De l’informatique à la brigade de M. Paul, le chef isérois du Domaine des Séquoias, propriété datant de 1840 à Ruy-Montceau (38), a succombé à sa passion après un passage chez Paul Bocuse, « J’ai commencé un lundi, je n’ai jamais arrêté ».
Fervent défenseur de la tradition culinaire française, Éric Jambon surprend pour mieux séduire. Rencontre avec le chef étoilé.
Restaurant sans carte, démarche intellectuelle, la cuisine d’Eric Jambon, chef 1 étoile du Domaine des Séquoias, surprend pour mieux séduire. Si l’on ne choisit pas ce que l’on va déguster c’est pour mieux se laisser guider dans un voyage initiatique et savoureux au cœur du produit et de la cuisine moderniste. Chef passionné, défenseur de la tradition culinaire française, Eric Jambon a participé, les 21 et 23 mars derniers, à la préparation de 2 dîners exceptionnels dans le cadre de l’opération Good de France 2018 à l’ambassade de France à Madagascar en présence de Madame l’Ambassadeur à Antananarivo, Véronique VOULAND-ANEINI.
Par cette action le chef a contribué au rayonnement de la gastronomie française dans le monde et fait un joli clin d’œil à Paul Bocuse, son mentor, auquel cette 4ème édition à rendu hommage.
Démarche…
Faire sens est une quête perpétuelle, à la genèse de la conception intellectuelle de la cuisine d’Eric Jambon. Un plat bien cuit, bien assaisonné n’est pas un aboutissement ni même un commencement, c’est une constante obligatoire. « De par mon parcours, je suis un des rares, avec Thierry Marx, à avoir cette démarche-là, une démarche intellectuelle ». La cuisine d’Eric Jambon explore des pistes telles que l’intention, l’inconscient, les chiffres. Un symbolisme cohérent et réfléchi qui raconte une histoire toute en saveurs.
« Un plat cohérent du point de vue de l’intention et de la démarche intellectuelle est toujours approuvé par le client. »
L’intention…
De l’énergie créatrice initiale jusqu’au dressage final, l’intention est cette part imperceptible qui va faire appel à l’inconscient et ainsi donner tout son sens à un plat.
« L’intention c’est ce que l’on va produire comme énergie, comme réflexion pour penser une recette. »
L’inconscient…
Notre inconscient se régale des intentions produites par le chef. Nos réflexes olfactifs et visuels entrent en action. Découvrir l’œuf, associé au foin et servi avec du maïs et une crème de poulet, c’est découvrir inconsciemment une histoire écrite sur-mesure, chapitre par chapitre : le maïs, la poule, l’œuf. La boucle est bouclée.
« Quand on a touché le client au niveau de son inconscient, c’est gagné. »
Les chiffres…
Ils sont une autre manière d’exploiter le symbole et l’inconscient. Les dressages sont souvent basés sur 3 éléments, car le symbolisme du 3 est universel, c’est la trinité. Les mignardises sont au nombre de 5, en référence à l’humain car le 5 représente les 5 sens, les 5 doigts de la main. Et terminer un repas sur « l’humain » est hautement symbolique. Le chiffre 7 se retrouve lui aussi dans la cuisine du chef pour rappeler les 7 continents.
7,9,11…
Ici pas de carte. Les clients ne choisissent pas ce qu’ils vont manger mais juste un nombre, celui des plats, 7,9 ou 11.
L’idée : s’abandonner, se laisser guider sur un chemin cohérent, pavé d’intentions culinaires mûrement réfléchies. S’affranchir de la carte a été un vrai défi mais correspond à une intime conviction.
« S’affranchir de la carte permet de raconter une histoire, de faire commencer les gens par le commencement et finir par la fin. »
« En conservant la carte et en m’obligeant à respecter des conventions, je n’étais pas dans ma nature ». Un voyage à New-York, une « grosse claque » aux codes, un autre au Japon, des rencontres, et c’est la révélation, la confirmation de toutes ses convictions profondes.
Se faire confiance et être intimement fidèle à soi-même. Sans carte, libre au chef de provoquer la surprise et d’initier la découverte. Un début, un milieu, une fin, des saveurs pour chaque moment et un ensemble harmonieux.
Moments…
Fini le classement par région. La carte des vins du Domaine s’habille d’une nouvelle écorce pour s’ouvrir à d’autres horizons. « Au fond on s’accorde un verre de vin pour satisfaire le plaisir du moment immédiat ». Moment d’une balade dans les champs de lavande, féérie de Noël en Alsace, retour de chasse au son des cors, moment d’un petit verre de rouge ou simplement moment d’un rosé rafraîchissant.
« Les vins sont des moments, des moments où l’on a envie de se faire plaisir. »
Locavore…
Les menus du chef sont tous confectionnés selon la disponibilité des produits de ses producteurs. Pour les légumes, c’est Gilles Douillet le chef d’orchestre. A seulement 15 km du Domaine des Séquoias, ce maraîcher à l’ancienne, fier de son agriculture biologique, produit 82 variétés de légumes aux saveurs authentiques. Eric Jambon ne lui a donné qu’un seul mot d’ordre : « tu me ramasses ce qui te parle ». Les fromages sont issus du lait des 140 chèvres de Sylvie et Thierry Gabriel. Les poissons d’eau douce viennent de la ferme piscicole de Gérald Faure, les poissons d’étang de la Dombes. Quant aux herbes, il suffit de se baisser pour les ramasser dans le parc du Domaine.
« Je m’appuie sur des producteurs locaux passionnés, attachés à la qualité de leurs produits. »
Du clavier au piano
Destin… C’était écrit. Avec un oncle et un cousin cuisinier, une mère lyonnaise attachée à ses fourneaux, la configuration astrale d’Eric Jambon avait certainement une forme de casserole. Ses premières amours l’emmènent pourtant du côté de l’informatique puis du web. Et c’est avec cette carte qu’il fait la connaissance de Paul Bocuse. Missionné pour créer son site internet, une relation privilégiée s’installe entre les deux hommes. Passion du weekend, la cuisine finit par submerger Eric Jambon, au point qu’il annonce à M. Paul vouloir rejoindre sa brigade. « Viens quand tu veux, avec les ongles propres et les cheveux courts ».
« J’ai commencé un lundi, je n’ai jamais arrêté »
« Ce qui devait être un vaccin définitif contre ce qui commençait à me ronger eu l’effet inverse. J’arrivais le premier et partais le dernier, j’ai dévoré tout ce que j’ai appris là-bas ». Dès lors, exit le clavier et place au piano. Après l’acquisition du Domaine des Séquoias en 2004, il aura fallu seulement 10 ans à ce chef atypique pour accrocher son étoile au firmament de la gastronomie française.
« Je cuisine toujours pour mes clients comme je cuisine pour mes amis. »
Ce tout nouveau salon berjallien a vocation d’être annuel, tous les week-end de la semaine du goût. Il vise à valoriser les produits et producteurs locaux, l’agriculture, invite à la redécouverte du gout et met en avant l’excellence des chefs du Dauphiné. Au programme : Concours de la meilleure brioche berjallienne, concours du meilleur apprenti charcutier, mise en place d’une cuisine éphémère avec 6 chefs étoilés de l’Isère et métropole de Lyon qui valoriseront un produit du terroir, soirée et dîner étoilé toujours avec les chef, cours de biérologie, de café et de thé, ferme pédagogique pour les animaux du territoire, tente « aux paradis des enfants », transhumance en centre-ville avec un éleveur de mouton qui emmènera son troupeaux jusqu’au salon.
Il participera également à la 3ème édition de la fête du Murçon le 15 août 2018 à la Mûre en partenariat avec la Confrérie du Murçon. Au programme : concours de fabrication de brouquetons (sorte de croquettes de pomme de terre), concours de pogne et tourte, revisite du Murçon (saucisson à cuire de la Mûre) par 3 chefs dont Eric Jambon, qui sera intronisé par le Grand Maître de la Confrérie du Murçon Matheysin le 14 mai prochain au Moutain Lodge des Séquoias à la Salette-Fallavaux.
La Boutique du Domaine des Séquoias
Bonne adresse pour tous les épicurieux et fins gourmets en quête de bon et de beau, la boutique, ouverte le 1er décembre 2017, accueille le public toute l’année derrière les portes du Domaine des Séquoias. Une épicerie Fine, artisanat & art de la table, où se côtoient créations gourmandes et produits d’exception sélectionnés avec soin par Eric & Stéphanie Jambon.
Le chef étoilé Eric Jambon joue la carte de la gourmandise avec ses créations faciles à emporter : saumons fumés et foies gras, confitures et pâtes à tartiner, sablés et chocolats. Stéphanie Jambon a quant à elle sélectionné des épices rares et thés aromatiques, une superbe gamme d’art de la table ainsi que des bougies précieuses, parfums d’intérieurs, savons et crèmes. Chic et éthique, la boutique présente également des foutas et serviettes en coton naturel, des beurres de karités artisanaux issus du commerce équitable.
Fin 2018, le Domaine de Séquoias entreprendra des travaux de modernisation et offrira un nouveau visage à la salle de restaurant avec changement de mobilier, en valorisant la pièce tout en restant dans l’esprit d’une Maison de Maître (Domaine datant de 1840).
