Tout savoir sur le lait !

Comme le beurre, la crème, le lait, les divers produits laitiers sont rigoureusement réglementés, et c’est tant mieux, sans quoi le citoyen ne serait pas protégé, et on pourrait lui vendre du cheval à la place du bœuf, par exemple. Il y a quelque temps, dans un de ces billets terminologiques, j’avais ainsi considéré les diverses dénominations officielles du beurre, mais je n’avais pas discuté la question du lait, que je m’étais réservée pour plus tard.

Là, il est d’autant plus temps que je reçois des questions à ce sujet par email.

Par Hervé This

Commençons par dire que, pour désigner justement des produits qui sont commercialisés aujourd’hui, comme le lait, l’histoire de la cuisine doit être oubliée, et il n’y a qu’une seule référence légitime : les textes réglementaires du ministère de l’économie (economie.gouv.fr).

Ainsi, fort heureusement, ces textes disent que « la dénomination « lait » est réservée exclusivement au produit de la sécrétion mammaire normale, obtenu par une ou plusieurs traites, sans aucune addition ni soustraction.

Toutefois, la dénomination « lait » peut être utilisée :
a) pour le lait ayant subi un traitement n’entraînant aucune modification de sa composition ou pour le lait dont on a standardisé la teneur en matière grasse ;
b) conjointement avec un ou plusieurs termes pour désigner le type, la classe qualitative, l’origine et/ou l’utilisation envisagée du lait, ou pour décrire le traitement physique auquel il a été soumis ou les modifications qu’il a subies dans sa composition, à condition que ces modifications soient limitées à l’addition et/ou à la soustraction de ses constituants naturels. »

Cela paraît bien, non ?

Pour les « produits laitiers », ce sont les produits dérivés exclusivement du lait, étant entendu que des substances nécessaires pour leur fabrication peuvent être ajoutées, pourvu que ces substances ne soient pas utilisées en vue de remplacer, en tout ou partie, l’un quelconque des constituants du lait. Sont réservées uniquement aux produits laitiers les dénominations suivantes : lactosérum, crème, beurre, babeurre, butteroil, caséines, matière grasse laitière anhydre (MGLA), fromage, yaourt (ou yoghourt), kéfir, kumis, viili/fil, smetana et fil.

Très bien, aussi, mais qu’est-ce que le babeurre ? Ou le lactosérum ? Le petit-lait ?

Le babeurre, ou « lait de beurre », est ce liquide que laisse le lait qui a été transformé en beurre. Le lactosérum, lui, est synonyme de « petit-lait » : il s’agit du liquide qui s’écoule des fromages que l’on fait cailler.


Ce serait hors sujet d’expliquer ici que le butteroil, le « beurre anhydre » et, dans une moindre mesure, les « matières grasses lactiques anhydres » sont synonymes, car nous nous intéressons cette fois-ci au lait. En revanche, il faut observer que la dénomination « lait » et les dénominations utilisées pour désigner les produits laitiers peuvent également être employées conjointement avec un ou plusieurs termes pour désigner des produits composés dont aucun élément ne remplace ou est destiné à remplacer un constituant quelconque du lait et dont le lait ou un produit laitier est une partie essentielle, soit par sa quantité, soit par son effet caractérisant le produit.

L’espèce animale dont proviennent le lait et les produits laitiers ne doit être spécifiée que s’ils ne proviennent pas de l’espèce bovine. Et, en ces temps de végétarianisme ou de véganisme, il est bon de rappeler que la réglementation relative à la protection des dénominations laitières a pour but d’interdire l’emploi des dénominations laitières pour les denrées intégrant des produits de substitution de la matière première laitière.

Toutefois, ne sont pas considérés comme produits de substitution :

  • les additifs autorisés par la réglementation générale qui leur est applicable (par exemple les amidons modifiés ou la cellulose, qui ont le stat ut d’additifs, sont autorisés dans certains produits laitiers) ;
  • les ingrédients à vocation technologique tels que l’ amidon (autre type d’amidon qui n’a pas le statut d’additif) ou la gélatine, mais seulement sous certaines conditions : emploi autorisé par la réglementation de définition du produit laitier en question (par exemple, l’emploi d’amidon et gélatine est autorisé dans les « spécialités fromagères », mais pas dans les « fromages ») et en quantité strictement limitée à la dose nécessaire pour obtenir l’effet technique recherché. Par exemple, tout produit alimentaire dérivé ou non du lait dans lequel la matière grasse laitière ou les protéines laitières ont été remplacées, totalement ou partiellement par des matières grasses végétales ou des protéines végétales ne peut porter le nom d’un produit laitier. Il faut insister : il est interdit d’appeler le jus de soja « lait de soja », par exemple ; et un produit qui incorpore de la matière grasse végétale ne peut porter le nom de « fromage ».

Bien sûr, nous savons qu’il y a différentes « sortes de laits » qui sont vendues : entier, demi écrémé, écrémé, etc.
Ces différents liquides, des « laits de consommation », sont définis en fonction de la proportion de matière grasse qu’ils contiennent.
Par exemple, le lait entier est un lait traité thermiquement qui, en ce qui concerne sa teneur en matière grasse répond à l’une des formules suivantes :

  • pour le lait entier normalisé : un lait dont la teneur en matière grasse s’élève à 3,50 % en masse au minimum ;
  • pour le lait entier non normalisé : un lait dont la teneur en matière grasse n’a pas été modifiée depuis le stade de la traite, ni par adjonction ou prélèvement de matières grasses du lait, ni par mélange avec du lait dont la teneur naturelle en matière grasse a été modifiée (toutefois, la teneur en matière grasse ne peut être inférieure à 3,50 % en masse).
  • Le lait demi-écrémé est un lait traité thermiquement dont la teneur en matière grasse a été ramenée à un taux qui s’élève à 1,50 % au minimum et à 1,80 % (m/m) au maximum.
  • Le lait écrémé est un lait traité thermiquement dont la teneur en matière grasse ne peut excéder 0,50 %

On peut aussi définir des laits de consommation en fonction du traitement thermique appliqué.
Ainsi, le lait cru destiné à la consommation humaine directe (non transformé). C’est le lait produit par la sécrétion de la glande mammaire d’animaux d’élevage et non chauffé à plus de 40 ºC, ni soumis à un traitement d’effet équivalent. Ce lait n’a donc subi aucun traitement autre que la réfrigération mécanique immédiate après la traite à la ferme. Pour être vendu, il doit répondre à des prescriptions réglementaires sur sa composition et l’état sanitaire des vaches d’où il est tiré. Il doit être conditionné sur le lieu même de production et subir de nombreux contrôles (cf. arrêtés du 3 août 1984 et du 6 août 1985). La mention « lait cru » ou « lait cru frais », est obligatoire sur l’emballage. Sa date limite de consommation est très limitée. Il se conserve réfrigéré.

La dénomination « lait pasteurisé » est réservée au lait :
a) obtenu par un traitement mettant en œuvre une température élevée pendant un court laps de temps (au moins 72°C pendant quinze secondes ou toute combinaison équivalente) ou par un procédé de pasteurisation utilisant des combinaisons différentes de temps et de température pour obtenir un effet équivalent ;
b) immédiatement refroidi après pasteurisation pour être ramené, dans les meilleurs délais, à une température ne dépassant pas 6°C;
c) présentant une réaction négative au test phosphatase du lait se fait habituellement par pasteurisation, c’ est-à-dire chauffage à 72°C pendant 15 secondes. La pasteurisation entraine l’inactivation complète de la phosphatase. Le test phosphatase est ainsi une méthode de
contrôle de la pasteurisation.

La dénomination « lait frais micro filtré » est réservée au lait obtenu par un traitement de microfiltration appliqué à du lait cru, additionné ensuite éventuellement de crème traitée thermiquement ou de crème ayant subi tout traiteme nt d’effet équivalent. Ce lait présente une réaction positive au test de la phosphatase pour être ramené dans les meilleurs délais à une température ne dépassant pas 6°C. Il se conserve réfrigéré.

La dénomination « lait stérilisé » est réservée au lait préalablement conditionné dans un emballage hermétique, puis chauffé pendant 15 à 20 minutes à une température de 115-120°C afin de détruire tous les germes susceptibles de s’y développer. Le lait est ensuite rapidement refroidi. Il se conserve à température ambiante, tant que l’emballage n’a pas été ouvert.

Le lait stérilisé UHT est obtenu par le procédé dit d’ultra haute température, où l’on porte rapidement le lait à la température de 135°C minimum pendant 2 à 4 secondes, puis de le conditionner dans une ambiance stérile. Le lait UHT peut être entier, demi-écrémé ou écrémé. On le trouve dans le commerce sous le nom « lait stérilisé UHT ». Il se conserve à température ambiante, tant que l’emballage n’a pas été ouvert.

Et voilà pour le lait. On imagine bien qu’il y aurait lieu de discuter aussi de la crème, des fromages, mais trop de réglementation risque de nous peser sur l’estomac. Arrêtons-nous à ce stade… en observant que les laits « cuisinés » échappent à ces textes.

Par Hervé This

Hervé This
Hervé This – La cuisine moléculaire