Pays d’Oc, pays d’Oïl : on divise ainsi la France ancienne, d’après la langue que l’on dit y avoir parlé. La langue d’Oc, c’est-à-dire l’occitan, était parlée dans le tiers sud de la France, tandis que la langue d’oïl, ou oïl, est la langue romane qui s’est développée dans la partie nord de la Gaule, se confondant ensuite avec l’ancien français.
Tout cela a-t-il un rapport avec l’oil (sans tréma sur le i) que l’on trouve dans le Cuisinier roïal et bourgeois publié en 1705 ? Là, pour l’oil, « Est un grand Potage que l ‘on peut servir en maigre, aussi-bien qu’en gras. »
En tout cas, c’est donc un grand potage, mais pas n’importe lequel ! Car l’oil en gras est fait de « toutes sortes de bonne viande », à savoir du bœuf, du veau, du mouton, du canard, de la perdrix, du pigeon, des poulets, cailles, jambon… jusqu’à des saucisses et du cervelat ! On marque le tout dans un roux, puis on empote chaque viande séparément. On fait alors une liaison avec le roux, on écume, et on assaisonne avec sel, clous, poivre, muscade, coriandre, gingembre, thym et basilic. On a l’impression que c’est déjà bien ? Et bien, ce n’est pas suffisant, car il faut encore ajouter « toutes sortes d’herbages & racines bien blanchies » : oignons, poireaux, carottes, panais, racines de persil, choux, navets.
Puis on fait mitonner des croûtes de pain dans le bouillon, et l’on sert, enfin : on distribue les viandes, et on laisse les racines dans un « bassin » (une soupière) avec une cuiller à pot (une louche) pour que chacun puisse puiser de la soupe quand l’Oil est sur la table. J’ai bien dit « de la soupe »… puisqu’il y a ce pain, qui distingue le potage (sans pain) de la soupe (avec pain, ou bien le pain tout seul, que l’on trempe de potage).
Par Hervé This