“Les grandes sauces : L’allemande n’est pas la liaison à l’allemande”

 

Les grandes sauces ? Pour Marie-Antoine Carême, ce sont l’espagnole, l’allemande, le velouté et la sauce au beurre. Bien souvent, nous ne connaissons plus aujourd’hui que de pâles copies de ces sauces, tout comme nous faisons des crèmes anglaises à seulement huit jaunes d’oeufs au litre de lait, alors qu’elles doivent en avoir 16 !

 

Tiens, redonnons ici les grandes sauces, avant d’arriver à la confusion que j’indique dans le titre.

Commençons avec la recette de Carême. Pour une grande sauce espagnole, il faut cuire jambon, veau, poule, faisan, perdrix, râbles de lièvre avec un bouillon ; on écume et l’on réduit à glace ; puis on allonge de bouillon, et on lie au roux blond avant d’ajouter champignons, persil, laurier, ciboule, thym et basilic. On cuit pendant une heure, on dégraisse et l’on réduit.

Pour velouté, béchamel et allemande, on part de jambon, veau, poules et bouillon ; on porte à ébullition, on écume, on fait tomber à glace et l’on allonge de bouillon. On passe le liquide, et on verse ce dernier, bouillant, sur un roux blond. Puis on reporte à ébullition, on écume encore et l’on ajoute des champignons et un bouquet garni. On dégraisse et on dépouille ce velouté, que l’on sépare en deux parties égales. On les réduit, et l’on verse dans l’une d’elle de la crème, ce qui donne une béchamel. Pour l’autre, on en verse la moitié dans une casserole où l’on a mis des jaunes d’oeufs et de la muscade râpée. On porte à ébullition jusqu’à ce qu’il y ait la liaison, et l’on a l’allemande.

Pour Jules Gouffé, la recette est un peu différente, Il s’agit de commencer par faire une essence de volaille avec carcasses et parures de poulet, plus veau que l’on cuit dans du consommé de volaille. Avec oignons, carotte et bouquet garni ; on passe et l’on ajoute de l’essence de champignons, du velouté gras, avant de faire réduire. On lie aux jaunes d’oeufs et l’on monte au beurre.

Cela étant établi, la liaison à l’allemande, maintenant, a pour base la farine détendue dans de l’eau, du lait ou du bouillon ; on passe, puis on verse d’une main dans les mets que l’on veut lier, en agitant de l’autre avec la cuillère. On voit combien c’est plus simple… et moins intéressant gustativement !

 

Par Hervé This