Alors que Jacques Bally faisait sa première “sortie officielle” en tant que président le 11 février 2019 à Kaysersberg, c’est également l’Alsace qui est le théâtre de ce renouveau au Gault et Millau. En effet, Zakari Benkhadra, nouveau Directeur Général du Gault & Millau France, nommé le 18 septembre 2020, se présente pour la première fois aux équipes du guide jaune, à l’Auberge de l’Ill, chez la famille Haeberlin, le 21 septembre pour le palmarès du Gault&Millau Tour Grand EST 2020.
La cérémonie, animée par Marc Esquerre, directeur des sélections, a dévoilé le palmarès, ponctué de différents ateliers culinaires et interviews des chefs. Romuald Fassenet succède à Frédéric Doucet et remporte le Gault & Millau d’or Grand Est 2020.
Découvrez l’entretien avec le nouveau directeur général Zakari Benkhadra, le nouveau palmarès et ses nouveautés : le trophée de la solidarité récompensant l’engagement d’un chef lors du confinement et le concours d’éloquence. Les trophées Pop, transmission et naturalité n’ont, quant à eux, pas été reconduits cette année.
Zakari Benkhadra “éthique et certification des enquêtes”
Formé à la gestion, celui-ci commence sa carrière dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration (Hyatt Hôtel). Il se dirige ensuite vers le marketing et le conseil (Young & Rubicam) avant de poursuivre dans l’univers de lifestyle (Souleiado) ; puis de naviguer entre le Groupe Vivendi, la direction du développement de Paris Expo et la Direction Générale de Saint Clair le traiteur.
En 2007, Zakari Benkhadra prend la tête d’Alain Ducasse Education et participe à la création du 1er Master de Pâtisserie Française et du Salon de la Pâtisserie. En 2018, il fonde l’Institut Culinaire de France dont il structure l’ingénierie pédagogique et les partenariats institutionnels.”Tout nouvellement nommé à la Direction Générale de Gault&Millau, je suis ravi que mes premiers pas m’amènent en région. Le Gault&Millau Tour est de ces rendez-vous fédérateurs, conviviaux, inspirants qui nous permettre de rendre hommage aux chefs que nous avons découverts partout en France”, souligne Zakari Benkhadra.
“Cette nomination est un honneur”, confie-t-il, “celui de gérer, piloter le 2ème guide gastronomique mondial et de le développer sur d’autres continents, en Afrique par exemple. […] Je ne vais pas balayer ce qui a été fait et je considère la responsabilité qui m’est confiée. C’est pour autant, une responsabilité collective, car avec les équipes, nous allons “faire” ensemble. Je serai un chef d’orchestre”, mentionne celui qui a créé le salon de la pâtisserie et qui projette d’amener le Gault et Millau davantage dans l’univers du sucré.
“Je suis un coach”, précise Zakari Benkhadra. “J’ai toujours conseillé de grands chefs. Je suis un vieux loup de la gastronomie et j’ai la volonté de mettre les jeunes en avant, transmettre et former, être un mentor. Il ne doit pas y avoir de “vide” dans la transmission du savoir-faire entre les générations.”
Enfin, les enquêtes et notations seront au cœur de son action.
i[“Nous allons remettre à plat les enquêtes, et certifier la méthodologie des notations. Nous sommes un guide public, nous allons donner plus de transparence aux toques et aux notes, afin qu’elles soient incontestables et incontestées. Nous veillerons également à une disciples budgétaire. […] mon rôle est aussi de répondre à la demande des investisseurs et de redonner de la crédibilité au guide.”]i
PALMARES du Gault&Millau Tour Grand EST 2020
Avec cette année, un trophée inédit, celui de la solidarité récompensant l’engagement d’un chef lors du confinement et le concours d’éloquence.
Les trophées Pop, transmission et naturalité n’ont pas été reconduit cette année.
” Romuald Fassenet est une personnalité incontournable du paysage gastronomique national”, souligne Marc Esquerré. “Longtemps considéré comme un trublion par sa cuisine originale et personnelle, il règne aujourd’hui, avec son épouse Catherine, sur une véritable institution qu’est ce beau château du Mont Joly, bâtisse du XVIIIe aux prestations de haut niveau.
Passé par Lameloise et Klein, Pierre Irion, qui œuvrait jadis au Domaine du Lac à Guebwiller puis à Côté Lac à Schiltigheim, s’est installé avec sa compagne Élodie Dreher dans cette maison à colombages nichée au cœur du vieux Schilik, baptisée l’Imaginaire. Sa cuisine se distingue par sa clarté et son extrême franchise, s’appuyant sur d’excellents produits. Pierre reçoit notre trophée des Techniques d’Excellence et Elodie Dreyer le trophée de l’accueil. Un coup double pour ce jeune coupe qui ont ouvert il y a deux ans à peine.
Le trophée Tradition d’Aujourd’hui a notamment travaillé aux côtés d’Emile Jung]et de Fernand Mischler. Une belle table, un très bon chef, Jean-Michel Loessel, des idées qui se renouvellent en gardant leurs fondements, produits nobles toujours magnifiés, ça ne fait pas des menus bon marché, mais cela donne un lieu où l’on est sûr de se régaler.
A la limite de la Champagne, cette grande et haute maison de maître possède bien des atouts, charme bucolique et restaurant de belle allure. Aux commandes du Château de Courban, Takashi Kinoshita propose une cuisine raffinée et savoureuse s’appuyant largement sur les produits bio. Son travail sur les poissons est remarquable, ce qui lui vaut notre trophée Cuisine de la Mer. Et comme cette belle maison a décidément le nez creux dans ses recrutements, c’est à Sae Hasegawa que nous décernons notre trophée Pâtissier, pour ses desserts alliant avec bonheur saveurs d’Orient et d’antan. Un second coup double pour une maison sur ce même palmarès.
Guillaume Besson est un funambule attachant, souvent sur le fil de l’inventivité, d’une cuisine nouvelle et donc forcément un peu risquée, tout en gardant les pieds sur terre et même dans la terre. Il a rapidement rejoint le cercle fermé de nos trois toques.
Il y a le lieu et l’environnement bien sûr, le village secret avec ses rues pavées, son hôtel de ville idyllique, ses remparts, les vignes et la Route des Vins d’Alsace. Une carte postale. Andrea Martin y ajoute quelques pages gourmandes. Ce chef formé à l’école Alma, chez Massimo Bottura et Jean-Luc Brendel, ne propose que du sérieux, du professionnel avec un souci de gourmandise permanent. Il repart chez Animus, à Bergheim avec notre trophée Jeune Talent.
Sylvie Grucker (Le Pressoir de Bacchus à Blienschwiller) a toujours la main adroite et les idées larges pour adapter le terroir à sa manière. Avec son fils Kevin, formé notamment à Frankenbourg et chez Nasti, elle avance en terrain sûr. Produits de saison arrangés avec talent, carte renouvelée avec imagination, jolis dressages (un beau foie gras, une truite saumonée, un pigeon de concours…), on est bien dans un pressoir original et novateur. Sylvie reçoit le trophée Terroir d’Exception.
La Maison des Têtes est un lieu particulièrement festif et gourmand et la cave, forgée par le patron, très connaisseur, est absolument remarquable. En salle, pour la commenter et la conseiller, il fallait un sommelier de bon niveau. Pour son remarquable travail, Maxime Lucas reçoit le trophée Sommelier.
Pauline Schohn est encore jeune mais déjà promise à un brillant avenir. Au sein de la très belle Villa Lalique, à Wingen sur Moder, elle accomplit un travail remarquable dans l’équipe drivée par Patrick Meyer. Pauline reçoit le trophée Jeune Talent Service en Salle.
Au plus fort de l’épidémie de COVID, Gérard Goetz s’est, comme d’autres chefs un peu partout en France, particulièrement investi, notamment auprès du personnel soignant militaire à Mulhouse. Le chef du restaurant Julien, à Fouday, reçoit le trophée Solidarité, qu’il partage avec son chef Jean-Jacques Klein et son gendre Laurent Arbeit.
GAULT ET MILLAU D’OR Romuald Fassenet – Château du Mont Joly 3 toques 15/20
Romuald Fassenet M.O.F est une personnalité incontournable du paysage gastronomique national. Longtemps considéré comme un trublion par sa cuisine originale et personnelle, il règne aujourd’hui, avec son épouse Catherine, sur une véritable institution qu’est ce beau château XVIIIe et ses prestations de haut niveau.”Après 13 ans installés au Château Mont Joly – notre 3ème enfant comme le dit souvent Catherine mon épouse”, mentionne Romuald FASSENET, ce trophée du Gault & Millau d’Or arrive comme une formidable cerise sur notre gâteau. Et je me dois de remercier tout d’abord, au-delà de ma femme et ma famille évidemment, toutes les équipes, actuelles ou passées, qui ont aidé à l’obtention de cette distinction, puis les producteurs et éleveurs, si fidèles et engagés à mes côtés, sans oublier bien entendu, ceux pour qui tous nos cœurs battent au quotidien, nos clients, les véritables moteurs de notre motivation à tous. Depuis deux années, avec Catherine, nous avons fait le pari d’entamer de nouveaux investissements et d’affirmer encore plus nos choix et nos valeurs. En salle, des travaux ont permis ainsi de créer une atmosphère encore plus cosy et chaleureuse, avec un travail sur la lumière et l’acoustique par exemple afin d’offrir du bien-être à nos hôtes. L’équipe s’est renforcée autour de notre fidèle assistant Christophe et, par sa bonne entente, contribue aussi à créer des instants agréables pour tous”, ajoute Romuald. “Enfin, en cuisine, je crois que, ces dernières années notamment, j’ai mis de côté les derniers doutes qui parfois m’habitaient. Ma signature est désormais parfaitement assumée qui mêle technique et rigueur, travail des jus et des sauces sur les plus belles bases de la tradition tout en allant chercher la modernité et l’innovation dans les harmonies de parfums. Le respect du produit a toujours été mon credo et, encouragé par les retours positifs des clients, j’ai trouvé un moyen de simplifier encore mon style pour le rendre plus lisible et permettre une véritable explosion des goûts” explique le Chef, Meilleur Ouvrier de France. “Aujourd’hui, j’ai la sensation que, d’une certaine manière, l’audace a payé. Cette distinction va nous permettre de continuer, investir, oser et encore évoluer je l’espère. Plus que jamais, j’ai un plaisir extraordinaire à cuisiner et recevoir, chez moi, avec ma cuisine. Que du bonheur”, conclut Romuald.
GRAND DE DEMAIN : GUILLAUME BESSON – LES FUNAMBULES 15/20 3 toques
L’avis du Gault et Millau dans le guide
Guillaume Besson est un formidable funambule attachant qui réussit la performance d’être à la fois sur le fil, de l’inventivité, d’une cuisine nouvelle et donc forcément un peu risquée et d’avoir tout à fait les pieds sur terre et même dans la terre. Car ses liens avec les producteurs locaux se renforcent chaque jour, et constituent l’épine dorsale de sa cuisine et même de la prestation toute entière dans cette maison élégante et sobre entre l’avenue de la Forêt Noire et le parc de l’Orangerie. C’est la cueillette, l’arrivage du matin ou de la semaine qui déterminent les beaux menus créés pour ces fins dîners, à 54 € en 4 services, ou à 63 € avec deux assiettes supplémentaires.
En salle, Jean-Baptiste Becker virevolte avec ses bouteilles, issues d’une cave éclectique aux très bonnes références régionales (Mochel, Rietsch, notamment). Depuis une année, l’équipe de salle est complétée par Victoire.
JEUNE TALENT : ANDREA MARTIN- ANIMUS 13/20 2 toques
L’avis du Gault et Millau dans le guide
Il y a le lieu et l’environnement bien sûr, le village secret avec ses rues pavées, son hôtel de ville idyllique, ses remparts, les vignes et la Route des Vins d’Alsace. Une carte postale. Andrea Martin y ajoute quelques pages gourmandes.
Ce chef formé à l’école Alma, chez Massimo Bottura et Jean-Luc Brendel, ne propose que du sérieux, du professionnel avec un souci de gourmandise permanent. Ses plats collent à l’esprit bistrot gourmand : saumon mariné souligné par la fraîcheur végétale du radis daïkon et rehaussé par la crème de wasabi, œuf bio parfait, épinards, crème de parmesan et chips de jambon pleines de peps. En plat principal : très beau bar rôti avec précision, tagliatelles à l’encre de seiche, crème de moules de la baie du Mont-Saint-Michel et persil frit, ou bien poitrine de cochon laquée fondante, avec sa purée de pommes de terre et ses chips de topinambour, accompagnée d’une sauce un peu trop sucrée. On conclut avec la trilogie de chocolats, crémeux au chocolat blanc, espuma de chocolat au lait, crumble de chocolat noir, fève Tonka pas trop sucrée, ce qui est rare. Par contre la torche aux marrons revisitée est un peu trop ferme à notre goût. Supervisé par Julie Martin Brendel, le service de Cédric Furstenberger ne manque pas d’empathie.
TRADITION D’AUJOURD’HUI : JEAN-MICHEL LOESSEL – LES SEMAILLES 14,5/20 2 toques
L’avis du Gault et Millau dans le guide
Le spinacker est sorti et le vent est favorable aux Semailles. Une belle table, un très bon chef, des idées qui se renouvellent en gardant leurs fondements, produits nobles toujours magnifiés, ça ne fait pas des menus bon marché, mais cela donne un lieu où l’on est sûr de se régaler.
Grâce à Jean-Michel Loessel et sa carte toujours attrayante, avec le foie gras à l’anguille fumée, les Saint-Jacques snackées déclinaison de salsifis sauce persillée au pied de veau, le turbot au tandoori et encornets au yuzu, le pigeon Duwehof en deux services poitrine plancha et cuisse braisée patate douce noix et pignons de pin. Desserts inventifs, grande carte des vins.
CUISINE DE LA MER : TAKASHI KINOSHITA – CHÂTEAU DE COURBAN 13,5 / 20 2 toques
L’avis du Gault et Millau dans le guide
A la limite de la Champagne, cette grande et haute maison de maître possède bien des atouts, charme bucolique et restaurant de belle allure. Langoustines et quinoa bio frit sauce crustacé, côte de veau rôtie et foin bio haricots verts girolles, quelques exemples de la cuisine raffinée et savoureuse du chef Takashi Kinoshita qui, dans ce havre de paix et de luxe, nous offre des assiettes où le bio a une belle part, ou les cuissons sont sans défaut et les saveurs ainsi préservées.
Saluons également le joli travail de la cheffe pâtissière Sae Hasegawa qui marie avec bonheur saveurs d’antan et d’Orient. La cave autorise de jolis accords mets-vins. Quant au service, il accompagne le repas avec la légèreté qui sied.
PATISSIER : SAÉ HASEGAWA – CHÂTEAU DE COURBAN 13,5/20 2 toques
La cheffe pâtissière Sae Hasegawa reçoit ainsi le Trophée du Pâtissier 2020.
SOMMELIER MAXIME LUCAS – RESTAURANT GIRARDIN 15/20 3 Toques
L’avis du Gault et Millau dans le guide
Maison des Têtes façon gastro…. Le clap de début de tournage à peine retenti, on se met dans l’ambiance de ce cadre historique qu’Eric Girardin, avec son épouse, a rendu particulièrement festif et gourmand, marquant sa personnalité sur tous les postes, le poisson comme le végétal, les entrées comme les plats de viande.
L’omble chevalier de chez Murgat que nous avions si bien goûté l’an passé a été préparé cette année avec un condiment citron-bergamote et une sauce agrumes, les grenouilles sont plus classiques, mais réjouissantes avec la crème d’ail doux et une vinaigrette à l’huile de noisette, les Saint-Jacques très réussies, en deux services (dont une version excellente sur une sauce glacée de laitue). Et le chevreuil est à ne pas manquer en période de chasse (rôti et en tourte).
Desserts de bonne composition, cave très importante, forgée par le patron, très connaisseur, et animée par un bon sommelier. L’addition est tout simplement celle d’une grande maison (autour de 120 € à la carte, et un très beau “dégust” en huit services pour 135 €), sans excès pour ces trois belles toques.
TECHNIQUE D’EXCELLENCE PIERRE IRION – L’IMAGINAIRE 2 toques 14/20
L’avis du Gault et Millau dans le guide
Passé par Lameloise et Klein, Pierre Irion, qui œuvrait jadis au Domaine du Lac à Guebwiller puis à Côté Lac à Schiltigheim, s’est installé avec sa compagne Élodie Dreher dans cette maison à colombages nichée au cœur du vieux Schilik.
Dans la salle au standing de bistrot et au décor scandinave à la mode, les mets proposés se distinguent par leur clarté de goût et leur franchise incomparable, assez inhabituelle en Alsace. Parmi les petites attentions proposées en début de repas, cet amusant dampfnudel, petit pain cuit à la vapeur au beurre de truffe, est une belle découverte des produits du terroir d’Alsace du Nord. Si le contenu du menu Inspiration à 52€ proposé chaque soir n’est jamais connu à l’avance, l’arrivée de chaque plat ne réserve que de bonnes surprises.
ACCUEIL ELODIE DREHER – L’IMAGINAIRE 14/20 2 toques
L’avis du Gault et Millau dans le guide
Cela commence fort avec ce foie gras de la ferme du Puntoun au goût naturel inégalable, rehaussé de coings et escorté d’un amusant kouglof aux noisettes. La lotte épaisse et ferme à souhait est accompagnée d’écrasée de topinambours, de mousse de butternut et de truffe noire. Le dos de biche avec son jus réduit, ses gnocchis maison et ses morilles farcies frise les trois toques pour sa distinction. Le délice se prolonge jusqu’aux notes sucrées, dans le même credo de concision et de légèreté, avec la tarte au citron crémeuse, pleine de fraîcheur et à l’esthétique réussie. De nombreux vins au verre et un grand choix de vins bio sont proposés sur une carte claire et nette.
Depuis sa rencontre avec Pierre Irion au restaurant Côté Lac à Schiltigheim, Elodie Dreher forme avec le chef un binôme dont la confiance mutuelle est la pièce maîtresse.
JEUNE TALENT SERVICE EN SALLE : PAULINE SCHOHN – LA VILLA RENÉ LALIQUE 18/20 4 toques
L’avis du Gault et Millau dans le guide
La vraie réussite de cette maison hors du commun est peut-être de s’être imposée si vite dans le cœur et l’esprit des Alsaciens si avisés et délicats en matière de haute gastronomie. On réserve désormais deux mois et plus à l’avance, et l’on vient ici en pèlerinage gourmand comme si la maison existait depuis trente ans. Signée Mario Botta, la bâtisse contemporaine entièrement vitrée qui abrite le restaurant est venue compléter en 2015 la villa historique dotée de colombages et de toits pentus, dévolue, quant à elle, à l’hôtel estampillé Relais & Châteaux… L’aménagement est quelque peu théâtral avec au fond ce buffet noir signé Tina Green, dont deux volets s’écartent au début du service pour se refermer à la fin et derrière lesquels on peut voir œuvrer les cuisiniers. Il faut aussi vivre cette expérience la nuit, lorsque la magie opère, avec ces pampilles contemporaines Lalique qui scintillent avec sobriété. Il y a du cristal Lalique partout: le photophore, la coupe dans laquelle reposent les fleurs, la salière, la poivrière, le repose-bouchon, le rond de serviette, le repose-couteau… et cette sublime lampe de table. Et pourtant l’ensemble n’est pas ostentatoire.
Vêtue par Cléone, toute cette équipe de haut niveau semble avoir été recrutée sur casting, comme pour insister sur le privilège et l’unicité de l’expérience. Autour de Patrick Meyer, directeur parfait et excellent communicant, on retiendra la prestation de Pauline Schohn, toute en aisance et compétence, mais l’ensemble est à féliciter, chacun participant à l’événement. Car il s’agit bien de cela.
Sur les idées de Jean-Georges Klein, les assiettes de Paul Stradner font merveille, inspirées par l’art contemporain, apportant un esthétisme particulier à des saveurs remarquables, dès les mises en bouche, extraordinairement travaillées en dévoyant le terroir de façon inattendue et pleine de fantaisie. La terrine de foie gras d’oie, pas trop malaxée, est associée à la rhubarbe pour l’acidité bien dosée et le gel d’aloe vera pour la coquetterie dernier cri. Les jeunes légumes et fruits du printemps, «tel un tableau de Damien Hirst» ont beaucoup évolué depuis notre dernière visite, plus aboutis, plus épurés et plus nets. L’idée de la vinaigrette à la fleur de sureau et à l’huile de tanaisie confirme sans conteste cet esprit de cuisine d’auteur.
Complètement transcendé, l’omble chevalier a fait l’objet d’une cuisson particulièrement précise, associé aux champignons en deux textures, avant l’amusant intermède de “l’essentiel d’une choucroute” (un jus de choucroute, des dés de pommes de terre, et surtout cette palette de porc fumée, transformée en poudre sous laquelle se trouve un peu de moutarde). Le pigeon, un classique des menus dégustation des grandes maisons, est ici très personnalisé avec ce mini gâteau Forêt-Noire qui imite de manière ludique la coiffe traditionnelle nommée «Bollenhut», avec ses fausses cerises, ce sablé, discrètement sucré, le tout souligné d’un jus au café dont la saveur équilibrée s’accorde à merveille au goût fort de la viande.
Instants sucrés de même niveau exceptionnel, cave de 60 000 bouteilles (une des grandes passions du propriétaire Silvio Denz), parfaitement gérée par Romain Iltis et Hervé Schmitt.
TERROIR D’EXCEPTION SYLVIE GRUCKER – LE PRESSOIR DE BACCHUS 12,5/20 1 toque
L’avis du Gault et Millau dans le guide
Sylvie Grucker a toujours la main adroite et les idées larges pour adapter le terroir à sa manière. Avec son fils Kevin, formé notamment à Frankenbourg et chez Nasti, elle avance en terrain sûr.
Produits de saison arrangés avec talent, carte renouvelée avec imagination, jolis dressages (un beau foie gras, une truite saumonée, un pigeon de concours…), on est bien dans un pressoir original et novateur. En cave, c’est Gilles qui a les clés et sait parfaitement conseiller les vignerons proches.
SOLIDARITE GÉRARD GOETZ – HÔTEL JULIEN 12/20 1 toque
L’avis du Gault et Millau dans le guide
Une belle maison et une base idéale pour aller randonner dans le coin, ou simplement profiter de l’air pur de la forêt.
Gérard Goetz a l’esprit de l’aubergiste, son équipe sait vous accueillir et il offre une carte généreuse, soignée dans le détail, comme un symbole de l’Alsace gourmande et gastronome : escargots, bouchée à la reine, matelote de sandre aux nouilles, tête de veau et pied de porc farci pour les tradis, nems de gambas sauce chili, lasagne de légumes ou daurade et Saint-Jacques fricassée de ravioles pour expérimenter d’autres saveurs. Menus bien composés, cave alsacienne très bien équipée, avec les grands noms (Faller, Beyer, Trimbach, Muré) mais aussi Deiss, Zusslin et quelques découvertes.
Relire l’article sur l’engagement de Gérard Goetz auprès des soignants Laurent Arbeit et Gérard Goetz au service des soignants militaires de Mulhouse
CONCOURS D’ELOQUENCE remporté par Mélanie Lorman
Après tirage au sort des plats et ordre de passage, l’ensemble des convives du diner les a noté sur leur éloquence, leur argumentaire, leur “présence scénique”, leur culture gastronomique et la pertinence de leur association mets/vins.
Les 3 lauréats du concours :
– Mélanie Lorman (L’Alchemille) Diplômée en salle et en sommellerie, formée chez Anne de Bretagne (2016-2017) et chez Eric Guérin remporte cette première édition Grand Est.
Ont été sélectionnés :
– Yoann Roëss (le pont tournant, hôtel Régent Petite France), formé en sommellerie, barman, caviste, passé chez Michel Guerard, les Prés d’Eugénie (2019), et au sarment d’Or en Alsace (2017). Il a déjà remporté le 1er prix du cocktail Pineau des Charentes blanc de la Rochelle, le 3eme prix du concours des Vins du Jura et le 1er prix individuel et en équipe de la Coupe Lesdiguieres-Chartreuse
– Bénédict Buffler, stagiaire en 2008 à l’auberge de l’Ill, il est aujourd’hui assistant maître-d’hôtel à l’auberge de l’Ill.
Crédit photos et vidéo ©Sandrine Kauffer-Binzwww.gaultmillau.fr/