Le Goldert : Une vitrine pour le foie gras d’Alsace

Marcel Meztler est connu pour la bataille qu’il mène depuis 1990 : l’obtention d’une indication géographique protégée (IGP) “foie gras d’Alsace”. Il y œuvre depuis son restaurant, Le Goldert et sa boutique “Le Canoie” à Gueberschwihr (68).

“Le foie gras d’Alsace a un patrimoine historique important”, indique Marcel Metzler. “Même si la production est aujourd’hui insignifiante : 4 tonnes sur 20 000 en France. Surtout que parmi la douzaine de producteurs alsaciens, seuls deux produisent du foie gras d’oie : le foie gras originel alsacien”. Il regrette que la tradition se perde : “En 1800, il y avait 180 producteurs autour de Strasbourg !” Aujourd’hui, le foie gras a la part belle sur la carte de son restaurant Le Goldert à Gueberschwihr et Marcel Metzler vient d’être fraîchement récompensé par trois médailles pour ses foies gras au salon de l’agriculture de Paris.

Rien ne prédestinait Marcel Metzler à cette passion. Né en 1953 d’une maman secrétaire, et d’un papa dans la mécanique, Marcel Metzler débute par un CAP puis un BTS en électronique. Spécialisé dans les radars et les sonars, il fait le tour du monde dans la marine. Puis il arrive à l’auberge “Au vieux pressoir”  restaurant du Bollenberg avec Gabriel Meyer, où il découvre son goût pour la cuisine. En 1976, il passe un CAP cuisine avant de rejoindre en 1978 Joël Robuchon qui est alors chef-directeur du restaurant “Les Célébrités” à Paris. Il le suit l’année suivante lors de l’ouverture de son premier restaurant le Jasmin. Marcel Metzler part ensuite une saison en Allemagne, en Italie, et une en Angleterre avant de revenir à Colmar chez Jean Schillinger
Marcel Metzler, chef du restaurant Le Goldert ©Céline Hans
En 1979, alors qu’il travaille au “Rendez-vous de chasse”, restaurant de l’hôtel Bristol à Colmar, il rencontre Monique, celle qui deviendra sa femme. Pour les fêtes de fin d’année, il transformait déjà 15 kg de foie gras. A la même époque, il passe un CAP confiseur chocolatier glacier. Il rejoint ensuite Monique dans son village de Gueberschwihr pour y ouvrir un salon de thé en 1985. Il y propose ses services en tant que traiteur : “Je cuisinais sur place et pour cela il faut trouver les équipes et les locaux adéquats, nous ne sommes pas des “réchauffeurs””. Mais le fois gras prend rapidement le dessus. “Je me suis rendu compte que ce produit n’est jamais vraiment identique, comme un viticulteur : tous les ans, ses vignes changent”.
Assiette foie gras: “L’assiette des grands crus de foie gras”

“Dans les années 80, le foie gras n’avait pas la même notoriété”, se souvient-il. Et il découvre l’histoire de cette spécialité: “A Gueberschwihr, il y a le Gantzbrunn (le puit aux oies), des personnes s’appellent Gantzer (gardien d’oie). L’origine de ses noms date des années 800, lorsque les paysans avaient l’obligation d’avoir un certain nombre d’oies grasses, au cas où un seigneur en réclamerait”.

 

Salle : Le restaurant compte 35 couverts

Il explique ses choix : ” J’aurais pu me développer à un niveau industriel, mais je ne l’ai pas fait pour ne pas perdre mon âme. Je tiens à mon côté créatif “emmerdeur”. Aujourd’hui, beaucoup recopient plutôt que de créer. On s’intéresse beaucoup au design de l’assiette, on oublie parfois que la majorité des gens viennent dans un restaurant pour y manger”. Il se décrit également comme “anti chutent” : “On ne met pas du cassis dans une bonne bouteille ! ”

En 1989, il est le premier à déposer une marque pour un produit alimentaire, sa spécialité, le foie gras d’oie et de canard : le “Canoie”. “On me croyait fêlé. Pour défendre ce nom, cela a coûté plus cher que ça m’a rapporté. Aujourd’hui, je trouve cela marrant”. Depuis 2006, il est primé tous les ans au concours général agricole pour plusieurs de ses foies gras. Cette année, il a encore décroché trois médailles lors du dernier Salon de l’agriculture.

Le “pavé de Gueberschwihr”, dessert fétiche du chef

Quinze ans après l’ouverture du salon de thé, le couple a l’opportunité d’acheter le local mitoyen. “Je me suis dit que cela serait un show room”. “Le Goldert”, du nom du grand cru qui surplombe Gueberschwihr, restaurant de 35 couverts a donc été ouvert en 2000 et mis aux normes d’accessibilité il y a deux ans. “Je suis Maître-Restaurateur et je fais partie de la chambre des métiers. Je me sens artisan-maître restaurateur, je trouve que cela me définit bien. Tout est fait maison chez nous sauf le pain”.

Marcel Metzler est également maître de la “Confrérie du Presskopf”, et là aussi, il tient à la tradition. “Il faut l’utiliser comme un principe, pas comme une chose. Le Presskopf aussi a une histoire, on peut faire des recettes à la façon presskopf, mais le presskopf au homard, ou au poivron ça n’existe pas”, assure-t-il.

A la carte, Marcel Metzler propose une promenade gourmande et gustative de cinq foies gras passant par du foie gras d’oie au foie gras de canard, du foie gras Canoie, au foie gras d’oie aux figues marinées au gewurztraminer Grand cru Goldert, puis un foie gras truffé. La balade est couronnée par un foie gras de canard fumé sur sa petite salade. Pour ce plat, comme pour tous ses foies gras, il utilise un autoclave pour garantir la traçabilité de la cuisson.

Le secret tient, selon lui, au respect des règles de cuisson avec un temps de 45 minutes. Ainsi, pour un foie gras frais ce sera de 57 à 65°. 65° également pour un frais sous vide qui se conserve au maximum 21 jours.70° pour le mi-cuit, conservé au maximum 42 jours. Le semi-conserve se cuit à 85° pour une conservation de 6 mois à 1 an. Pour la cuisson de la conserve, elle se fait à plus de 103° durant toujours 45 minutes et elle se garde 4 ans. Longtemps puriste, le chef utilisait uniquement le sel et le poivre comme assaisonnement. Sa recette a un peu évolué, mais il tient à garder le secret : “Autour de 12 g de sel, 2-3 g de poivre et 4 épices qui ne ressortent pas trop”.

“Depuis 2 ans, nous faisons du foie gras au torchon avec un vrai torchon à l’intérieur de la verrine, et c’est un carton! Je m’amuse aussi avec du foie gras chaud bientôt avec de la rhubarbe puis des griottes”, précise-t-il. En plus de suggestions régulièrement renouvelées, il propose un menu terroir à 19,50€ avec, bien sûr, un presskopf en entrée, un menu Goldert à 26€, découverte à 35€ et “Autour du foie gras” pour deux personnes à 70€.

En dessert, le “Pavé de Gueberschwihr” au marc de Gewurztraminer est devenu la mascotte du restaurant, et un secret du chef pour sa recette. “Je ne peux plus l’enlever de ma carte, car cela correspond à une anecdote de notre restaurant”, dit-il. En 1985, la commune a fait enlever les pavés durant six mois devant la boutique. Lors des “portes ouvertes” du petit Montmartre (surnom donné au centre du village de Gueberschwihr), en présence de Jean-Marie Bockel, Marcel Metzler, lui offre ce dessert, comme un clin d’œil à la situation en face de son salon de thé. Un trait d’humour qui perdure. …

Par Cécile Hans
Crédit photo ©Cécile Hans et Le Goldert

Restaurant le Goldert
Maison METZLER

2 rue Haute
68420 GUEBERSCHWIHR
Tél. : +33 (0)3 89 49 24 76
www.foiegras-canoie.com/