Patrick Bertron, Julien Binz et Benoit Charvet dans les cuisines du Relais Bernard Loiseau ©JulienBinz

Relais Bernard Loiseau, un temple de la gastronomie par excellence

Plusieurs prétextes et circonstances nous ont conduit un samedi 5 octobre 2013, au Relais Bernard Loiseau à Saulieu, 3* Michelin, Relais & Châteaux et membre des Grandes Tables du Monde. Les raisons sont multiples et énoncées non hiérarchisées : découvrir l’univers culinaire et mythique de Bernard Loiseau, chef triplement étoilé décédé le 24 février 2003, saluer l’Alsacienne Dominique Loiseau, grande dame de la gastronomie, PDG Bernard Loiseau SA, féliciter le chef pâtissier de l’année Benoit Charvet, fraîchement récompensé la semaine dernière à Paris lors de la soirée du Magazine Le Chef, évoquer la sortie prochaine du livre de Patrick Bertron, chef 3* du relais Bernard Loiseau, héritier des recettes et du savoir-faire de la cuisine du maître de ces lieux, ominiprésent, dont la mémoire est célébrée par toutes les personnes qui l’ont côtoyé professionnellement et personnellement. La date de la visite épicurienne a sans doute été accélérée suite au rendez-vous chez Bernard Leray, chef étoilé de la Nouvelle Auberge à Wihr-au Val (67), un ancien du Relais, qui désigne Bernard Loiseau comme un second père. Son récit ému de son repas d’anniversaire orchestré par son ami Patrick (ndlr, les deux chefs bretons se sont rencontrés chez Bernard Loiseau) a précipité une réservation, motivée et doublée, cette fois par des raisons personnelles.

Nous n’avons pas connu, ni rencontré Bernard Loiseau, mais il entre dans l’univers des célèbres chefs immortalisés par l’amour inconditionnel et encore palpable de ceux qui l’ont côtoyé. Ni temple, ni lieu de culte, ni musée vivant, nous sommes bien dans un hôtel-restaurant, marqué par une personnalité culinaire d’envergure, dont le charisme et l’aura survivent à sa disparition.
De nombreuses photos et tableaux narrent l’histoire des lieux ©JulienBinz
Des photos, des tableaux, des objets et des symboles jalonnent les pièces de l’établissement. Ni ostentatoires, ni pesants, ils suscitent au contraire tout l’intérêt des gastronomes, amateurs et professionnels qui aiment se replonger avec nostalgie dans cette grande période de la cuisine française, reconnaissant des chefs rajeunis sur les clichés.

Qu’il est bon de patienter dans le salon Bernard Loiseau dès votre arrivé, le ton est donné.

Julien Binz et Dominique Loiseau partagent leur origine alsacienne ©JulienBinz
La douceur et l’élégance de Dominique Loiseau force l’admiration. Chacun ayant pris connaissance de son histoire, de son parcours, ayant lu les ouvrages et les belles interviews (Cf le dernier Thuriès) saura jauger avec respect le courage et la force nécessaire pour poursuivre l’œuvre de son mari. Quelle réussite, quelle persévérance, quelle constance dans la qualité ! L’empreinte de Bernard Loiseau est si puissante que le gourmet a le sentiment qu’il va d’un instant à l’autre apparaître dans toute sa superbe.


la salle panoramique avec vue sur le jardin photo DR
Durant le repas, quel plaisir d’écouter les collaborateurs, narrer avec envie les anecdotes de l’époque, mais aussi évoquer le drame, la succession avec ses joies, ses peines, ses doutes, ses réussites et les nombreux soutiens indéfectibles. De Pascal Abernot, directeur du Relais Bernard Loiseau, à Eric Rousseau Premier maître d’hôtel ou Antony Aguera, maitre d’hôtel, la mémoire est entretenue et partagée avec pudeur.

La rencontre avec le chef sommelier exécutif du Groupe Bernard LoiseauEric Goettelmann, un autre Alsacien est à souligner. Vantant les atouts des vins de Bourgogne, avec talent, il précise que le restaurant du Relais Bernard Loiseau possède l’une des plus belles caves à vins de la région (15 000 bouteilles, soit 900 références). Elu meilleur sommelier de Bourgogne en 2004, 2006 et 2008, Eric Goettelmann a été désigné meilleur sommelier de l’année en 2006 par le magazine Le Chef. Ce soir là, il nous a présenté avec conviction sa conception et l’avenir certain de la vente du vin au verre. Secondé avec bio par Baptiste Gauthier, premier sommelier, ils veillent sur une cave historique et une oenothèque bien moderne.

A droite Eric Goettelmann chef sommelier exécutif du groupe Bernard Loiseau et Baptiste Gauthier photo DR
En 2007, le restaurant Loiseau des vignes à Beaune a été créé devenant “Le premier restaurant européen à proposer une carte entière de vins au verre, avec près de 70 références, la plupart introuvables”, explique le sommelier porteur du projet. En 2010, Loiseau des vignes est récompensée d’une étoile au guide Michelin.

Fort du succès de ce concept, Dominique Loiseau décide la création d’une œnothèque au Relais Bernard Loiseau, proposant plus de 40 vins d’exception au verre, une première pour un restaurant 3 étoiles Michelin ! Les amateurs de vins se réjouissent de déguster un Chablis 1er Cru “La Forest” 2009 de Vincent Dauvissat, le Corton-Charlemagne Grand Cru 2002 du Domaine Bonneau du Martray, ou encore le Bâtard-Montrachet Grand Cru 2009 de Jean-Noël. Gagnard. Les vins rouges sélectionnés : le Nuits-Saint-Georges 1er Cru “Les Porêts-Saint-Georges” 2002 de A. Michelot, le Latricières-Chambertin Grand Cru 2009 de chez Albert Bichot…


Patrick Bertron, chef 3* Michelin du Relais Bernard Loiseau à Saulieu ©JulienBinz
En cuisine, la pérennité de la maison étoilée, toujours au niveau de l’excellence est portée par la bienveillance et la loyauté du chef Patrick Bertron à l’esprit culinaire de Bernard Loiseau. Conjuguant fidèlement les grands classiques – Jambonnettes de grenouilles, Sandre à la peau croustillante et fondue d’échalotes, sauce au vin rouge, Blanc de volaille fermière et foie gras poêlé à la purée de pommes de terre truffée, Rose des sables à la glace pur chocolat et son coulis d’oranges confites – , qui ont traversé le temps majestueusement et dont la réputation a franchi tous les continents, ils sont plébiscités par les inconditionnels de la cuisine de Bernard Loiseau.
Par ailleurs, c’est avec justesse et raffinement que Patrick Bertron porte une évolution culinaire juste et actuelle, dans le respect de la mémoire et les préceptes de celui qui fut son chef.


Cromesquis de salsifi, sur une purée de cèpes, huile de pignons de pins ©JulienBinz
Originaire de la Bretagne, il est arrivé chez Bernard Loiseau en 1982, reprenant -pour l’anecdote- le poste de commis occupé par Bernard Leray. En quelques temps, il passe rapidement second de Bernard Loiseau, chef triplement étoilé depuis 1991. On retrouve aujourd’hui dans sa carte la perfection, l’exigence et l’imagination : autant de qualités forgées par plus de 20 ans de collaboration avec Bernard Loiseau. “Ma cuisine est une cuisine de terroir, à forte identité française. J’aime souligner le produit phare de l’assiette, avec une épice par exemple, mais toujours de façon naturelle et très bien dosée. Une cuisine gourmande, franche, avec des attentions, des subtilités, des surprises… “, explique Patrick Bertron qui signe un livre de recettes, disponible dans quelques jours.

“Dans l’assiette, je cherche à surprendre tout en sublimant les saveurs du produit” précise-t-il, “Je m’attache à la puissance des goûts, en limitant toujours l’utilisation des matières grasses et du sucre. Des sauces aux arômes subtils accompagnent ces produits nobles, sans jamais altérer les saveurs franches du produit principal.”


le Saint-Pierre, Bouillon d’huitres iodé, mille feuilles de betteraves rouge et jaune, huitre en gelée ©JulienBinz
Patrick Bertron a créé avec son chef Julien Poisot et son second Mathieu Pouleur , une véritable cellule de recherche dans laquelle chacun arrive avec son univers, son parcours, ose et propose.”Lors de la création des recettes, c’est moi qui donne le tempo et qui décide en dernier lieu si l’on retient ou non ce que l’on vient de concevoir. Mais il existe une vraie discussion. Je crois qu’il est nécessaire de sortir de cette idée qu’il y a un chef et que tout bouillonne seulement dans sa tête. Chez nous, la cuisine est un vrai travail d’équipe”.

Joignant la parole à l’action, Patrick Bertron est fier de mettre à l’honneur Benoit Charvet, récemment récompensé du trophée de chef pâtissier de l’année, par le magazine Le Chef, et qui publie dans quelques jours son premier livre de recettes “Créations Gourmandes”

Emincé de cèpes crus, brunoise de cèpes, huile de sapin ©JulienBinz
Pour savourer un menu gastronomique de toute beauté, différentes salles offrent chacune leur particularité. Celle dédiée à Alexandre Dumaine, ancien chef de L’Hostellerie de la Côte-d’Or permet de raconter l’histoire de l’établissement autrefois baptisé La Côte d’Or. Alexandre Dumaine recevait en ces lieux toute la jet-set européenne qui se rendait sur la Riviera ou dans les Alpes. Cette maison mythique a été reprise de 1963 à 1975, par François Minot, avant d’être rachetée par Claude Verger qui a confié la direction à Bernard Loiseau, associant éternellement son nom à celui de la mythique Côte d’Or.

C’est à sa disparition que la maison étoilée fut rebaptisée Relais Bernard Loiseau, pour d’une part rendre hommage au chef cuisinier décédé et d’autre part, souligner “le relais” pris par Dominique Loiseau et tous les collaborateurs du chef, restés présents à ses côtés et soudés.


Langoustine Royale rôtie au beurre de citron, cannelloni de chou farci en habit de printemps, sauce au vert à l’ortie ©JulienBinz
Langoustine Royale rôtie au beurre de citron, cannelloni de chou farci en habit de printemps, sauce au vert à l’ortie ©JulienBinz

Suprêmes de pigeon du pays de Retz, petits pois à la française et gnocchi de vitelotte au thym-citron ©JulienBinz


Côte de veau fermier cuite en cocotte, jus à la cazette de noisette, carré de petits légumes et compotée de pied de veau, cœur d’échalote confite et rognon ©JulienBinz
une trilogie de mignardises fraisier, entremet pina colada et religieuse coquelicot ©JulienBinz,
Atome de chocolat Java croquant et crémeux, sablé cacao et mousse légère ©JulienBinz
Atome de chocolat Java croquant et crémeux, sablé cacao et mousse légère ©JulienBinz
Chocolat au lait et limoncello Barre fourrée de caramel au beurre salé et noix de pécan, meringue citronnée ©JulienBinz
La carte des desserts est signée Benoit Charvet, élu chef pâtissier de l’année 2013 par ses pairs. Benoît Charvet est un artiste qui conçoit chaque dessert pour obtenir une véritable création sucrée. Imaginatif, créatif et passionné, le chef réalise de vrais chefs-d’œuvre en jouant avec des thèmes bien précis. Sa matière de prédilection est le chocolat. Sa gamme est référencée par l’association du Club des Croqueurs de Chocolat.

Benoit Charvet fait ses débuts comme apprenti chez Potel & Chabot où il côtoie Marc Rivière, champion du
monde en pâtisserie en 2009. Il se perfectionne autant dans la confection de pâtisseries que dans la sculpture sur glace hydrique ou le maniement du sucre tiré durant 4 ans. Il passe son CAP de pâtissier et intègre la maison d’Alain Senderens (trois étoiles) en qualité de chef pâtissier. Après cette expérience formatrice qui lui a permis d’affiner sa technique, Benoît rejoint en 2006 le relais Bernard Loiseau à Saulieu. Aux côtés du chef Patrick Bertron, il reprend deux des desserts mythiques de Loiseau (la Rose des sables au chocolat et le Saint-Honoré minute), mais propose également ses propres créations en leur assignant une griffe culinaire bien marquée.

Par Sandrine Kauffer
Crédit photos ©JulienBinz (sauf DR)

BERNARD LOISEAU
2 RUE ARGENTINE
21210 SAULIEU
Tel : +33380905353
www.bernard-loiseau.com