Jean-Luc Rieger ; du Buerehiesel à la Grange du Paysan

La Grange du paysan, c’est le paradis des charcuteries !

Le restaurant La Grange du Paysan est embusqué à Hinsingen, au fin fond de l’Alsace Bossue, en lisière de notre frontière régionale avec la Lorraine, tel le dernier bastion d’une cuisine du terroir traditionnelle et alsacienne, tenu avec force et brio par le chef Jean-Luc Rieger.

Pour les strasbourgeois, l’Alsace Bossue semble si éloignée de nos contrées citadines. Et pourtant, il serait bien dommage de ne pas s’y aventurer, de découvrir ces routes sinueuses et vallonnées et de faire des haltes, par-ci par -là, dans des granges qui n’en sont pas, chez des paysans qui n’en sont plus.

Mais c’est présentement toute l’histoire des lieux et du savoir-faire des générations antérieures, qui entrent ici en jeu, pour tracer un avenir certain, avec quelques bons tours de mains.

L’ambiance rustico-chic de la salle nous sied à merveille, avec ses portes en fers forgés à l’entrée, ses hauts plafonds boisés, son mur en briques, sa belle cheminée, ses outils paysans accrochés, allant de la fourche, au râteau, de la pelle du palefrenier à la selle de cheval de l’écuyer, et comment ne pas remarquer cette horloge comtoise, qui sonne le rythme du service, qui se veut gastronomique, avec la découpe et le dressage des assiettes sur guéridon, l’argenterie, les chauffe-plats, les seaux à glace, le personnel si attentionné, et de multiples détails qui soulignent la personnalité des lieux, annoncée d’entrée par cette carte des mets, en cuir authentique, couleur vieux bordeaux avec ses inscriptions “gothiques”.

Bienvenue chez le chef Jean-Luc Rieger, qui tire bénéfice d’un parcours professionnel jalonné par de belles maisons renommées pour proposer aujourd’hui, une cuisine vive, incisive, du terroir, bien exécutée qui confère à la Grange du Paysan, une bien singulière personnalité.

Diplômé du lycée Hôtelier d’Illkirch sous ” l’ère du Général Kocher” plaisante-t-il, il s’en va quelques mois en Suisse, revient par Strasbourg, au Pont des Vosges, au Hilton,, puis au Buerehiesel, s’ensuit le Bareiss en Allemagne, poursuivant ses formations chaque année à Nice à la Fondation Escoffier.

“Au commencement, c’était le bistrot du village de mon oncle et en 1948, mon père a repris la licence, créant quelques plats fumés et de bouchers” raconte Jean-Luc Rieger. “Puis en 1968, mes parents ont construit la première grillardiere, cette grande salle avec un immense barbecue central et convivial’ permettant de sustenter plus de 350 invités lors des cochonnailles (33€ avec vins à volonté) et lors des soirées dansantes hebdomadaires. “Il fonctionne avec un tournebroche en bois à l’ancienne” précise le chef, rajoutant “il faut vraiment le voir pour le croire, le porcelet est promené en salle avant d’être grillé”.
La grillardière et son gigantesque barbecue
Ce n’est qu’en l’an 2000, que la grange du paysan devient une ferme-restaurant, avec un tour de main qui fait sensation avec les premières charcuteries fabriquée par leurs soins. La planche dite “paysanne”, pour faire ripaille de victuailles bouchères et de bonnes chairs à saucisse. C’est une explosion de saveurs en bouche, le fumé est exacerbé, la suavité du gras est poussée jusqu’à son paroxysme. Des goûts d’enfance qui nous émerveillent, des souvenirs gustatifs que l’on croyait perdus. Est-ce qu’on en fait de trop ? … oui.. non, qui sait ? Venez vérifier par vous même, si vous l’osez ! La qualité, le goût et l’assaisonnement des saucisses noires, de foie, de viande, nous laissent sans voix.


La tarte flambée et ses gros lardons
Pourtant nos narines sont secouées par cette tarte flambée et ses imposants morceaux de lards “maison,” qui viennent de nous passer sous le nez. Dommage, c’est ce que nous aurions dû commander, mais si choisir c’est renoncer, nous n’allions tout de même pas nous laisser décourager et poursuivons notre embardée paysanne avec sérieux.
La planche alsacienne et ses crudités variées
une escalope de veau “vieille Alsace”
Le chef fait la part belle au savoir-faire fermier de la maison. Choucroute, pot au feu, estomac de porc farci, baeckeoffe, porcelet grillé entier au feu de bois, on ne plaisante pas ! Des fumaisons au fait maison, la carte suggère du saumon fumé, magret fumé en salade, tête de veau, foie de veau grillé ou des quenelles de foie sur choucroute, jambon cuit à l’os, terrine de canard. Plus sérieusement, on entreprend fermement le ragoût de bœuf campagnard et ses buwespaetzles (ndlr : quenelles de pommes de terre au lard), les filets mignons de porc à la crème munster, une escalope de veau “vieille Alsace”, et plus légèrement, vous pouvez sélectionner le filet de sandre, sauce au crémant d’Alsace ou le filet de Saint-Pierre, sauce aux cèpes qui feront très bien l’affaire, des plus fins palais.
ragoût de bœuf campagnard et ses buwespaetzles
Les desserts déclinent toujours l’Alsace avec ses tartes de saison, ses sorbets arrosés, son vacherin et kougelhopf, tous deux glacés.

Une adresse, où l’expression du terroir et des produits fermiers riment avec l’authenticité du goût, mis en exergue par un bon cuisinier qui associe son savoir-faire boucher et charcutier.

Par Sandrine Kauffer
Crédit photos ©Sandrine Kauffer

La grange du Paysan
8, rue Principale
67260 Hinsingen
Tél. 03 88 00 91 83
Menus : 12, 18,50, 30, 35, 45 €


En desserts: sorbets et café liégeois rafraichissent notre palais