Laurent et Marco Arbeit, photo archive ©Sandrine Kauffer-Binz

Décès de Marco Arbeit de l’Auberge St-Laurent à Sierentz

C’est avec beaucoup de tristesse que nous vous annonçons le décès de Marco Arbeit, de l’auberge Saint-Laurent à Sierentz, qui nous a quittés dimanche matin, le 8 septembre 2019.

Les obsèques auront lieu cette semaine le jeudi 12 septembre 2019 à 14h30 à l’église du village juste en face du restaurant L’auberge Saint-Laurent à Sierentz (68)
Les professionnels sont invités à venir en veste blanche de cuisiniers

Il semblait indestructible, solide comme un roc, toujours optimiste, et pourtant, Marco Arbeit, s’est éteint paisiblement ce dimanche matin, sur son canapé, le regard posé sur son jardin. Un dernier baiser d’Anne son épouse, et il s’endort à jamais, entouré de ses enfants et ses amis chasseurs. « Il est parti comme il était », témoigne Laurent son fils. « Il était à la chasse samedi soir et il devait déjeuner avec maman ce dimanche chez Matthieu Koenig».

Mais, le sort en a décidé autrement, il s’en est allé dimanche au petit matin, «digne, beau, en jeans et chemise à carreaux légèrement entre-ouverte, il avait bonne mine. Même dans cet instant, mon père avait la classe ! », sourit Laurent, son fils.


Décès de Marco Arbeit de l’Auberge St-Laurent à Sierentz
« C’est l’image que je retiendrais de lui. Je suis fier de mon père, de son parcours, je l’admire. Il était entier, cohérent, droit, avec beaucoup de charisme, et il a gardé sa prestance jusqu’au bout. Il ne s’est jamais laissé abattre par la maladie.
Combattif, toujours optimiste, il ne s’apitoyait jamais », confie Laurent. « Il est mort « debout !».


Anne et Marc avec Gérard Goetz en 2010 lors d’un événement
Le chagrin lourd, emporté par l’émotion, Laurent se remémore la dernière soirée de chasse de son père, avec ses bons amis, puis Marco passe au restaurant sur le retour, chaussé de ses bottes, dire bonsoir, taquiner le personnel et dire à son fils qu’il prépare les petits-déjeuners, dimanche matin, déposant une larme de Lagavulin pour parfumer ses lèvres pour la nuitée.

« C’était un bon vivant, un boute-en-train », témoigne Fernand Mischler, qui prendra la parole jeudi. « C’est un ami qui est parti. Avec lui, c’étaient les copains d’abord. Il avait du panache, il aimait la vie, toujours optimiste, même face à la maladie. Il s’était relevé d’un grave accident de voiture qui l’avait laissé pour mort en 1972, d’un malaise cardiaque en 1981 et d’un triple pontage du cœur dans les années 2010. Il semblait à toute épreuve».


Marco Arbeit avec sa fille Marie et son fils Laurent
Les obsèques auront lieu dans l’Eglise Saint-Martin de Sierentz, face au restaurant. Dans son enceinte, les sonneurs de trompes ont, maintes fois, claironné leur exaltante musicalité, pour sonner le glas du gibier, jadis chassé à courre. Marco adorait la chasse et organisait les festivités et le menu de la St-Hubert les 3 novembre.

Marco Arbeit, portait parfaitement son patronyme. Bâtisseur et entrepreneur, il fourmillait d’anecdotes sur les travaux qu’il pouvait décider, quasiment au pied levé. Il aimait raconter qu’il avait agrandi sa cuisine en 15 jours, au lieu de partir en vacances. Ses yeux brillaient malicieusement à l’évocation de ces souvenirs. Hyperactif, il cassait, démolissait, agrandissait et surtout reconstruisait, souvent après les heures de services. Le travail ne lui faisait pas peur, bien au contraire


Avec Anne Arbeit son épouse (photo Fb/Archive)
Né en 1952 à Sierentz, Yvonne et Laurent, ses parents avaient acheté en 1956 le restaurant “la Couronne”, plus tard rebaptisée « l’auberge Saint-Laurent ».

En 1972, ils cèdent le fonds de commerce aux enfants et demandent à Marco d’en prendre la gérance. Il avait seulement 20 ans et à l’époque ils ont dû l’émanciper pour prendre ces responsabilités Ni l’incendie en 1977, ni son grave accident de voiture le 21 juin 1977, ne viennent à bout de sa pugnacité. Plongé dans un coma profond pendant 15 jours, avec de multiples fractures au crâne et des lésions au poumon, il fut diagnostiqué “mort cliniquement”.
Sans doute depuis ce jour, qu’est née sa conviction “d’indestructibilité.”

En 1982, Anne et Marco Arbeit rachètent l’auberge Saint-Laurent. Le restaurant complète son offre d’un hôtel et décroche une étoile au guide Michelin en 2000.


Laurent et Marco Arbeit
« Je me souviens qu’il m’avait appelé tôt le matin pour m’annoncer qu’il avait gagné son étoile », se souvient Marc Haeberlin, chef de l’auberge de l’Ill. « Il est encore venu diner il y a trois semaines, il souffrait mais il avait beaucoup de volonté. C’était un bon vivant et un épicurien. Nous perdons un excellent cuisinier et un ami de très longue date. Il a fait de son auberge St-Laurent, un haut lieu de la gastronomie. Il a confiance en Laurent », poursuit Marc Haeberlin. « Il nous avait confiait son fils pour faire son apprentissage, nous disant: « tu peux y aller avec lui, il est habitué à travailler, mais ce n’était pas utile, car Laurent avait de qui tenir »…..

Le duo père-fils va se former en cuisine dans les années 2010.
De retour du Louis XV à Monaco, Laurent prend conscience de la difficulté d’être restaurateur en plus d’être cuisinier. «De ce jour, j’ai eu un autre regard sur le travail de mon père. J’étais très admiratif, et même impressionné par tout le travail qu’il était capable de fournir », confiait-il.


Regis Bel et Laurent Arbeit ©A.Mantzrer
Marco Arbeit était secondé par Régis Bel, « qui fut le trait d’union entre mon père et moi », mentionne Laurent «Et le mur porteur des saveurs du Saint-Laurent. Il a travaillé 25 ans avec papa et depuis deux ans, il a pris la cuisine du bistrot d’A Côté. Il fait partie de la famille ».

« J’ai perdu un patron, mais j’ai aussi perdu un père », confie Régis Bel. « J’ai passé beaucoup de temps en cuisine avec Marco et comme ma famille était loin, Anne et Marco m’ont beaucoup aidé, mon beaucoup appris aussi dans la vie. En cuisine, certains jours, Marco était comme une tornade, il pouvait pousser des coups de gueule, mais il était toujours juste avec nous. Ca filait droit, il aimait le travail bien fait et la régularité. Et puis il était généreux, dans la vie comme dans sa cuisine. Il disait toujours, « rajoute de la sauce, met plus de sauce », la fameuse « white sauce », sourit Régis (sauce blanche du poisson). Il m’a transmis les valeurs du partage et de la générosité. La famille Arbeit m’a toujours donné beaucoup d’amour”.

Témoin de 25 ans d’évolution culinaire, Régis se souvient du mythique sandre et sa fondue de poireaux avec la fameuse sauce « White », le panaché de poissons, ou encore le filet mignon de porc en croûte, sauce aux champignons. Bien sûr, le chasseur qu’était Marco préparait le chevreuil en filet ou en civet, servi avec une belle sauce et des spatzlés.

Régis s’attriste, il ne lui préparera plus son tartare de bœuf bien relevé avec un supplément d’anchois. Il aimait la crème caramel, le mille-feuille et pour lui faire plaisir, on pouvait lui offrir un St-Honoré de chez Jacques à Mulhouse. Son foie gras de canard et confit de choucroute, lui est resté fidèle sur la carte de l’auberge St-Laurent, victime de son succès


photo de famille avec les enfants et les petits-enfants : Laurent, Auguste, Marco, Jules, Anne, Louis et Marie
Marco Arbeit, figure emblématique de la cuisine alsacienne, doit savoir qu’il peut compter sur Anne, Marie et Laurent pour poursuivre l’œuvre familiale, observant depuis les étoiles, si Jules, Louis et Auguste vont rejoindre l’aventure, imprégnés par le récit fantastique des histoires de leur grand-père.


Toute l’équipe du journal présente ses plus sincères condoléances à Anne Arbeit, son épouse, Marie sa fille, Laurent son fils et toute leur famille.

Par Sandrine Kauffer-Binz
crédit photos ©Sandrine Kauffer-Binz ©A. Mantzer, ©Etoiles d’Alsace ©Bis & For


Avec les sommeliers de l’ASA


Marco Arbeit avec Gérard Goetz et Marc Wucher au congrès des MCF en Alsace
Marco Arbeit avec Gérard Goetz et Marc Wucher au congrès des MCF en Alsace
Il répondait toujours présent pour participer aux banquets et événements des associations professionnelles, ici au parc à Obernai pour préparer le congrès des MCF


Laurent Arbeit, chef de l’année de Gilles Pudlowki