Cette fois-ci, c’est un appel qui est lancé, parce que l’enquête n’est pas terminée, même si elle a avancé. Tout est parti d’une recette d’un ami cuisinier, qui utilisait le terme de « financier » pour désigner une préparation qui n’avait rien à voir avec ce que l’on entend couramment par ce terme : un petit gâteau en forme de lingot, blond comme l’or. Dans un tel cas, je me méfie de mes connaissances, et je me lance dans l’exploration des sources.
Pour commencer, j’ai trouvé un article, sur Wikipédia, qui faisait des financiers des avatars des « visitidantines » ou des « friands »… avec une partie histoire sans référence, qui prétendait que les financiers, sous leur forme actuelle, avaient été introduits par un pâtissier nommé Lasne, qui aurait eu sa boutique près de la place de la Bourse, à Paris.
Je commence à bien me méfier de telles histoires sans référence, parce que n’importe qui peut dire n’importe quoi, n’est-ce pas ? Donc j’allais me plonger dans les livres de pâtisserie anciens.
Dans le traité de Darenne et Duval, , en 1909, on trouve deux recettes :
Financier (recette pour pièces montées), — 5oo gr. sucre poudre monté sur le feu avec 16 blancs d’œufs ; lorsque la meringue est bien ferme, y ajouter 25o gr. de farine, 180 gr. d’amandes en poudre fine, 125 gr. de beurre fondu, kirsch et vanille, bien mélanger le tout : moules à savarins beurrés et saupoudrés d’amandes hachées. Cuire à four assez chaud, ensuite les superposer, abricoter et glacer au fondant vanille. Décorer avec une crème au beurre pistache.
Là, c’est troublant, parce que ce n’est pas la recette des visitandines.
Financier (autre).- 375 gr. sucre battu avec 12 jaunes; quand c’est bien léger, ajouter 125 gr. sucre fondu à sec comme pour du nougat et réduit en poudre, puis 3 oeufs ; travailler de nouveau, parfumer largement rhum et vanille et mélanger 250 gr. amandes en poudre, 25o gr. farine et fécule, 250 gr. beurre fondu et 10 blancs montés. Moules à rosaces beurrés et passes aux amandes hachées; cuire à four modéré. Une fois cuits et froids, abricoter à l’abricot rouge ou nature, semer des pistaches hachées sur le milieu et amandes hachées grillées autour.
Surtout, ce ne sont pas des gâteaux en forme de lingot, comme on le prétendait. J’ai donc continué de chercher… et j’ai trouvé que le gâteau existait bien avant le prétendu Lasne, et déjà sous ce nom.
Ainsi, en 1878, Pierre Lacam en donne la recette suivant :
125 gr. d’amandes, 250 gr. de sucre ; les piler et passer au tamis; mettre cela dans une terrine; le travailler avec 6 blancs d’œufs et de la vanille, puis 125 gr. de fécule et 125 gr. de beurre fondu, moule plat cannelé, glacer vanille, four un peu chaud.
Et, avant, rien dans les livres que j’ai consultés, ni avec l’entrée « financier », ni d’ailleurs avec l’entrée « visitandine ». À ce jour, je suppose que ce gâteau avait un autre nom plus officiel, mais il faudrait repartir du 14e siècle, et chercher quand la recette apparaît, et quel nom on devrait donc utiliser. Qui m’aidera ?
Par Hervé This