Après avoir travaillés les vins, sakés, bières, vermouths, thé d’exception pu-erh, extractions de légumes et d’aromates du jardin, infusions, décoctions, fermentations (tonics Maison, kombuchas, kéfirs…), ils décident d’associer les compétences pour aller au delà d’un simple mélange de jus ou d’un ajout d’eau pétillante ou de limonade atypique. Au cœur du végétal et de l’aromatique, toute l’équipe de sommellerie s’est mise aux fourneaux pour éplucher, rissoler, mijoter et concocter des recettes liquides en cohérence totale avec les plats au menu.
“Pour la féra échalotes par exemple, c’est la définition d’un accord cuisiné pur et dur. On passe en cuisine, on crée une eau qu’on fait à travers des échalotes rôties. On les fait colorer et caraméliser dans le fond d’une cocotte en fonte, sur le piano. Dès qu’elles sont suffisamment dorées, on les mouille avec un peu d’eau, on ajoute du miel pour sucrer légèrement. C’est une cuisson comme un bouillon de grand-mère. Il cuit pendant quelques heures jusqu’à la concentration en arômes et en sucrosité souhaités, de par l’évaporation et le phénomène d’osmose. On sert cette boisson légèrement tiède avec, sur le dessus, une émulsion de lait d’alpages, un lait fermier entier fumé au bois de genévrier. » explique Thomas Lorival.
Les eaux de fruits maison
“Dans le cadre des accords mets et jus au Clos des Sens, nous avons développé les eaux de fruits maison, parce que l’ennemi numéro 1 des accords sans alcool”, est la sucrosité, poursuit le sommelier. “Nous avons donc développé les eaux pour pallier à cela. On utilise une masse de fruits que l’on lance en cuisson avec de l’eau. On dilue ensuite la matière que l’on met en cuisson longue.”
“C’est un phénomène d’osmose qui va permettre à l’eau de se charger de tous les éléments du fruit, du légume, de la fibre et ainsi de récupérer toutes les composantes aromatiques, les sucres, les acides, les amers, la sensation tanique dans l’eau de mûre par exemple. Jusqu’à la matière sèche, solide, une fois la totalité de l’eau réduite. C’est ce phénomène d’osmose à cuisson lente qui nous a permis d’obtenir une eau de rhubarbe, parfumée et surtout texturée. Comme si on sortait un bout de rhubarbe de l’extracteur, sans la violence de l’acidité, parce qu’elle est contrebalancée avec un peu de sucre naturel. On intègre ensuite la fleur de sureau.”
À noter que pour conserver les éléments de leurs jus, dans le but de respecter la saisonnalité des produits, la plupart sont conservés dans des bocaux et du sucre comme pour le sureau, de l’ail des ours en vinaigre ou encore des viandes séchées qui permettent d’apporter la salaison nécessaires à certaines préparations.
“On a travaillé des moyens de conservation qui développent le propos de la localité. Cela fait aussi partie du sens citoyen, de l’écoresponsabilité qui nous guide, poursuit Thomas Lorival. “On est tout à fait conscient qu’on veut être en lien avec les saisons, nos maraichers et nos producteurs. À nous de trouver des moyens ancestraux de conservation et de préparer en amont. À l’époque, l’affinage d’un fromage était fait pour la conservation. Idem pour la salaison et la fumaison, en dehors du goût fumé, c’était aussi pour préparer les périodes hivernales.”