Une arbolade ? Cherchons d’abord dans le dictionnaire… et nous ne trouvons rien. Cherchons mieux, dans un dictionnaire plus ancien, et l’on trouve enfin le terme dans le Dictionnaire universel françois et latin de Trévoux, fait par des Jésuites : en 1771, il y est écrit « ARBOLADE. s. f. Terme de Cuisine. C’est un ragoût qui se fait avec un peu de beurre, de la crème, des jaunes d’œufs, du jus de poires, du sucre, & fort peu de sel. Cuis. Franç. ».
Cuis. Franç. ? Cherchons mieux, et nous remontons maintenant en 1751, avec l’Encyclopédie, éditée par Jean Le Rond d’Alembert et Denis Diderot. Ce texte qui faisait la part belle aux techniques indique : « c’est en terme de cuisine, le nom d’un flanc fait avec le beurre, la crême, les jaunes d’œufs, le jus de poiré, le sucre & le sel. Voyez le Cuisinier François. » Ah, voilà qui est mieux : un flan (plutôt qu’un flanc) et non un ragoût, avec une origine attesté : le Cuisinier françois, publié pour la première fois par Pierre François de la Varenne en 1651.
On y trouve cette recette : « Faites fondre peu de beurre & prenez de la crefme, iaunes d’oeufs, ius de poires, fucre, & fort peu de fel, faites cuire le tout ensemble ; eftant cuit, fucrez auec eaux de fleurs & servez verte. » Elle est reprise quasiment identique par Massialot, en 1705.
Mais examinons-là : c’est une crème, comme un crème anglaise, mais où l’on aurait remplacé le lait par du jus de poire. Spécifiquement de poire : pas d’orange, ni de pomme, par exemple. Non, de poire ! Bien sûr, on pourrait avoir le même résultat avec un autre jus, car le principe physico-chimique est le même : soit on cuit en agitant, et l’on a une sauce épaissie par la coagulation de l’oeuf, soit on fait prendre sans agiter, et l’on obtient un flan, pourvu que la quantité d’oeuf soit suffisante. A noter que, dans le premier cas, on peut aussi ajouter de la farine, comme on le fait quand on transforme une crème anglaise en crème pâtissière. Et si l’on y ajoutait une meringue italienne ? Une crème fouettée ?
Par Hervé This