Je sais que j’ai déjà évoqué les galantines… mais c’était en passant, à propos des ballottines. Ici, ce sont les galantines, et les galantines seulement qui nous intéressent, une préparation que se disputent les cuisiniers et les charcutiers. Le mot « galantine » ? Méfions-nous des étymologies trop évidentes, et, par exemple, pour le mot « galantine » : dans son Dictionnaire universel de cuisine, le cuisinier Joseph Favre écrit que ce mot ne vient pas du mot « galant », mais d’une racine alémanique « gai », qui signifie « gelée ». Et oui, la gelée est essentielle pour les galantines.
Favre nous dit que les galantines sont composées de viande hachée, enveloppée dans un poulet ou dans une dinde désossée, et cuites dans sa gelée, et il ajoute que l’ancienne cuisine mentionnait des galantines de poisson, de viande de boucherie et de tous les gibiers. Favre indique que l’on a abandonné la galantine de poisson, puis celle de veau, et peu à peu celle de gibiers à viande noire, pour s’arrêter aux galantines de volaille aux truffes, mais ce n’est pas vrai : la cuisine actuelle fait des galantines de poissons et veau, par exemple.
Qu’importe. Examinons une recette de Favre, une galantine de chapon :
- On utilise deux beaux chapons, et on les désosse, en préservant la peau, qui doit rester intacte.
- On étale le plus gros des chapons, ainsi désossé, sur une table et l’on supprime une partie des chairs des cuisses et des filets de façon à faire une enveloppe aussi uniforme que possible.
- On prélève complètement les chairs de l’autre chapon, et l’on réserve les filets mignons.
- Puis on hache la chair des chapons et du filet de veau avec la graisse des chapons et du lard frais , des œufs, du sel, poivre, épices, vin de Madère ou Xérès, éventuellement truffes et pistaches ; on peut y mettre une panade et de la béchamelle.
- On dépose la chair broyée sur le chapon ouvert et étalé et l’on roule dans un linge.
- Avec les débris et des couennes de lard, mouillés avec du vin blanc, avec céleri, oignon clouté, poivre, persil, on fait un fond à gelée.
- Puis on y plonge la galantine et on fait cuire longtemps à basse température.
- On sert la galantine soit glacée avec la gelée, soit accompagnée de dés de gelée.
Tout cela étant dit, Favre nous dit-il juste, soit pour l’étymologie, soit pour la partie de recette ? Oui et non. Tout d’abord, le mot « galentine » était déjà utilisé en 1223 pour désigner une gelée dans laquelle on sert du poisson ou de la viande. Mais l’étymologie donnée par Favre était fautive : le mot « galantine » vient du latin « gelare », geler. Et oui, la recette est ancienne : on la trouve dans le Roman de la rose, et le Viandier de Guillaume Tirel, dit Taillevent, donne une recette de galantine d’anguille. La recette n’a guère changé, même s’il y a eu des variations, pour la farce : parfois, on y a mis du foie gras, de la farine, des amandes, des épinards, des bâtonnets de carotte ; parfois, c’est une caille farcie en gelée… comme le faisait notre merveilleux Emile Jung, qui servit d’extraordinaire cailles en galantine, dans son restaurant du Crocodile, à Strasbourg.
Terminologie par Hervé This