©Gilles Grucker

Escapade à Düsseldorf des chefs d’Alsace par Daniel Zenner

Du 05 au 07 juillet 2014, la région Alsace a investi la place de la Mairie de Düsseldorf dans le cadre de la Fête Française, qui a lieu chaque année dans cette bonne ville du nord de l’Allemagne. Pour cette édition, l’Alsace était l’invitée d’honneur. Une quinzaine d’exposants vantaient et vendaient les charmes de notre région au public nombreux et intéressé.

Au milieu de la place, juste à côté d’une royale statue représentant un guerrier à cheval, se dressait une tente de 120 m² qui accueillait le buffet inaugural du vendredi puis les démonstrations de cuisine des deux jours suivants. La Fédération des Chefs d’Alsace a été chargée de cette mission gourmande. Joseph Leiser, président (Le Zahnacker à Ribeauvillé) est venu avec Sylvie et Gilles Grucker (Le Pressoir de Bacchus à Blienschwiller), Didier Roeckel (La Couronne à Scherwiller), François Golla (Le Bœuf Rouge à Niederschaeffolsheim), Pascal Funaro et un de ses cuisiniers Francis (La Pommeraie à Sélestat). Salle comble à chaque démonstration suivi d’une dégustation appréciée.
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Le buffet inaugural destiné aux notables de la ville et aux journalistes était initialement prévu le vendredi à 19h30, mais par une curieuse circonstance due probablement au hasard, la France jouait ce soir là contre l’Allemagne (dans le cadre de la coupe du monde de football). Je précise cela pour informer les lecteurs qui comme moi ne s’adonne pas à cette grande liesse populaire et sportive.

Nous avons installé deux grands écrans et distribué aux visiteurs bières Perle et tartes flambées à volonté! D’emblée, j’étais pour les Allemands. Pourvu qu’ils gagnent, qu’ils soient contents, qu’ils viennent sur notre village d’irréductibles gaulois installé au cœur de la ville en amis plutôt qu’en vaincus… Ouf! 1 à 0, tout va bien…

©Gilles Grucker
La place de la Mairie est au cœur de la vieille ville. Vers 9 heures du matin, les rues attenantes sont désertes. Le service de nettoyage est à l’œuvre pour donner à la ville son allure propre et ordonnée. Des véhicules de livraison passent et repassent. Surtout des camions de boissons et de denrées alimentaires car la vieille ville se transforme à partir de midi en une gigantesque brasserie. Les devantures de milliers de restaurants s’ouvrent, les stores et les énormes parasols se déplient, les guirlandes lumineuses sont installées comme des milliers de tables et de bancs en bois. Les rues ne sont plus qu’une immense artère bruyante, colorée, animée dans lesquelles coulent la joie de vivre des insouciants et des insomniaques. Je relève pas moins d’une dizaine de micro-brasseries, dont les salles se prolongent loin dans les bâtiments. Des serveurs passent devant les tables, déposent un verre de bière ambrée, fruitée, bien houblonnée en marquant un trait de stylo sur le sous-bock. Dès que le verre est vide, il est aussitôt remplacé. Pour arrêter de boire, il fait mettre le sous-bock sur le verre…
Le plus grand comptoir du monde appartient à la brasserie Uerige. Il occupe les deux côtés de la rue piétonne.
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Les gens sont attablés aux terrasses des milliers de restaurants, mangent à toute heure une nourriture industrielle dont les meilleurs enseignes ont ici pignon sur rue. Pour les amateurs d’exotisme, les thaïlandais, les chinois, les turcs, les espagnols, les marocains, les italiens et tous les autres proposent les mêmes plats issus du génie des préparateurs en denrées industrielles. Je regardes ce que les gens mangent. Les assiettes dégoulinent de couleurs et de gras. J’ai faim mais n’ose pas m’arrêter. Je rêve alors d’un vrai sandwich jambon beurre mais n’arrive pas à trouver une boulangerie digne de ce nom. Je me renseigne pour connaître l’adresse d’un marché. Comme dans toute l’Allemagne, il y a des marchés permanents et couverts, comme à Paris. Les produits y sont vraiment de qualité. Deux marchands d’herbes aromatiques proposent plusieurs centaines d’espèces. Je me régale et remplis le coffre de ma voiture… J’ai même trouvé la brède maffa ainsi qu’une autre astéracée dont j’ignorais tout.
©Gilles Grucker
Le majestueux Rhin traverse Düsseldorf. Sur ses imposantes rives bétonnées, des centaines de restaurants proposent les mêmes choses que dans la vielle ville. Sous d’énormes auvents, on traverse ces lieux dont certains peuvent accueillir plus de 600 couverts. Des écrans géants sont installés, la musique bat son plein, la bière coule à flot. Un peu plus haut, sur la promenade romantique au bord du fleuve, la fête française est installé. Des centaines de baraques, de chapiteaux proposent des spécialités bien de chez nous, comme ce stand “alsacien” qui vend du vin d’Alsace en cépage chardonnay, un autre de la paëlla… La palme d’or revient à une camionnette ne proposant que des merguez. C’était marqué en gros ‘Französe spétzialität”…
Un cantal ou un beaufort est vendu à 4.90€…les cent grammes! Les stands de tartes flambées sont nombreux et certains en proposent des garnies à la tomate et mozzarella, ce qui revient à manger une pizza…française! Bref, l’image donnée par cette fête française de Düsseldorf n’est pas très reluisante pour notre pays.
©Gilles Grucker
Après les restaurants du bord du Rhin puis ceux installé sur les terrasses, j’arrive sur une énorme place flanquée d’une imposante tour. Là encore des cabanes à saucisses, des brasseries, des marchands de bouffes. C’est vraiment incroyable!

Dimanche matin. Trois fanfares déboulent sur le village. Elles vont jouer jusqu’à treize heures. Musique folklorique-militaire au programme. Et devinez quoi? Un camion brasserie ambulant s’installe sur la place. Dix serveurs sortent de nulle part. Les tables sont pris d’assaut : le ballet des plateaux ronds pleins de chopes de bière peut alors commencer. Quand je pense que la semaine dernière, pour l’inauguration de La Ferme en Ville sur la pace Kléber à Strasbourg, on nous a interdit de servir un verre de crémant aux invités car “la manifestation est ouverte au public”! Quelle bêtise bien française doublée d’une hypocrisie remarquable car tout le monde peut acheter de l’alcool dans la première épicerie venue et aller se biturer sur la place sous la statue de Kléber, ce qui est d’ailleurs un fait coutumier.

Düsseldorf, dont le cœur de la ville est bien vivant, j’y reviendrais, ça c’est sûr!

Par Daniel Zenner