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Strasbourg, gastronomie et tourisme (2/2)

C’est au cœur de la Petite France, le quartier le plus pittoresque du Vieux Strasbourg, que l’on trouve de belles et anciennes maisons à colombage. Elles nous racontent l’histoire des pêcheurs, des meuniers et des tanneurs qui vivaient et travaillaient autrefois dans ce quartier bâti au bord de l’eau. En témoignent les toits pentus et les nombreux greniers, où séchaient autrefois les peaux.
Les promenades sur les pontons étriqués, le pont tournant, les venelles sinueuses, les pavés scabreux devaient faire basculer les cochers. Elles enchantent l’imaginaire des voyageurs. Mais tout ceci appartient au temps passé.
Désormais, les ruelles qui maillent la place Benjamin Zix sont piétonnes. Pour se sustenter, autant prolonger ce sentiment d’avoir remonté le temps, en déposant sa besace à la winstub « le Lohkäs », classée aux monuments historiques de la ville de Strasbourg. La demeure date de 1676, comme l’indique le fronton de la porte.

 

La winstub « le Lohkäs », date de 1676. Elle est classée aux monuments historiques de la ville de Strasbourg. ©Sandrine Kauffer-Binz
Sa particularité est d’avoir un plancher en contrebas de la rue. La salle ne se confond pourtant pas avec un caveau, car elle est haute de plafond. Vous remarquerez l’ouverture des fenêtres très basses. Elles permettaient autrefois d’y transiter le Lohkäs et de le stocker. Mais qu’était-ce ? Le Lohkästreppler vendait le Lohkäs, une composante résiduelle, qui avait servie à tanner le cuir. Il le séchait puis le revendait comme combustible dans de nombreux foyers strasbourgeois.

Le restaurant aux deux terrasses, à la Petite France

Le Lohkäs – Strasbourg ©Sandrine Kauffer-Binz
Sitôt la porte franchie, descendez les quelques marches et plongez dans une chaleureuse salle alsacienne chauffée l’hiver par un poêle en faïence. Des plats typiques sont servis dans un service Henri Loux, posé sur une nappe en kelsch. Objets chinés, miroirs, meubles d’angles, tableaux anciens, confèrent une authenticité très appréciée. À l’étage, découvrez une succession de petites pièces intimistes.

 

Strasbourg : patrimoine, winstub et gastronomie (2/2)
Le Lohkäs – Strasbourg ©Sandrine Kauffer-Binz
Le chef propose du foie gras décliné en terrine, poêlé, ou déposé sur la salade emblématique du Lohkäs, escorté de saumon et de magret fumés. Un filet de sandre au riesling, le waedelé, le jambon de porc au munster et les pommes de terre sautées ont tout pour plaire.
La choucroute aux trois poissons, sauce beurre blanc ©Sandrine Kauffer-Binz

 

Plats bio, vegan et végétariens sont une alternative bien sympathique, présentées en poêlon garnis de spätzles ou encore de pommes de terre gratinées. Des tartes flambées laissent échapper leur fumet gourmand, attirant comme un aimant les passants.
Le Lohkäs, entre ponts et canaux, est un havre de paix, alors que dehors, on bat le pavé.

Le Meiselocker, la plus récente Winstub de Strasbourg

Enfin, telle une pépite d’un temps nouveau, découvrez la plus récente des winstubs strasbourgeoises, « Le Meiselocker » fondée en 2012.

Chaque nom de winstub a son histoire. « Meiselocker » se traduit par le charmeur de mésanges, en référence à la fontaine, située place Saint-Etienne. Une source prend naissance au pied d’une statue représentant un petit garçon, qui joue d’une main de la flûte pour attirer les mésanges. Il tient dans l’autre une cage pour les emprisonner… Enchanteresse, elle aussi, cette winstub plonge le visiteur dans les charmes d’antan, avec ses lambris et son parquet boisés.

Le Meiselocker, la plus récente Winstub de Strasbourg ©Sandrine Kauffer-Binz

Les tissus Kelsch, à carreaux rouge et blanc, égayent la salle, renforçant l’esprit de convivialité. À la carte ? des bons petits plats réconfortants et traditionnels, sans oublier le menu des « petites mésanges », qui ravira les enfants.

« Il y a beaucoup de belles winstubs à Strasbourg. Alors nous avons travaillé sur des plats marqueurs, qui ont du goût et du caractère, pour nous distinguer », explique le chef Jonathan.

Le Meiselocker, la plus récente Winstub de Strasbourg ©Sandrine Kauffer-Binz

« Ces recettes font honneur à l’histoire et au travail des fermiers », mentionne le chef natif du Sundgau. « Je pars des produits de repas paysans, qui ont toujours réussi à faire du très bon, avec parfois peu. Le bibeleskass (caillé égoutté, crème fraîche, ail et ciboulette) est un plat de mon enfance. J’aimais celui de ma grand-mère. Elle le servait avec des pommes de terre sautées. » Quatre préparations rivalisent : le tradition, le paysan (qui est le préféré de Jonathan, rehaussé d’une poêlée de lardons), celui au munster et enfin le campagnard, accompagné d’un assortiment de charcuteries.

Sur la table ; presskopf, rosbif de cheval et baeckhoffe de poisson ©Sandrine Kauffer-Binz

Le presskopf de joue de bœuf fait maison, avec une belle taille des légumes en brunoise, connaît un vif succès, tout comme le rosbif de cheval. « À Strasbourg, peu de winstubs servent du cheval », précise le chef. « Ce sont quatre jours de préparation et de 8 à 10 heures de marinade. Une clientèle d’habitués vient spécialement pour le déguster ».

La meilleure vente demeure la choucroute du Meiselocker. Elle est composée d’une saucisse de Strasbourg, d’une saucisse fumée au cumin, d’un beau morceau de lard salé, de lard fumé et de collet fumé. Si vous rajoutez à ces ingrédients des lewerknepfles et du boudin noir, vous serez royalement revigorés, à moins d’opter pour le croustillant de boudin noir et oignon confit, ou un cordon bleu au munster.

Le rosbif de cheval du Meiselocker ©Sandrine Kauffer-Binz

 

Baeckeoffe de poissons du Meiselocker ©Sandrine Kauffer-Binz

À proximité du Meiselocker, se situe la maison habitée jadis par le sulfureux comte de Cagliostro (rue de la Râpe) et le Palais des Rohan qui date du XVIIIe siècle. Mais impossible de ne pas faire un tour place du Marché-Gayot (PMG), classée en 1988 par l’UNESCO, au titre du patrimoine mondial de l’humanité sous l’appellation « Strasbourg Grande Île ». Très prisée pour ses terrasses, son histoire moins médiatisée vous est contée.

Anciennement désignée sous le nom de « Cour Brûlée », enclavée entre les maisons, plantée d’arbres, elle est accessible par huit entrées. Pratique pour une ancienne place du commerce ! Autrefois marché aux herbes, marché à la volaille puis à la viande de boucherie, la place se nourrit de quelques légendes. En effet, en regardant les portes très basses de certaines maisons, il se murmure qu’elles avaient été prévues pour des personnes de très petite taille, des nains, des fous et des bouffons, employés par la cour épiscopale.

La Place du Marché Gayot (MPG) à Strasbourg

Elle est actuellement devenue l’un des lieux de rendez-vous favoris de la jeunesse strasbourgeoise et des étudiants qui viennent apprécier au Meiselocker un plat du jour à 8,90€, heureux de savourer pour ce prix un onglet de bœuf. Car le doux son de la flûte n’attire pas que les mésanges. Bien interprétée, la partition culinaire se transforme en symphonie des saveurs.

Par Sandrine Kauffer-Binz
Crédit photos Sandrine Kauffer-Binz et DR

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