On ne présente plus La table de la Roche Le Roy, à Saint-Avertin (1* au Michelin, 3 Toques au Gault et Millau), référencée comme l’une des plus belles tables gastronomiques de Tours. Alain Couturier, son chef, devenu une référence dans la profession, y officie en cuisine depuis bientôt 30 ans avec toujours la même excellence et amour du métier. Une cuisine simple et équilibrée dans la pure tradition d’Escoffier.
L’histoire de la Roche Le Roy, c’est d’abord celle de ce charmant manoir du 18e, acquit par Alain et Marilyn Couturier, en 1986 pour une bouché de pain et qui, grâce à d’importants travaux de rénovation, a retrouvé de sa superbe. Un mobilier de château, une vaisselle à l’ancienne, l’éclairage feutré, une répartition en petits salons sur deux niveaux, à cette table de haut vol, tout s’harmonise avec une pointe de modernité dans un style Gentilhommière. Une carte “grand format” bien fournie et trois menus de 35€ à 72€ : « Affaires », « Carte Blanche » et « Favori » , constituent la proposition gastronomique du chef étoilé.
Quand j’étais jeune, au début je passais du temps dans la pâtisserie de mon père. J’ai toujours voulu faire ce métier. J’ai fait la plonge dans des restaurants pour payer mes vacances et à mon retour mon père m’a demandé « Tu veux toujours faire cuisinier ? » j’ai dit oui… et j’ai commencé à apprendre le métier. J’ai passé un CAP Restaurant et un CAP Pâtissier, en candidat libre, au Lycée Bayet à Tours.
L’Apprentissage…
Mon premier job c’était à La Bonne Etape à Amboise. Puis à 17 ans je suis entré chez Charles Barrier. J’y suis resté 1 an et demi. Ensuite je suis parti à Asnières chez Michel Guérard, (à l’époque chef du bistrot le Pot au Feu, 2* Michelin), qui m’a envoyé en pâtisserie au Réginskaïa (NDLR : restaurant russe appartenant à Régine). Mais ça n’a pas vraiment marché. En 1972, je suis parti chez Paul Chêne, puis chez Guy Legay (2*- Pavillon Ledoyen) pendant 2 ans et demi et enfin au Hilton à Sufresnes où j’ai rencontré mon épouse Marilyn. J’ai traversé la Manche pour travaillé chez les frères Roux 3*, au Waterside, (Bray, Berkshire) et au restaurant Le Gavroche, à Londres.
De retour en France, vous prenez la gérance de La Poivrière à Tours (aujourd’hui Le Barju,b[ Julien Perrodin)..]b
Dès le départ je savais que j’aurais un jour mon propre restaurant. La Poivrière c’était ma première affaire, on a eu rapidement deux Toques au Gault et Millau. J’avais 25 ans, je travaillais comme un fou, je dormais même dans ma cuisine ! Mes deux enfants aînés sont nés pendant cette période. Le restaurant n’a pas désempli jusqu’à ce qu’on le revende.
On a racheté la maison en 1986, pour pas grand-chose à l’époque. Mais on a eu un véritable coup de cœur pour le lieu, la maison. On voulait faire aussi bien, sinon mieux, qu’à La Poivrière. Au début avec mon épouse, on s’était fixé l’objectif de faire 30 couverts par plus, avec une équipe de 3 cuisiniers et 3 serveurs. Mais finalement, grâce à la renommée de La Poivrière, en un an, ou servait déjà 100 couverts par jour. Et du coup on a décroché l’étoile assez rapidement, au bout d’un an.
Votre cuisine …
Tout est fait ici, même le pain ! Je construit ma carte en fonction de mes clients, de leurs goûts, de leurs envies. J’aime la cuisine « canaille » : le pied de porc farçi, la queue de bœuf, le bœuf miroton, la tête de veau, la brandade de morue,.. revisités bien sûr. C’est une cuisine qui demande du mijotage, de la mise en place, des petits jus. C’est la cuisine qu’on faisait dans le temps, dans les maisons bourgeoises.
C’est la cuisine d’Escoffier, mais moderne !
Oui une cuisine simple, qui joue sur le produit et surtout généreuse. Il ne faut pas que ce soit grossier, mais je donne à manger aux gens. Mon rêve, cela aurait été de tenir une auberge, avec un toit de paille ! Ici, au château, le style Auberge ne s’y prête pas évidemment. Mais, même si mon service en salle est en habit noir et blanc, mon personnel accueille mes clients comme des amis !
Indéniablement le Vol au Vent . Je le cuisine avec des petites crêtes de coq, des quenelles de volailles et bien sûr le ris de veau… Comme au temps d’Escoffier. Seul particularité, je l’accompagne d’une sauce aux morilles, cuit à la minute.
Les produits sont au centre de votre cuisine …
C’est essentiel, on n’est pas magicien ! On passe par Estivin pour les légumes ; pour le poisson, le homard vient de Roscoff. Parfois on cuisine l’Anguille de Loire, la carpe, mais cela se vend moins. On propose aussi la Poule Noire du Berry, qui remplace peu à peu la Géline de Touraine, qu’on trouve de moins en moins.
C’est tout de même une cuisine créative à La Roche Le Roy…
Oui. On a quelques plats plus sophistiqués mais qui gardent une base classique. Par exemple, le Marbré de Foie gras à la Poire Tapée où l’Onglet nature avec un jus au tilleul et une vraie béarnaise. La Tête de Veau en terrine ou le Saint-Pierre rôti aux câpres… C’est une nouvelle cuisine classique !
Oui bien sûr, c’est l’avenir. Je fais une cuisine qui n’est pas une cuisine d’assemblage : je fais encore des jus et tout est réalisé sur place. J’aime que les plats soient équilibrés : acidité, gras et croquant. Donc l’apprentissage de tout cela aux jeunes cuisiniers compte beaucoup. Certains chefs, connus aujourd’hui, ont fait leurs débuts chez moi : Akrame Benallal, Sébastien Richard, Guillaume Tirel à Cancale (Coté Mer), … Aujourd’hui je suis super content de voir leurs parcours et encore plus lorsqu’ils viennent me voir.
Et vos mentors à vous, qui sont-ils ?
Guy Legay, Michel et Albert Roux en Angleterre et bien sûr Charles Barrier, mais qui n’est plus là aujourd’hui. Ce sont des chefs pour lesquels j’ai toujours un immense respect.
Ce sont des chefs qui vous inspirent encore ?
Pas forcément. Je lis beaucoup, mais ne copie jamais, et je ne regarde jamais les photos. On peut s’inspirer de ce que font les autres, mais en revanche on ne copie pas, ça n’a aucun intérêt.
Par Dominique Postel
Crédits photos : Dominique Postel, DR
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La Roche Le Roy
55, route de St Avertin
37200 TOURS
Tél : 02 47 27 22 00
http://www.rocheleroy.com