Rencontre avec Glenn Viel chef 3 étoiles Michelin et 4 Toques au Gault&Millau à l’Oustau de Baumanière dans les Baux-de-Provence. Visite de la nouvelle cuisine, la nouvelle chocolaterie, la nouvelle boulangerie et la place des artisans avec une boutique qui s’est installée à l’entrée du restaurant. Le nouveau jury de Top chef, revient sur son arrivée en 2015, sa relation avec Jean-André Charial, le chef propriétaire, mais aussi ses “cailloux d’assaisonnement” qui ont été brevetés, l’inertie en cuisine, ses valeurs, la psychologie et la place des arts dans le service.
Niché au pied des falaises des Baux-de-Provence, aux portes de la carrière des Lumière et du château des baux, se trouve le domaine de Baumanière, un endroit singulier composé de 5 lieux de vie avec 53 chambres et suites, un Spa, 3 piscines et deux restaurants : l’Oustau de Baumanière et la Cabro d’or.
L’aventure de Glenn Viel à Baumanière débute en 2015 quand Jean-André Charial, lui demande de reprendre les rênes de la cuisine de ce restaurant mythique.
Dès son arrivée, le chef, déborde d’idées et d’imagination, mettant en place une cuisine éco-responsable avec le développement d’un potager bio, de ruches et d’une ferme pédagogique avec des chèvres et des cochons. Une créativité rapidement récompensée puisqu’il est auréolé d’une troisième étoile Michelin en 2020 en même temps que les 75 ans du domaine. La même année, Glenn Viel est élu par ses pairs chef de l’année par le magazine le Chef, un millésime de consécration ! À ses côtés, Brandon Dehan, chef pâtissier et Laurent Soustelle Directeur de salle.
Glenn Viel, un chef cuisinier-artisan
Le chef aime mettre en exergue le produit dans sa version la plus authentique. Après avoir fait installer des séchoirs à tomates sur les terrasses du restaurant, il crée avec le boulanger des accords mets-pains en proposant des pains différents avec chaque plat. Il a également mis au point un système inédit d’assaisonnement par la concentration d’ingrédients (céleri, champignons, langoustines,…) qu’il appelle ses « cailloux d’assaisonnement ».
VIDÉO
Breton d’origine, il fabrique son beurre à partir du lait produit à la ferme la plus proche et agrandit le potager. Ainsi, les arts de la table de l’Oustau de Baumanière sont également le fruit d’une réflexion entre le chef et les artisans : la vaisselle créée par la céramiste Cécile Cayrol, les créations en verre soufflé d’Alban Gaillard et les paniers en osier de Daniel Benibghi.
Menu photographié août 2022
Feuille de brique à l’encre de seiche / mascarpone ; Tartelette, salicorne, zestes d’orange confite ; huitre avec concombre mariné et caviar de la maison Schrencki.
La fourmi qui porte la feuille du roungia (d’Amérique du sud) (goût champignon); tartelette anguille fumée / cacahuète et champignon ; sablé 100% champignon avec de la farine de champignon ; lamelle de champignon crue, pâte de champignon et cacao.
Escargots petit gris de St Rémy de Provence accompagné d’ail, jus de champignon, émulsion chips d’ails pain au lait brioché.
Le thon rouge de Méditerranée est cuit en tataki, servi avec câpres frits/ gel de citron et à l’intérieur une crème d’aubergine brulée.
La pulpe de tomate est décantée avec un crémeux de parmesan « huile d’olive fruité noir de la vallée des Baux
Les couteaux les pieds dans l’eau avec son jus façon pesto, tombée de basilic, dans de plat on retrouve tous les marqueurs d’une pêche aux couteaux, qui dépasse légèrement de leur coquille, le petit jus qui rappelle l’eau trouble autour des couteaux, la tombée de basilic qui rappelle les algues, le croustillant de la chips de tapioca/algues et crémeux de pignons de pins qui rappelle les grains de sables, servi avec une pince pour chercher les couteaux.
Le calamar est accompagné de lard de Colonnata, travaillé comme une raviole à l’intérieur anchois fumée, basilic et algues, émulsion de crustacé.
La betterave est fleurie à l’intérieure et flétrie à l’extérieur avec une purée et chips de betterave touche d’estragon et vinaigrette aux agrumes.
Ici, la courgette se pare de caviar Schrenki qui amène le coté iodé, on verse un jus de courge grillé servi glacé pour apporter la fraicheur et se complète avec un blini.
Cuillère de graines de badiane qui apporte le coté anisé du Ricard bu sur le port, dans le bol un effiloché de fenouil et la soupe de poisson de roche traditionnelle. Dans l’assiette, carabineros, St-pierre et rouget servi avec une réduction du jus de soupe de poisson, gâteau de pomme de terre et rouille. Enfin, le croustillant est amené par la chips de carabineros et vinaigrette aux agrumes.
Le bœuf est enrobé d’une côte de laitue légèrement grillée, tomates confites, graines de moutarde, jus de bœuf travaillé avec du pain.
L’agneau de lait comme un air de prés-salés: jus mariné parfumé aux algues, épinards les uns contre les autres en feuille à feuille, la panoufle fondante, focaccia en guise de pain.
Une ballade en 8 étapes et un menu légumes “1987”
À la table du chef Glenn Viel, deux menus se côtoient, l’un fait la part belle aux beaux produits et l’autre fait honneur au végétal, crée par Jean-André Charial il y a plus de 30 ans. 1987, ayant le mérite de dater ce menu légumes.
Le chef patissier Brandon Dehan
L’instant sucré se dévoile également à travers une carte créée par Brandon Dehan, élu chef pâtissier de l’année en 2019 par le guide Gault&Millau ! Le Millefeuille, crème légère à la vanille de Madagascar, florentine pistache et glace vanille côtoie la crêpe soufflée au Grand Marnier ou la myrtille poêlée au basilic, émulsion yaourt et fraîcheur citron et la framboise fraîche et déshydratée, noix de coco et aneth.
La balade continue avec le prédessert imaginé par Brandon Dehan, 3 fleurs sont à butiner du bout des doigts avec un miel de fleur/basilic et yaourt, puis un miel de lavande et sureau, un miel de châtaignier et églantine, trempant enfin une paille dans la cire pour boire un jus de pomme et géranium.
Composé d’une tartelette de rhubarbe/ concombre/ pickels et à l’intérieur une limonade glacée de concombre/ menthe et rhubarbe.
Les myrtilles sont poêlées au basilic, en compotée, en sorbet, déposé sur une meringue craquante. À l’intérieur yaourt, madeleine et réduction de myrtilles est déposée par dessus.
Les framboises fraiches et déshydratées, gel de framboise à l’aneth, le tout déposé sur une gavotte craquante, et crème glacée à la noix de coco / poudre de noix de coco et jus de framboises
Cuillère un yaourt de chèvre/ miel et huile d’olive, dans l’œuf, le lait de poule revisité avec crémeux de mais, le jaune d’œuf à la muscade, et la tuile à la bière et au centre tartelette au lait de vache et fleur de sel.
Ensuite, le rocher chocolat / amande et pistache est taillé comme un vrai rocher en clin d’œil aux carrières.. des lumières juste à coté.
L’histoire de Baumanière
C’est en 1943 que Raymond Thuilier se porte acquéreur d’un mas provençal, enraciné dans la terre sauvage, au pied de la Cité des Baux. Le lieu est isolé, désertique, l’accès par la route des Alpilles peu praticable. Cette même année nait Jean-André Charial, l’aîné des 3 petits fils de Raymond Thuilier. 2 ans plus tard les premières chambres sont ouvertes, l’Oustau de Baumanière est inauguré par Georges Pompidou (en 1946) et deviendra un hôtel de luxe avec piscine, cercle hippique, puis à partir de 1973 fera partie de l’association des Relais et Châteaux.
En 1954, la cuisine de Raymond Thuilier, lui vaut trois étoiles au guide Michelin. L’Oustau devient l’étape privilégiée où se croisent des personnalités issues des milieux les plus divers. Hommes de lettres ou peintres de génie, Princes de ce monde ou têtes couronnées, gastronomes ou touristes, tous font route vers l’Oustau de Baumanière. En 1961, Raymond Thuilier ouvre un second restaurant « plus simple » à 900 mètres de l’Oustau de Baumanière, La Cabro d’Or qui fait aujourd’hui partie de Baumanière. En 1969, Jean-André Charial, âgé de 24 ans, décide, après ses études HEC, de rejoindre son grand-père en Provence. Puis, il forge son expérience dans la diversité des écoles et entame un tour de France des grands chefs : Chapel, les frères Troisgros, Haeberlin, Bocuse, Girardet… Une première étoile au guide Michelin est attribuée à la Cabro d’Or. Vingt-quatre ans durant, Raymond Thuilier et Jean-André Charial vont travailler main dans la main et faire évoluer la carte de l’Oustau de Baumanière.
En 1972, la Reine Elizabeth d’Angleterre séjourne en Provence à l’Oustau de Baumanière lors de son voyage officiel. Puis quelques années plus tard, les visites officielles se succèdent avec la venue de Teng Hsiao-Ping en 1974 puis le Shah d’Iran et Saddam Hussein en 1975. 1984 : L’Oustau de Baumanière entre dans l’histoire de la gastronomie. 30 ans au firmament, 30 ans de 3 Etoiles pour l’institution du Val d’Enfer. Une première.