau défi du Crocodile à Strasbourg, pour atteindre l’objectif de la 2ème puis la 3ème étoile.

A Masevaux, l’hostellerie Alsacienne, quant à elle, traverse le temps et les traditions culinaires. Une belle étoile, éternelle, veille sur elle, permettant sa renaissance 7 années après la fermeture administrative.

Tel un phœnix, qui renait de ses cendres, elle se révèle plus accueillante, s’ouvrant fièrement sur la nouvelle place Émile Jung, un hommage rendu à jamais par la ville et ses habitants. Une commémoration pour le grand chef qui fit la renommée de la cité dans le monde entier et de sa belle dame, dont l’élégance est aussi légendaire que celle de son époux derrière les fourneaux.

Par Sandrine Kauffer-Binz

crédit photos et videos ©Sandrine Kauffer

 

La bouchée (à la reine) crème diplomate et fruits rouges ©Sandrine Kauffer
Sandrine Kauffer et Béatrice Zeller l’Hostellerie Alsace -Masevaux ©Sandrine Kauffer