Après le succès de la première soirée de lancement des diners organisés par les Grandes Maisons d’Alsace, qui s’est déroulée à la taverne Alsacienne à Ingersheim mettant à l’honneur les 4 premiers domaines (Arthur-Metz, Martin Schaetzel by Kirrenbourg, Ruhlmann-Schutz et Trimbach), un second rendez-vous a remporté un franc succès le jeudi 2 novembre 2017 au Restaurant La Gare à Guewenheim (68) chez la famille de Michel Seidel. Une soirée placée sous le signe des accords mets/ vins alsaciens commentés par Pascal Leonetti avec la présence de Laure Adam, représentant le domaine Jean-Baptiste ADAM à Ammerschwihr, Jacques Cattin, représentant le domaine Joseph Cattin à Voegtlinshoffen, Etienne Sipp, représentant le domaine Louis Sipp à Ribeauvillé et Jean-François Kueny, maitre de Chais du Domaine Domaine Dopff & Irion – Château de Riquewihr.
La gare à Guewenheim fut le théâtre du second diner. “Nous étions agréablement surpris de constater la rapidité avec laquelle la soirée a affiché complet, ce qui démontre l’intérêt de la prestation”, souligne Marie-Paule Sturm-Gilardoni Secrétaire Générale des Grandes Maisons d’Alsace. “Nous avons du refuser une vingtaine de personnes”, rajoute-t-elle. “En effet, nous avons à coeur de conserver une certaine qualité dans les échanges entre les participants. Il est vrai aussi que le prix attractif (50€/ personne toutes boissons comprises) permet de démocratiser ces soirées et de déguster des vins dans des conditions optimales “.
“Les Grandes Maisons d’Alsace ont mis en place des outils de communication. Nous avons réalisé des kakémonos, des flyers, un site internet, un Facebook très actif et des carnets de dégustations remis à chaque participant”, souligne Laetitia Coccorullo. “Et certains participants déjà présents à la première soirée l’ont rapporté pour compléter leur notation.”
Les Grandes Maisons d’Alsace regroupent 31 maisons alsaciennes (liste en fin d’article). A chaque soirée, 4 maisons présentent leur domaine, leur histoire, leur travail du vin.
La soirée animée par Pascal Leonetti, meilleur sommelier de France 2006, fait tour à tour place aux prises de paroles, déclinées comme des mini-conférences, où le vigneron dévoile les caractéristiques de son domaine et le sommelier, fil conducteur de la soirée, énonce la pertinence des associations, mettant en exergue si besoin était, à quel point les vins d’Alsace, sont des vins de gastronomie.
“Ces dîners ont pour but de valoriser les différentes expressions de chaque maison, au moyen d’un menu créé spécialement pour cette occasion, dans l’ambiance conviviale et plaisante d’un restaurant sélectionné pour la qualité de sa cuisine du terroir et sa carte des vins”, précise Pascal Leonetti. “Le succès de cette deuxième édition me conforte dans l’idée que, le message primordial à faire passer, en tout premier lieu, est sur le plan local. En effet, la possibilité de goûter les Vins en présence des Vignerons, dans un contexte privilégié, me paraît être une approche réaliste des Terroirs D’Alsace.”
“Il y a plusieurs façons de déguster les vins d’un vigneron”, poursuit Jacques Cattin. “Bien sur en se rendant chez le vigneron dans les caves pour faire une dégustation horizontale ou verticale ou de manière optimale, bien installé autour d’une belle table pour faire la démonstration que les vins d’Alsace sont des vins de Gastronomie”, souligne celui qui incarne la 13ème génération de vignerons du domaine Joseph Cattin. “Nous sommes situés à Voegtlinshoffen un des plus hauts villages situés sur la route des vins d’Alsace. Nous venons d’inaugurer notre cave dédiée à l’oenotourisme, semi-enterrée avec une vue panoramique de toute beauté”.
Jean-François Kueny, Maitre de Chais chez Dopff & Irion- Château de Riquewihr valorise la puissance exportatrice du domaine réalisant 30% de ses ventes à l’étranger. C’est l’occasion pour lui de mettre en avant la dimension de “garde” du Crémant Pinot Gris et la finesse de ses bulles.
Etienne Sipp du domaine Louis Sipp à Ribeauvillé a salué l’initiative des Grandes Maisons d’Alsace de mettre en oeuvre ces soirées. “Elles ont vocation d’innover et de sortir des accords classiques et iconoclastes. Il faut essayer, tester des associations et pour chaque plat, il y a deux vins, qui, pourtant distincts, ont chacun leur intérêt. Intarissable et pédagogue il a aussi rappelé les trois facettes du Riesling et pourquoi, s’il ne devait en restait qu’un, ce serait le “roi du cépage”. Car, telle une éponge, il s’imprègne du terroir et absorbe ses caractéristiques, son potentiel de garde est remarquable et il se targue d’une belle acidité.
Velouté de potiron
Crémant D’Alsace Brut, Pinot Gris, L’Exception 2010 – Dopff & Irion
“Pour mettre en appétit les convives, je voulais retrouver un effervescent qui avait les caractéristiques du Pinot Gris, (champignons et fruits) pour vraiment coller avec la gamme aromatique du potiron, l’émulsion champignons et l’huile de safran. Avec de beaux amers et une belle persistance, ce pinot gris s’est parfaitement accordé avec les amuse-bouches. ”
“Dans le registre des effervescents, le Pinot Gris, en mono-cépage, est à mon sens, le cépage le mieux à même pour accompagner le velouté de potiron”, annonce Pascal Leonetti. “Et Franck Seidel a eu l’intelligence d’incorporer de l’huile de safran qui a sublimé les arômes de mirabelle, coing, cire-d’abeille. D’une belle structure en bouche, le crémant était remarquable de par sa précision tertiaire, sa tension en bouche, svelte et ciselée, et la finesse des bulles de ce crémant élevé 72 mois sur lattes.
Filet de Bar, écrasé de pommes de terre, sauce vierge
Magnum « Pur de Roche », Riesling, 2013 – Joseph Cattin
Magnum Alsace Grand Cru Osterberg, Riesling, 2012 – Domaine LouisSipp “Pour accompagner le plat de poisson, j’ai choisi 2 définitions de Riesling sur la jeunesse et qui ont été servis en Magnum, ce qui confère une dimension supplémentaire au Roi du Cépage.
Le Riesling « Pur de Roche, 2013 du domaine Joseph Cattin offrait cette gamme d’odeurs juvéniles, d’agrumes, avec un profil équilibré et tendre que j’ai trouvé superbe avec l’écrasé de pommes de terre.”
“Des trois grands Crus de Ribeauvillé, l’Osterberg est celui qui caractérise davantage cette notion de terroir froid. Son profil est remarquable, il met en exergue des notes pierre-à-fusil et agrumes, ainsi qu’une belle minéralité. Il est magnifié par un équilibre de structure de bouche, ciselée et svelte. Avec la présence de la sauce vierge, je recherchais le plus de cristallinité et de pureté possible.
Magnum Pinot Noir Steinbach 2013 – Joseph Cattin
Pinot Gris Letzenberg 2015 – Jean-Baptiste Adam
La volaille fit sensation avec cette dualité mais aussi cette complémentaire que pouvaient offrir un Pinot Noir Steinbach 2013 de chez Joseph Cattin et un Pinot Gris Letzenberg 2015 de chez Jean-Baptiste Adam.
“J’aime à penser que le Pinot Noir est le Grand Cépage d’Avenir en Alsace, à condition qu’il soit planté sur des terroirs argilo-calcaires”, souligne Pascal Leonetti. “Le Steinbach, planté sur des sols ferrugineux, défraye la chronique en demi–muid de 500 litres . Il a une vraie robe de vin rouge, une gamme aromatique franche, un soupçon boisé sur fruits rouges dominants. Steinbach 2013 est une cuvée excellente, avec une maturité des tanins optimale. Quelle élégance de le voir servi en Magnum! ” s’exclame le Meilleur Sommelier de France 2006.
Selon lui, “Un des accords privilégiés de la soirée repose sur l’accord mets/vins des aiguillettes panées au sésame avec le Pinot Gris Letzenberg 2015 de chez Jean-Baptiste Adam. L’aiguillette panée était la pierre angulaire de l’association car le sésame a sublimé le coté toasté du Pinot Gris.
Nous sommes sur un millésime solaire, marqué par un peu de botrytis, qui permet d’obtenir une gamme d’odeurs remarquables, (coings, champignons, mirabelles) avec des dominantes fumées et une pointe de minéralité. En bouche, on apprécie de grands amers minéraux et des registres empirômatiques splendides.”
Alsace Grand Cru Osterberg, Riesling, 2001 – Domaine Louis Sipp
Grand Cru Schoenenbourg, Riesling, 2000 – Château de Riquewihr, Dopff et Irion”Après avoir déterminé le fromage, je voulais mettre en exergue l’évolution de grands Rieslings. On fait un bond de 16 ans sur l’Osterberg qui a remarquablement démontré combien les grands terroirs d’Alsace vieillissent bien. 2001 est une superbe année sur le botrytis, qui présente un registre riche, des notes tertiaires sur la naphte, pierre à fusil, agrumes confits, gingembre. En bouche, il est agréable de relever ce coté tendre en attaque, pour finir en fraicheur avec une tension minérale splendide. “C’est ce vin qui a fait le lien et l’accord avec le pain aux fruits et le chutney mirabelle. Mais je recommande de proposer, dès que possible, un pain blanc, le plus neutre possible.”
Gewurztraminer Sélection de Grains Nobles 2013 – Jean-Baptiste Adam
“Le botrytis surpassait le caractère variétal du Gewurztraminer et l’emmène sur des variantes du cépage. J’aime son niveau de liqueur qu’on est en droit d’attendre sur ce type de vins liquoreux, avec de la rondeur, de la pulpe et de la concentration. Son soyeux et sa plénitude en bouche me font rêver. Cette association colle à merveille avec la pomme servie tiède. J’ai demandé au chef de rajouter une glace cannelle aux épices de Noël pour deux raisons : la cannelle est stratégique avec ses arômes en surmaturité, mais surtout la glace créé avec la liqueur du vin, un choc thermique qui permettait d’équilibrer l’ensemble. Et pour finir, le caramel marche du tonnerre avec le Gewurztraminer.
Pascal Leonetti a profité de la qualité de l’auditoire, pour rappeler l’importance de la verrerie. “Afin que les vins soient dégustés dans les meilleures conditions, il faut y associer une qualité de verres. Elle est indispensable pour capter la définition du terroir et le travail des vignerons”, assure-t-il.
Le prochain diner est déjà programmé au 7 février 2018 chez Matthieu Koenig, à l’arbre vert à Berrwiller.
Par Sandrine Kauffer
Crédit photos ©Sandrine Kauffer
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