L’Art Boucherie a vu le jour il y a 4 ans à Fréland (68). Christophe Frey est à l’origine de ce lieu totalement dédié au gibier provenant de la chasse dans les forêts alsaciennes.
Lui et son équipe découpent et transforment cerfs, chevreuils, sangliers…en préparations fraîches et autres saucisses, pâtés, etc déjà cuisinés. L’occasion de découvrir ou redécouvrir le gibier sous toutes ses formes et dans toute sa saveur.
“Un projet fou”. Voici comment Christophe Frey qualifie l’Art Boucherie qu’il a ouvert à Fréland en 2014.
Originaire de Suisse alémanique, il est arrivé en Alsace comme « touriste chasseur ». Puis, il a rencontré sa femme Amélie et…n’est plus reparti. Christophe Frey tient avec sa femille 3 restaurants dans la vallée de Kaysersberg : Le Vieux tiroir dans l’établissement l’Arbre vert à Kaysersberg , la Cocotte Rouge à Orbey et la brasserie Hassenforder à Kaysersberg.
Ce qui l’a conduit à ouvrir cet établissement de découpe et de transformation du gibier ? “Cela me permet à la fois de valoriser ma chasse et de m’approvisionner en gibier pour mes trois restaurants dans lesquels ce type de viande tient une grande place. D’autant qu’il est dommage d’être dans une région avec tant de gibier et de ne pas le retrouver dans les restaurants, celui qui y est servi venant souvent d’ailleurs.” explique Christophe Frey.
De plus, il ne savait plus où amener les propres produits de sa chasse pour leur découpe, sachant qu’un chasseur ne dispose que de 24 heures pour le faire. Ces ateliers de traitement sont peu nombreux en Alsace : trois dans le Bas-Rhin et deux dans le Haut-Rhin [ndlr : Michel Herrscher à Colmar et un second à Cernay qui a fermé depuis, remplacé d’une certaine façon par l’Art Boucherie].
Comme le dossier pour l’obtention d’un numéro d’agrément pour la découpe est plutôt imposant, “autant aller jusqu’au bout de la démarche et demander un numéro d’agrément pour la transformation de la viande.” raconte Christophe Frey. Et voilà comment l’Art Boucherie a vu le jour !
Question volume, L’Art boucherie voit arriver entre 20 et 30 bêtes par semaine en période de chasse individuelle. Au moment des battues, l’arrivage est plus important, de 80 à 120 bêtes. Chaque bête porte une bague posée par le chasseur et dont le numéro sera repris à toutes les étapes et sur tous les produits issus de l’animal en question. “Nous sommes très attachés à la transparence et la traçabilité. C’est un gage de confiance pour les consommateurs.” explique Christophe Frey.
Chaque étape du process (réception, dépeçage, découpe, mise sous vide, transformation…) doit être séparée dans l’espace ou dans le temps, c’est une obligation. « Par chance, nous disposons d’un espace suffisant pour pouvoir dédier une pièce fermée à chaque opération. Dans le cas contraire, il aurait fallu procéder à un nettoyage entre chaque étape, la fameuse séparation dans le temps » précise Christophe Frey.
L’Art boucherie ne fait pas faisander le gibier en raison de son processus de vieillissement trois fois plus rapide que pour la viande d’élevage (bœuf, par exemple). L’oxydation donne une couleur très sombre à la viande et son goût, déjà plus fort à la base, se renforce. C’est pourquoi la mise sous vide intervient assez rapidement après le dépeçage et la découpe, sous 3 jours après l’arrivée de la bête. Et si la viande n’est pas vendue sous une semaine, elle sera congelée.
Tous le gibier réceptionné représente environ 27 tonnes de viande à traiter par an. Là-dessus, seuls 20% sont des morceaux dits “nobles” (filets,…). Pour le reste, 80% quand même, il s’agit de morceaux à transformer en charcuterie ou à cuisiner.
Les animaux sont des sangliers, chevreuils, cerfs, faons, biches, chamois…qui seront vendus frais après découpe ou transformés. Pour Christophe Frey, le gibier se consomme comme n’importe quelle viande d’élevage. “Vous pouvez cuisiner du hachis Parmentier, des ragoûts, du cordon bleu, etc. Il suffit juste de remplacer “porc” par “sanglier” ou “bœuf” par “cerf” ou “chevreuil”, aime-t-il expliquer.
D’autant que la viande de gibier présente des qualités nutritionnelles intéressantes. Elle est plutôt maigre et selon les animaux, riche en protéines, en vitamines B, en fer et autres minéraux.
“Pour la fabrication de nos produits, nous faisons le plus naturel possible”, raconte Christophe Frey. Il complète : “Le fumage, à l’ancienne aux copeaux de bois, et la cuisson, sont des conservateurs naturels. Pour les mélanges d’épices ajoutées dans certaines préparations, comme les merguez par exemple, nous veillons à ce qu’ils soient de qualité et au maximum sans allergènes.”
Après bientôt quatre ans d’existence, ce projet fou semble trouver sa place. Les clients, particuliers, grossistes ou chefs étoilés comme Olivier Nasti à Kaysersberg, sont présents. Qu’ils soient amateurs de gibier de longue date ou nouveaux curieux.
Par Isabelle Oche
Photos : Isabelle Oche et documents remis
L’Art Boucherie
63 Grand Rue, Fréland