Bien sûr, nous savons tous qu’un restaurant est un établissement public où l’on sert des repas moyennant paiement, mais le premier sens n’est pas celui-là : c’est « aliment, boisson qui restaure, réconforte, redonne des forces ».
De fait, considérons la merveilleuse recette d’un restaurant, dans Le Cuisinier, de Pierre de Lune (1556) : dans un récipient que l’on pourra clore hermétiquement -jadis, avec un linge et un lutage- on mets trois perdrix, deux chapons, un membre de mouton, une rouelle de veau, le tout bien dégraissé, avec les os des perdrix et des chapons brisés ; on n’ajoute pas d’eau, on ferme et on fait bouillir pendant 12 heures ; puis on passe en pressant.
Que peut-on bien obtenir ? Je vous laisse faire l’expérience, en indiquant que les viandes se contractent quand on les cuit, perdant jusqu’à un tiers de leur masse, sous la forme de jus exclus des chairs par la contraction du tissu collagénique. À ce liquide, qui est la base du « restaurant », s’ajoute le liquide qui est récupéré par le pressage, quand on finit de sortir des fibres musculaires le liquide qu’elles contiennent. Et j’ajoute aussi qu’une viande, c’est 80 pour cent d’eau, de quoi récupérer une bonne partie de liquide, pour une préparation qui n’est ni un fond, ni un consommé, ni un bouillon, ni une « eau » de poulet, de veau, de chapon, ni un jus des mêmes viandes.
Pour l’« eau », c’est encore préparation que l’on obtient en faisant bouillir des viandes divisées dans de l’eau. Pour les jus, il y aura eu un rôtissage.
Par Hervé This