Pour le Trésor de la langue française informatisé, les croquets sont de petits gâteaux secs et brun foncé, à base d’amandes, servis avec le thé ou les glaces. Mais méfions-nous des dictionnaires modernes, qui ignorent presque tout de la cuisine !
D’ailleurs, ce Guide culinaire que je n’aime pas (parce qu’il est truffé d’erreurs) donne déjà une définition différente : « Croquets divers. – Se composent invariablement d’un farinage copieusement additionné de jambon maigre en julienne, et lié au fromage râpé. L’appareil refroidi sur plaque, en couche de 1 centimètre et demi d’épaisseur, est divisé en rectangles de 8 centimètres de long sur 3 de large ; lesquels sont panés deux fois à l’anglaise pour doubler le volume de la croûte extérieure. Frire. » Rien à voir avec un gâteau, donc.
Mais puisque le Guide culinaire est lui-même souvent fautif, remontons donc un peu…et c’est merveille, puisque, avec Joseph Favre, nous trouvons tout une série de croquets : des croquets de dame (avec rhun, amandes), de Paris (avec eau de fleur d’oranger), de Nantes (avec amandes, taillés en losange), de Bordeaux (avec amande et une prise de carbonate de soude), suisses (avec cannelle, citron), de Port-Mahon (avec amandes et citron, dorés à l’oeuf), de Lyon (avec amandes, citron, zeste de citron), glacés (avec vanille), d’ananas, à bière (amandes, très minces), pralinés (avec du pralin et des fruits confits). Quasi invariablement, on fait une pâte avec farine, amandes, sucres, œuf, on couche à la poche et l’on cuit.
Mais avant cela ? Urbain Dubois, élève de Carême, donne la recette suivante : « Croquets. — Mettez dans une terrine 500 grammes de sucre parfumé au citron ou à la vanille; travaillez-le avec 4 blancs d’œuf; quelques minutes après, ajoutez-en un autre, puis encore un, Quand l’appareil est mousseux, ajoutez 350 grammes de farine. Couchez les biscuits à la poche, sur plaque, en leur donnant la forme des biscuits à la cuiller ; cuisez à four doux. ». Et c’est encore du gâteau. Etonnant, d’ailleurs, parce que Carême lui-même n’évoque pas de croquets.
Enfin, en remontant davantage, on s’arrête avec : On appelle Croquets, certains composés d’une farce délicate, dont il s’en fait de gros comme un oeuf, & d’autres comme une noix. On peut servir de ces premiers pour Entrée, du moins en Hors-d’oeuvres, & les autres ne sont que pour garnir. Prenez pour cela des estomacs de Poulardes, de Poulets & de Perdrix. Hachez cette viande avec du lard blanchi, de la têtine de Veau cuite, quelques ris-de-veau blanchis, des truffes & des champignons, de la moelle, une mie de pain trempée dans du lait, & toutes sortes de fines herbes, avec un peu de fromage à la crème, & de la crème de lait autant qu’on juge à propos : le tout bien haché & bien assaisonné, on y met quatre ou cinq jaunes d’œufs, & un ou deux blancs. Avec cette farce, on forme les Croquets en rond ; on les roule dans battu, on les pane en même tems, & on les laisse reposer sur un plat, pour les frire ensuite avec du fain-doux bien propre, & servir chaudement. La même farce sert à farcir des Fricandeaux, & pour les Filets mignons dont il fera parlé ci-après.
Pour les petits Croquets, on les peut faire de la même farce, ou de toute autre qui soit un peu délicate & liée. On les empâte avant que de les frire, avec une pâte comme celles de beignets de pomme. On les peut aussi fariner ou paner ; ils vous serviront pour garnir toute sorte de plats, où il y aura des Entrées de Volaille farcie : le tout servi chaudement.
Par Hervé This