Le vin, soit comme boisson (à jeun ou à table), soit comme ingrédient de la pharmacopée, mais pas comme ingrédient d’une recette de cuisine. Quid du vin utilisé par le cuisinier lorsqu’il est au fourneau ? Eléments de réponse. Trois lieux d’observation : le point de vue organoleptique, le point de vue sanitaire (microbiologique) et le point de vue nutritionnel. “In vino véritas ” ! Un éclairage signé par Jean-Michel Truchelut.
D’abord un “petit coup”
La cuisine au vin : “In vino gastronomicas” !
La même quête de la recherche des odeurs et des saveurs est poursuivie lorsque l’on procède au mouillement d’une cuisson, ainsi qu’au moment de finaliser une préparation en la “vinifiant”.
Du point de vue microbiologique :”In vino sanitas” !
La preuve de l’efficacité de ce qui est avancé ici se trouve corroborée par les analyses microbiologiques. Ces analyses menées dans le cadre d’une étude de vieillissement des produits, en vue de la commercialisation, confirment les rôles divers et essentiels notamment du vin. Au point que l’on a évoqué notre histoire culinaire (et son recours à la dive bouteille pour cuisiner) comme un véritable “plan d’expériences”, selon le langage des qualiticiens. C’est bien parce qu’il y avait des avantages à le faire que nos ancêtres ont cuisiné de cette manière. Les industriels utilisent des extraits pour maîtriser la microbiologie de leurs produits. Extraits pour essayer de gérer des productions linéaires, à grande échelle, normalisées. Sans bénéficier pourtant des avantages globaux des produits initiaux. Aux industriels, leurs problèmes spécifiques, aux cuisiniers d’utiliser les ingrédients traditionnels en validant leur emploi par des contrôles microbiologiques.
Aspect nutritionnel : « In vino non-caloricas » !
Quels sont les apports nutritionnels réels du vin utilisé en cuisine ? Il faut pour cela se référer à la cinétique d’évaporation de l’alcool ! La température d’ébullition est de 78°C. Lors d’une cuisson, il reste après “évaporation” de 7 à 10 % d’alcool initial. Examinons des apports classiques de vin à travers des recettes traditionnelles.
0,7 litre de vin pour 10 personnes.
Après cuisson, ne reste que 10 % de l’alcool initial, donc 8,4 volumes d’alcool (7 x 12 = 84 ; puis 10 % de 84)
La densité de l’alcool étant de 0,8 nous sommes en présence de 6,7 grammes d’alcool. (8,4 x 0,8 = 6,72)
Le calcul calorique pour 10 est le suivant : 6,7 x 7 (1 g d’alcool est équivalent à un apport de 7 « calories »), soit 46,9 “calories” pour 10 personnes.
L’apport par individu est donc de 46,9 : 10 = 4,7 calories.
Deux remarques s’imposent. D’abord l’apport “anecdotique” des calories dues à l’alcool. Il y aurait cependant à évaluer l’apport des sucres du vin pour être plus prêt de la réalité. Le deuxième point concerne l’apport en alcool. Soit 0,6 gramme d’alcool à comparer à des boissons “sans alcool” dont l’engagement porte sur un apport inférieur à 1% maximum. Il y a manifestement plus de risque de consommer de l’alcool avec ce genre de boisson qu’en consommant un bœuf bourguignon !
Quand aux devenirs des antioxydants et autres polyphénols, j’ignore l’influence de la cuisson.
Ne cédons pas à l’ivresse !
Cependant, l’utilisation du vin dans nos recettes révèle bien quelques arguments à faire valoir, tant du point de vue organoleptique, microbiologique que nutritionnel. On ne peut à la fois faire la gloire de notre cuisine, de son terroir, de ses produits et ne pas avoir un minimum de “tranquillité” lorsqu’il s’agit du vin utilisé dans nos glorieuses recettes.
La pratique de la cuisine au vin se doit de s’intégrer dans une démarche de “conservatoire des techniques”.
Un appel pressent aux cuisiniers pour proposer des fiches techniques de cuisine transparentes, suivies et fiables. Ainsi gourmets, nutritionnistes, microbiologistes, journalistes pourront se faire une idée précise de cette problématique.
Par Jean Michel Truchelut.
Professeur au lycée Alexandre Dumas.