Surtout quand vient Pâques, on cuit des gigots de mouton ou d’agneau. Certains prétendent faire un gigot de sept heures sous prétexte qu’il serait cuit sept heures, notamment à basse température… mais un gigot de sept heures, ce n’est pas cela.
A ma connaissance, on trouve la plus ancienne recette de gigot de sept heures dans le livre d’André Viard intitulé Le cuisinier impérial, et publié en 1806, et voici la recette :
« Vous avez un gigot de mouton que vous désossez jusqu’à la moitié du manche ; vous l’assaisonnez de lardons, de sel, de gros poivre, de thym et de laurier pilés, et vous piquez le dedans de votre gigot ; ne faites pas sortir vos lardons par-dessus. Quand il est bien piqué, vous lui faites prendre sa forme première ; vous le ficelez de manière qu’on ne s’aperçoive pas qu’on l’ait désossé ; vous mettez ensuite des bardes de lard dans le fond de votre braisière, quelques tranches de jambon, les os concassés, quelques tranches de mouton, quatre carottes, six oignons, trois feuilles de laurier, un peu de thym, trois clous de girofle, un bouquet de persil et ciboules, plein une cuillère à pot de bouillon ; vous mettez tout cela dessus votre gigot, que vous couvrez de lard, et un papier beurré pour le recouvrir ; vous mettrez votre gigot cuire pendant sept heures s’il est fort, et vous le ferez aller à petit feu ; vous en mettrez aussi sur le couvercle de la braisière ; au moment de servir, vous l’égoutterez, vous le déficellerez vous le glacerez, et vous le servirez avec le mouillenent réduit dans lequel il aura cuit. »
Décodons un peu : avec du lard, du jambon, des os, des carottes et des oignons au-dessous et au-dessus de la viande, avec la cuisson dans une braisière « cendres dessus et dessous », c’est un « braisé », que l’on fait. La particularité, c’est que le gigot est désossé et piqué. Et l’on observera que, contrairement à des braisés modernes, le jus n’est pas ajouté à un roux pour en faire un velouté ; il est réduit, afin de glacer la viande.
D’un point de vue gustatif, maintenant, on observera les goût du lard, du jambon, du laurier, du persil, de la ciboule, du thym, mais aussi des clous de girofle, qui distinguent ce gigot de sept heures d’un simple braisé.
La cuisson ?
C’est celle d’un braisé, donc une cuisson à basse température : on craignait naguère le « coup de feu », qui durcissait les viandes, mais avec les ustensiles modernes, on utilisera une température de 70 à 90 degrés, par exemple. Quelle température au juste ? Y a-t-il une température « juste », ou « exacte » ? Non, il y a la température que le cuisinier décide, parce que cette température donne le résultat qu’il souhaite. Quand au temps, avec les systèmes modernes, tels que les fours à la norme verte, bien réglés, plus il est long, plus la viande sera tendre.
Par Hervé This