À l’occasion de la présentation du dernier guide consacré à la région PACA – Corse – Monaco, Gault&Millau a récompensé, lundi 11 mars 2024, les chefs et les acteurs de salle de ces territoires. L’événement s’est déroulé au Palais de la Bourse de Marseille.
La veille, lauréats et partenaires de Gault&Millau ont participé à un dîner au restaurant Le K du Château de la Gaude à Aix-en-Provence, sous la houlette du chef Matthieu Dupuis-Baumal.
Depuis toujours, Gault&Millau sillonne les routes de France pour partir à la découverte des meilleurs restaurants, des plus beaux produits, des meilleurs vins et des plus belles adresses, dans un objectif unique : faire rayonner la gastronomie des terroirs aux quatre coins de la France. C’est ainsi que sont nés les Gault&Millau Tour : des rendez-vous en région qui célèbrent et fédèrent l’ensemble des acteurs de la gastronomie des terroirs et de l’hospitalité (les chefs, leur équipe, les producteurs, les jeunes en formation…).
Le palmarès
Gault&Millau d’Or PACA – Corse – Monaco 2024
Virginie Basselot – Le Chantecler – Le Negresco, Nice
Andrée Rosier, à jamais la première femme MOF Cuisine, a dû être soulagée lorsque, en 2015, Virginie Basselot a elle aussi réussi ce concours. Seulement deux femmes MOF, voilà sans doute une anomalie de l’Histoire qui ne demande qu’à être réparée mais celle qui, enfant, se rêvait pilote de chasse, n’a pas attendu cette récompense pour se faire une place et un nom dans le métier.
Fille de restaurateur à Pont-L’Evêque, la Deauvillaise n’a pas encore vingt ans lorsqu’elle rejoint Paris et enchaîne les expériences aux Ambassadeurs (période Dominique Bouchet), au Grand Véfour auprès de Guy Martin puis d’Eric Frechon au Bristol.
Son premier poste de cheffe ? Le Saint-James, à Paris, alors qu’elle n’a pas encore 35 ans. Ses idées très précises, sa grosse capacité de travail et sa très solide formation vont faire merveille dans cette belle maison du 16ème arrondissement. Elle fera d’ailleurs partie de notre promotion des « Grands de demain » dans notre édition 2016, quelques mois avant de quitter Paris pour s’installer à la Réserve, à Megève. Elle y glanera tout simplement le titre de Cuisinière de l’Année chez nos amis de Gault&Millau Suisse.
Mais Virginie n’est pas vraiment du genre à se reposer sur ses lauriers et elle quitte bientôt les bords du Lac Léman pour rejoindre les eaux plus chaudes de la Méditerranée. Le Chantecler, le restaurant du Negresco, à Nice, lui tend les bras. En quelques mois, elle va dépoussiérer cette table de palace, modernisant la cuisine tout en préservant le mythe.
Grand de demain PACA – Corse – Monaco 2024
Justin Schmitt – Château Eza, Èze
Passionné par la cuisine, Justin Schmitt a le déclic devant sa télé. « Au collège, tous les midis, je rentrais et je regardais “Bon appétit bien sûr”, avec Joël Robuchon. J’écrivais toutes les recettes et je les reproduisais le week-end », se souvient-il. Il fait ses classes comme apprenti au restaurant Gaya Rive Gauche, puis au Lucas Carton, auprès d’Alain Senderens. « Ils m’ont donné beaucoup de responsabilités, j’ai pris un poste de chef de partie alors que je n’étais qu’apprenti, c’était très formateur. »
Son diplôme en poche, Justin Schmitt enchaîne les tables de renom : Les Prés d’Eugénie sous Michel Guérard, Le Grand Véfour auprès de Guy Martin, La Grande Cascade avec son ancien chef, Frédéric Robert, et au Bristol Paris aux côtés d’Éric Frechon. En 2008, il intègre l’Hôtel de Crillon, d’abord comme sous-chef de Christopher Hache lors de la réouverture du restaurant Les Ambassadeurs, puis comme chef adjoint dès 2012.
L’année 2014 signe le temps des voyages. Point de repos, mais des stages, à Londres, en Australie, en Jordanie, aux États-Unis, au Danemark… « Ça a été super enrichissant, aussi bien culturellement que techniquement. » Si bien qu’il poursuit son tour du monde, cette fois pour le groupe Rosewood comme remplaçant de chefs au Carlyle de New York, au Rosewood London et au The Georgia Hotel Vancouver.
En 2017, Justin Schmitt devient chef de la Brasserie d’Aumont, le second restaurant du Crillon. « Mais la gastronomie me manquait », alors il prend la place de chef exécutif au restaurant Laurent, à Paris, où il obtient la note de 16/20 (3 toques). Deux ans plus tard, sur conseil de son ami Mauro Colagreco, il prend la route du Sud pour le Château Eza, à Èze, comme chef exécutif. Gault&Millau lui décerne la note de 15/20 (3 toques).
Jeune Talent PACA – Corse – Monaco 2024
Marie Dijon – Caterine, Marseille
Inscrite en fac de droit, Marie Dijon se rend compte qu’elle veut être cuisinière. Cette passion et ce souci du partage, elle les tient de son père, qui lui a fait découvrir les plaisirs de la table. La jeune femme passe alors un CAP au lycée hôtelier de Marseille et fait son apprentissage chez Ludovic Turac, au restaurant Une Table au Sud. Au bout d’un an, elle contacte le chef Pierre Giannetti pour mettre son grain de sel dans son restaurant. Il accepte et l’embauche comme apprenti. Victime d’un accident de moto huit mois plus tard, il lui confie les rênes de la cuisine. Marie Dijon devient cheffe à seulement 23 ans.
Enthousiaste, elle souhaite apporter sa patte et recrute d’anciennes connaissances du lycée hôtelier. Finalement, Pierre Giannetti vend son affaire quelques années après. Marie Dijon en profite pour faire plusieurs ouvertures de restaurants en tant que cheffe à Marseille et une à Essaouira, au Maroc.
En 2020, Marie Dijon inaugure Caterine avec l’aide de la Dotation Jeunes Talents Gault&Millau et de deux camarades de jeu du lycée, Eugénie Cenatiempo et Laura Samzun : «On a repris les locaux d’une ancienne ciergerie dotée d’un jardin où nous faisons pousser nos plantes aromatiques. Après quatre mois de travaux, nous avons réussi à faire un restaurant au style épuré et aux couleurs méditerranéennes, qui nous ressemble.» Mais, en pleine crise sanitaire, les jeunes entrepreneuses revoient leurs plans et décident de lancer l’adresse en tant qu’épicerie. Quand sonne la fin des restrictions, elles ferment le temps de s’équiper en chaises et en tables pour ouvrir le restaurant.
Aujourd’hui, Marie Dijon propose une cuisine d’humeur : «Je peux changer un plat pendant le service, en fonction de l’envie du moment et des souhaits des clients.» Caterine est avant tout un lieu de dialogue et de partage, inspiré de La Cantine de minuit, un manga de Yarō Abe. «Ma cuisine épicée est en grande partie axée sur le végétal et de style méditerranéen. Je ne jette rien, tout est transformé. Je continue même à faire des bocaux, comme à l’époque de l’épicerie.» Marie Dijon souhaite partager le plus possible cette philosophie et aimerait, dans un avenir proche, réaliser des échanges avec des cuisiniers européens.
Technique d’excellence PACA – Corse – Monaco 2024
Dominique Lory – Le Grill – Hôtel de Paris, Monaco
Si de (très) nombreux chefs se vantent d’un passage dans l’un des restaurants administrés par Alain Ducasse, rares sont ceux qui, à l’instar de Dominique Lory, ont lié à ce point leur parcours professionnel à celui de notre académicien. Né à Angers à la fin des années 1970, l’ancien élève du CFA de Nantes est recruté comme commis pour l’ouverture du premier Spoon Food & Wine d’Alain Ducasse, en 1998. Une aventure qui le marquera profondément puisque, après un passage chez Pierre Gagnaire, il s’installera au Spoon Byblos de Saint-Tropez (toujours sous l’étendard Ducasse), avant un premier passage au Louis XV, à Monaco, comme chef de partie auprès de Franck Cerutti.
Cet amoureux des beaux produits quitte alors les rives de la Méditerranée pour rejoindre Christophe Moret (puis Christophe Saintagne) au Plaza Athénée. Il passe quatre ans dans le mythique palace, toujours sous l’œil attentif d’Alain Ducasse, qui lui propose le poste de chef exécutif au Louis XV, aux côtés de Franck Cerutti, alors chargé de l’ensemble de la restauration de l’Hôtel de Paris. Dominique Lory, cuisinier aussi talentueux que discret, était évidemment tout désigné pour prendre la succession de Franck Cerutti en 2022, à la retraite de ce dernier.
Désormais responsable de l’ensemble de la restauration du mythique Hôtel de Paris (Le Louis XV, bien sûr, mais aussi le Grill ou le Bar Américain), cet amoureux de la cuisine méditerranéenne entretient chaque jour le souffle novateur qu’avait apporté Alain Ducasse à son arrivée ici même, en 1987.
Cuisine de la mer, des lacs et des rivières PACA – Corse – Monaco 2024
Fabio Bragagnolo, Casadelmar, Porto Vecchio
Son accent chantant nous fait voyager en Italie dont il est originaire. Après une formation à l’école hôtelière IAL d’Aviano, Fabio Bragagnolo, fils de boulangers italiens, débute au Four Seasons de Milan avant de prendre un poste de second au restaurant italien Il Carpaccio du Royal Monceau, à Paris.
La gastronomie française le fait rêver depuis son plus jeune âge. « Je me souviens encore dans les détails de mon premier dîner au Ritz, le 10 février 2000. J’ai toujours été admiratif des grands chefs français comme Paul Bocuse. Pour moi, la cuisine française est celle des élites et de la gourmandise », raconte-t-il. Son choix est vite fait, il s’oriente vers le savoir-faire hexagonal : « À l’époque, en Italie, nous avions des bons produits mais pas de technique, c’était la cuisine régionale de la mamma. »
En 2004, Fabio Bragagnolo part s’installer en Corse, qui lui rappelle son pays, et prend ses fonctions de chef exécutif adjoint au Casadelmar, à Porto-Vecchio, dès l’ouverture de l’établissement. Réputé pour son respect du produit et sa simplicité, il prend les commandes des cuisines dix ans plus tard, en 2014, et réussit à maintenir les 3 toques du Gault&Millau. Son secret ? « Quand nous élaborons un nouveau plat, nous le faisons goûter à notre mascotte (notre fidèle plongeur). Dès qu’il met une fourchette dans la bouche, son visage devient très expressif. » Visiblement, un baromètre particulièrement efficace et fiable !
Pâtissier PACA – Corse – Monaco 2024
Marius Dufay, Mirazur, Menton
Si beaucoup de ses confrères cuisiniers ou pâtissiers expliquent leur vocation par une enfance passée dans les jupes d’une grand-mère cuisinière ou d’un père chocolatier par exemple, Marius Dufay se souvient clairement d’avoir été fasciné par le caractère quasi magique de la pâtisserie : «Dès la classe de quatrième, j’ai su que c’était ma vocation. J’étais passionné d’architecture, et la confection d’un gâteau, à la fois pour sa dimension esthétique mais aussi pour tout le travail autour de la transformation de la matière première, me subjuguait. Je ne retrouvais pas forcément toute cette magie dans le travail du cuisinier.»
Lorsque ce jeune trentenaire est entré chez Ferrandi à la sortie du collège, son parcours professionnel était déjà clairement tracé dans son esprit. «J’ai toujours souhaité pouvoir toucher à tous les aspects du métier de pâtissier au sens large. J’ai travaillé chez Dalloyau, où l’on répétait nos gammes à n’en plus finir. J’ai ensuite choisi d’intégrer le Mandarin Oriental pour découvrir le monde de l’hôtellerie de luxe et y travailler comme chocolatier-confiseur, puis de passer presque une année comme pâtissier “boutique” chez Nicolas Bernardé, à La Garenne-Colombes.»
En 2013, Marius Dufay va connaître une véritable révélation auprès de Christian Le Squer chez Ledoyen. «Cela me conforte dans mon souhait de devenir pâtissier dans un grand restaurant. Pierre Gagnaire, avec qui j’ai travaillé ensuite pendant plus de deux ans à Nîmes, au Duende, va bouleverser tout ce que je croyais comme acquis, par sa vision presque philosophique et poétique de la cuisine.»
Au Mirazur, où il est entré début 2022, Marius Dufay dit avoir trouvé son équilibre auprès d’un chef qui imagine une cuisine en adéquation avec la nature, les produits de saison, les cycles de la Lune. «C’est une approche du métier qui me touche, qui me questionne. Cette quête de sens est essentielle pour moi.» Gault&Millau lui décerne en 2024 le trophée Pâtissier pour la région PACA.
Terroir d’exception PACA – Corse – Monaco 2024
Dan Bessoudo, Dan B., Ventabren
Dan Bessoudo n’est jamais passé par un lycée hôtelier, un cas de figure rarissime pour un cuisinier de sa génération. «Mes parents tenaient absolument à ce que je suive un parcours classique. J’ai décroché un bac économie à la fin des années 1980, tout en sachant pourtant que je deviendrais cuisinier. Ils ont bien fait d’insister, car ce diplôme m’a finalement ouvert des portes plus tard dans ma carrière.»
Une fois son précieux sésame en poche, le jeune Toulonnais intègre l’École des arts culinaires d’Écully (le futur Institut Paul Bocuse, rebaptisé Institut Lyfe), où il apprend les bases du métier avant de se voir proposer de rejoindre Saint-Pétersbourg pour Potel et Chabot. «C’était en 1993, se souvient Dan Bessoudo. L’effondrement du régime communiste était encore récent. C’était un peu le Far West, il fallait se débrouiller pour trouver les produits, organiser les événements, gérer le quotidien. Une période intense pour moi.»
Après avoir officié quelques mois comme cuisinier privé de Claude Imbert (alors directeur du magazine Le Point et membre du gastronomique Club des Cent), Dan Bessoudo rejoint les cuisines de Guy Savoy, puis celles de l’Élysées du Vernet. Mais c’est surtout auprès de Philippe Braun, au Laurent – «un maître du classicisme auprès de qui j’ai beaucoup appris» –, et à Stockholm, où il passe cinq ans dans les cuisines du célèbre Operakällaren, que le Varois va véritablement forger son identité culinaire, entre tradition et innovation.
En 2004, ce passionné des arts de la table («une passion née pendant mes années passées en Suède») rachète la Table de Ventabren, qu’il agrandira quelques années plus tard pour en faire l’une des adresses les plus passionnantes de la région. «Au restaurant, ce qui compte pour moi, c’est de réussir à provoquer une vibration collective. Je travaille beaucoup sur la gestion du stress avec mes équipes et je préfère être en cuisine chaque jour plutôt que courir les plateaux télé.» En 2024, Gault&Millau récompense celui qui PACA n’a manqué que «cinq ou six services» en vingt ans d’exercice de la note de 15/20 (3 toques) et du prix Terroir d’Exception 2024 pour la région.
Accueil PACA – Corse – Monaco 2024
Nicolas Rebrond, L’Ardoise d’Audrey et Nico, Saint-Maximin-la-Sainte-Baume
Nicolas Rebrond a fait ses classes au sein du lycée hôtelier de Toulon. Celui qui, en sortant du collège, se rêvait pâtissier, s’oriente pourtant rapidement vers les métiers de la salle. «J’adore cuisiner, mais, au gré des stages effectués pendant ma formation à l’école hôtelière, j’ai rapidement compris que je m’épanouissais pleinement au contact des clients», confie le jeune trentenaire
Nicolas Rebrond enchaîne les expériences dans les belles maisons de Provence, et passe notamment quelques saisons au sein de la très belle Bastide de Moustiers, dans le groupe Ducasse. «C’est là-bas que j’ai rencontré ma future épouse, Audrey d’Amico. Après quelques expériences communes, nous avons eu l’opportunité de nous installer dans un domaine viticole, à Rousset, le domaine Terre de Mistral.» Ensemble, ils dirigent le restaurant pendant quatre ans.»
Cette longue expérience permet notamment à Nicolas Rebrond d’approfondir ses connaissances en œnologie et au couple d’apprendre à gérer un établissement. En 2019, Nicolas et Audrey se sentent prêts à s’installer et ouvrent l’Ardoise d’Audrey et Nico, à Saint-Maximin-la-Sainte-Baume. «J’étais seul en salle, Audrey travaillait avec un apprenti en cuisine. Nous n’avions pas de terrasse, mais le restaurant marchait tellement bien que nous refusions des clients en permanence. Avec l’arrivée de nos enfants, nous avons décidé de déménager dans un lieu plus spacieux et d’embaucher en salle et en cuisine. C’était primordial pour notre équilibre, notre vie de famille et pour pouvoir améliorer nos prestations.»
Aujourd’hui, Nicolas Rebrond, dont la saine énergie illumine les lieux, accueille une cinquantaine de clients à chaque service, veille sur la délicieuse terrasse installée à l’arrière de l’établissement et sur une cave intégralement constituée de références locales : «8 rouges, 8 rosés, 8 blancs, dont près de la moitié sont proposés au verre, à des tarifs ultra-abordables. Les clients adhèrent, c’est un bonheur quotidien.» Gault&Millau lui remet en 2024 le trophée Accueil pour la région PACA.
Sommelier PACA – Corse – Monaco 2024
Ivan Mandelli, Maison Hache, Eygalières
À bientôt 50 ans, Ivan Mandelli n’a rien de ces sommeliers (trop) sûrs d’eux, de ceux qui confondent morgue et savoir. Cet Italien d’origine aime d’ailleurs rappeler, sans fausse modestie, qu’il n’a jamais travaillé auprès d’un sommelier célèbre, mais qu’il s’est beaucoup inspiré des grands de ce métier. «J’ai beaucoup d’admiration pour David Biraud, Xavier Thuizat et Antoine Pétrus. Je les ai beaucoup observés, notamment sur des vidéos, et j’essaie de m’inspirer d’eux.»
Jeune homme, le futur sommelier de Christopher Hache a rapidement voulu acquérir son indépendance. Plusieurs de ses cousins travaillaient en cuisine, mais lui voulait se démarquer et les métiers de salle l’attiraient. «Au début de ma carrière, j’ai beaucoup travaillé dans des établissements de luxe, en Suisse notamment, à Gstaad, Crans-Montana ou Vevey, tout en alternant avec les séjours en Italie, mais aussi aux Bermudes ou au Royaume-Uni, pour parfaire mon anglais. C’est d’ailleurs au Fairmont Southampton, aux Bermudes, au tournant des années 2000, que j’ai commencé à m’intéresser véritablement au métier de sommelier.»
Après de multiples expériences, Ivan Mandelli entre en 2010 comme chef sommelier chez Denis Martin, à Vevey, l’un des papes de la cuisine moléculaire, où il restera 18 mois, avant de croiser la route de Johan Thyriot (aujourd’hui au Domaine du Colombier) et Émilie Delouye, qui ouvrent MEO, à Tarascon, en 2012. «Une expérience passionnante, dans une maison où tout était à construire.»
Mais c’est évidemment auprès de Christopher Hache, arrivant du Crillon pour reprendre l’ancienne Maison Bru, que le sommelier lombard va véritablement s’épanouir. «Christopher m’a fait confiance et m’a donné carte blanche. J’ai créé toute la cave et, quatre ans plus tard, nous avions plus de 450 références, avec évidemment une prédilection pour les vins du Rhône et de Provence. Il a fallu faire son trou, obtenir les allocations, partir à la découverte des vignerons, goûter, se faire accepter.»
Une expérience évidemment exaltante qui a pris fin – en bons termes – début 2024. Mais ce fils de deux infirmiers a déjà trouvé un nouveau point de chute «tout près d’Eygalières, dans une autre très belle maison». Gault&Millau le récompense en 2024 du trophée Sommelier pour la région PACA.
Tradition d’aujourd’hui PACA – Corse – Monaco 2024
Sébastien Sanjou, Le Relais des Moines, Les Arcs-sur-Argens
Issu d’une famille installée en Bigorre et ancrée dans les métiers de bouche depuis cinq générations, Sébastien Sanjou se lance dans la restauration à l’âge de 14 ans. « Ça a été une grande surprise pour mon père et ma mère mais j’avais ça dans le sang. » À cette époque, ses parents sont propriétaires du Choucas, situé à La Mongie, station de ski pyrénéenne. « Depuis tout petit, je voyais la restauration comme un milieu très difficile. »
Au lycée hôtelier de Biarritz, l’adolescent devient ami avec Xabi Ibarboure, le fils de Philippe, fondateur avec son frère Martin du réputé restaurant gastronomique Les Frères Ibarboure, à Bidart. «Un samedi soir, avant de sortir en boîte, nous sommes passés par la cuisine du restaurant. Son père et son oncle nous ont raconté leur façon de voir le métier. Je suis tombé en admiration. J’ai tout de suite compris que je souhaitais arriver à ce niveau de réflexion.»
Vient ensuite l’heure de faire la tournée des grandes maisons, mais son père veut rendre son tablier. « À 60 ans, il estimait en avoir fait suffisamment. » Sébastien Sanjou rejoint alors ses parents, mais il ne souhaite pas reprendre le restaurant de poissons qu’ils tiennent désormais dans le Var. Le souvenir des frères Ibarboure perdure dans son esprit. Il propose alors à ses parents d’ouvrir un restaurant gastronomique. Non sans difficulté et après avoir essuyé de nombreux refus des banques, il rachète Le Relais des Moines, aux Arcs-sur-Argens, à l’âge de 19 ans à peine. « J’ai fait beaucoup de bêtises, ce que je n’ai pas appris chez les autres, je l’ai appris chez moi. »
Aujourd’hui, Sébastien Sanjou orchestre également les deux restaurants de la Maison Villeroy, à Paris, le Trente-Trois et La Résidence, où il reçoit chaque mois un chef renommé pour mettre à l’honneur la gastronomie d’une région française. Il travaille également à La Voile d’Or, à Saint-Jean-Cap-Ferrat. Ces belles aventures le mèneront prochainement au-delà de nos frontières, jusqu’en Amérique.
Jeune talent en salle PACA – Corse – Monaco 2024
Laura Plestin, La Loge Bertin, Manosque
Née à Lyon en 1987, Laura Plestin a grandi auprès d’une mère au foyer et d’un père travaillant dans le BTP. «Nous avons souvent déménagé pendant mon enfance, au rythme des mutations de mon père. Nous avions la chance de régulièrement fréquenter les bonnes tables et cela m’a toujours plu, même si j’étais loin de penser en faire un jour mon métier», raconte-t-elle.
Les Yvelines, Aix-les-Bains, puis Nîmes, où la famille finit par se fixer. Laura Plestin devient vendeuse en prêt-à-porter dans la capitale gardoise. C’est à cette époque qu’elle rencontre celui qui deviendra son mari, Loïc, qu’elle suit à Paris, où il va tenir plusieurs postes de chef.
«À Paris, je suis restée dans ce milieu de la vente jusqu’à devenir directrice de plusieurs magasins d’un célèbre chausseur. Mais en 2019, nous décidons de nous installer dans le Sud, d’où mon mari est originaire. Je l’ai poussé à ouvrir son premier restaurant, tout en sachant qu’il faudrait que je me jette à l’eau comme directrice de salle, sans la moindre expérience. J’ai eu un serveur à mes côtés dans un premier temps, et je suis seule désormais depuis quelques saisons.»
Les clients louent aujourd’hui son naturel et cette capacité à gérer seule une trentaine de couverts tout en conservant du temps pour chacun. «Je pense que les clients apprécient que je prenne le temps d’échanger avec eux. Je ne suis pas qu’une porteuse d’assiettes.» Gault&Millau la récompense en 2024 du trophée Jeune Talent en Salle pour la région PACA.
Novice en sommellerie à l’ouverture de La Loge Bertin, Laura Plestin s’est progressivement forgé un palais et une culture du vin aujourd’hui assez solide. «J’ai fait le choix de privilégier les vins de la vallée du Rhône, par goût personnel. Mais cette cave est en perpétuelle évolution.
Cuisine des prairies et pâturages PACA – Corse – Monaco 2024
Sébastien Saiz, L’Antonelle, Arles
À Cherbourg, dans les années 1970 à 1990, on travaillait soit à la «Coge» (la Cogema, entreprise du secteur nucléaire), soit à l’arsenal, pour construire des sous-marins. Le père de Sébastien Saiz aurait bien aimé que son fils intègre la filière nucléaire, comme lui, en tant qu’ingénieur. «J’ai fait une seconde générale, je suis ensuite entré en première scientifique, mais c’était contraint et forcé.» Il décide de quitter le lycée classique pour rejoindre le lycée hôtelier et y préparer un bac pro. «J’étais enfin dans mon élément.»
Si le futur patron de L’Antonelle se souvient avec émotion de la «timbale de macaroni à la crête de coq qu’on cuisinait dans le premier restaurant où j’ai appris le métier, à Versailles», c’est vraiment auprès d’Armand Arnal, à La Chassagnette, qu’il a le plus appris. «J’avais fait quelques saisons au Belvédère à Porto-Vecchio, puis aux Fermes de Marie à Megève et au Fitz Roy à Val-Thorens, mais c’est en arrivant chez Armand, au cœur de la Camargue, que j’ai vraiment compris toute la dimension du métier. On y travaillait les légumes du jardin, bio et pas parfaits esthétiquement évidemment, c’était enthousiasmant et formateur.»
Le courant passe tellement bien entre les deux cuisiniers que, après avoir fait l’ouverture de Chez Caro, à Arles, pendant quelques saisons, Sébastien Saiz traverse l’Atlantique pour diriger les restaurants d’Armand Arnal à New York puis Toronto. «Une période passionnante, mais je m’éloignais de plus en plus du métier de cuisinier.» Il revient en Provence en 2018 pour faire l’ouverture de l’hôtel L’Arlatan, à Arles, toujours aux côtés d’Armand Arnal, avant d’ouvrir L’Antonelle en 2019.
Dans ce petit bistrot, celui qui ne travaillera finalement jamais dans le nucléaire s’épanouit désormais en proposant une cuisine de saison à la fois vivante et gourmande. «Poissons et légumes tiennent une place importante dans ma cuisine, mais j’adore travailler la viande. D’ailleurs, l’os à moelle et la côte de bœuf ne quittent jamais ma carte.» Preuve de sa maîtrise, Gault&Millau lui remet en 2024 le trophée Cuisine des Prairies et des Pâturages pour la région PACA.
Éloquence PACA – Corse – Monaco 2024
Marlyne Labbé, Le Mas Bottero, Saint-Cannat
Après avoir obtenu son diplôme en communication à l’IUT Bordeaux Montaigne, Marlyne se forme en alternance, pendant deux ans, en tant qu’apprentie sommelière au Tutiac, Le Bistro Vignerons. Passionnée par le domaine du vin et de la gastronomie, elle suit des cours au CAFA Wine School en parallèle et rédige des piges pour le média Mlle Boit du rouge. Depuis octobre 2023, elle occupe le poste de Chef de rang sommelière au Mas Bottero à Saint-Cannat.