“Le Collège Culinaire de France a changé ma vie”

La grande réunion annuelle du Collège Culinaire de France s’est tenue au Ground Control à Paris 7ème le 24 septembre 2018.

“Nous sommes indépendants. Nous ne sommes pas sous influences, mais nous allons influencer le monde », lance Alain Ducasse, membre fondateur du Collège Culinaire de France. “Nous ne lâcherons rien de nos convictions car elles sont justes ! Aujourd’hui nous avons un leadership incarné par des hommes engagés, seul nous avançons plus vite, mais ensemble nous irons plus loin. Et aujourd’hui les membres fondateurs se rangent derrière vous. Vous formez un collectif, une puissance avec des valeurs de qualité. La richesse de notre patrimoine culinaire nous oblige”

300 membres des restaurants de qualité et producteurs-artisans de qualité sont venus en provenance de toute la France, pour apporter leurs témoignages et leur expertise, partager leur expérience, s’informer et renforcer leurs réseaux.

Sont montés sur scène Alain Ducasse, Alain Dutournier, Célia Tunc, Christian Regouby, Mathieu Legrand(RQ Guinguette d’Issy), Eric Roy (PAQ Jardin des Roys), Stéphane Jego (RQ L’ami Jean), Christian Regouby, Sylvain Erhardt, Yoann Conte, Arnaud Billon (PAQ Ah la vache), David Galienne (RQ Jardin des Plumes), Sophie Lacharlotte (Les vergers de la silve), Stephan Perrotte, Thierry Marx, mais aussi Régis Marcon, Franck Guimon, Patrick Meyer, Laurent Petit et Joël Thiebault. 

“Soyons solidaires et n’attendons rien des autres”, martèle Alain Dutournier, trésorier de l’association. “Nous n’acceptons pas de subvention de l’agro-industrie. Nous ne sommes pas sous perfusion et resterons indépendants”.

“Il y a quelques années”, se souvient Gilles Goujon, “Nous étions perçus comme une nouvelle association de chefs et je suis fier de voir l’évolution et le chemin parcouru. L’association ne demande pas un euro aux contribuables, elle n’est pas rentable non plus (résultat net de 4000€), mais chacun place sa rentabilité où il l’entend. ”

“Le Collège Culinaire de France a changé ma vie”, s’exclame Eric Roy Maraîcher en Touraine. “Avant, je travaillais avec l’agro-alimentaire qui négociait sans cesse mes prix. Quand j’ai rencontré des chefs du CCF ma vie a changé, car mes interlocuteurs me parlaient produits et qualité avant de me parler du prix. Aujourd’hui, je n’ai pas doublé mon chiffre d’affaires et pourtant je suis plus riche. Je suis riche de rencontres et de satisfaction, je suis riche de m’épanouir, je me suis réapproprié mon métier de maraicher et je peux le partager avec des interlocuteurs passionnés. J’ai retrouvé du plaisir à produire et cela n’a pas de prix.”

“Seuls les restaurateurs responsables peuvent sauver des espèces de poissons”, pointe Eric Jacquin à l’attention de l’assemblée. “Nous sommes en train de piller les océans de poissons gras, pour nourrir les poissons d’élevage. Rien n’a de sens”.

“En cuisine, je transmets des connaissances techniques, mais aussi l’histoire d’un produit”, précise Stephane Jego (Ami Jean à Paris). Je transmets cette histoire à l’équipe de cuisine, mais aussi de salle, qui la relaie auprès de la clientèle. Parfois cela justifie aussi un tarif, derrière ce prix, il y a de la valeur humaine et un savoir-faire. On vend mieux un produit qui a une histoire que celui qui a traversé toute la planète”.

“Ma religion c’est la terre”, s’exclame Yoann Conte. “Il faut la sauvegarder. “J’ai toujours souhaité mettre mes producteurs en avant et j’aime aller les voir, sentir la terre pour comprendre aussi leur travail. Quand vient la saison des asperges, je m’impatiente, j’appelle Sylvain Erhardt, l’asparagiculteur à Roques Hautes et lui demande; “Alors elles viennent les Demoiselles ?” Et quand la saison se termine, elles partent, c’est triste mais c’est ça la saisonnalité”. Il faut vivre sur cette terre avec ses lois et non avec les nôtres”.

Thierry Marx intervient sur la notion d’économie de la qualité.
“On s’est détaché du monde politique car nous avons perdu confiance. C’est la raison pour laquelle, nous avons créée cette association et nous nous tournons vers vous, restaurateurs et producteurs-artisans de qualité pour former une fronde militante et éduquer des citoyens militants. On ne reculera pas, et notre enthousiasme fera plier. ”

Pour Régis Marcon, l’éducation des citoyens responsables pourra se faire par les restaurants et surtout les métiers de la salle. Les clients attendent des belles histoires sur les produits. La brigade de salle doit s’informer auprès du chef, bien sur, mais aussi en se rendant sur la terre des producteurs, à l’instar du sommelier partant dans les vignes pour comprendre le travail du vigneron et sa philosophie du vin”.

Il y a trois maillons de qualité, l’alliance du producteur, de la cuisine et de la salle.

“L’année 2018 marque un tournant pour le Collège Culinaire de France. La Grande Rencontre Annuelle a rendu lisible le vrai visage de notre réseau, celui des histoires humaines de relations incarnées entre Producteurs et Restaurateurs de Qualité”, mentionne Christian Regouby Délégué Général Restaurants et Producteurs Artisans de Qualité. “Les expériences vécues, les engagements concrets les initiatives partagées et les résultats obtenus entre les membres sont la démonstration éclatante de la réalité et de la productivité des valeurs et des pratiques de notre collectif. Elles sont l’expression de notre identité singulière qui se démarque des autres associations de l’univers culinaire. Notre totale indépendance de l’agro-industrie et des pouvoirs publics puise toute sa force dans l’énergie et les initiatives des membres sur l’ensemble du territoire. Le démarrage et le succès rencontré par les premiers « Dîners Complices » entre Producteurs et Restaurants de Qualité permettront de sensibiliser et d’intégrer le maillon client au cœur de notre chaîne de la qualité. Face à l’industrialisation de la restauration et la standardisation des goûts, nous voulons mettre en place une véritable chaîne de la qualité afin de valoriser notre patrimoine culinaire artisanal. C’est un combat quotidien qui concerne et implique la participation active de chacun d’entre nous.”

“Il faut donner envie d’avoir envie” cite Christian Regouby. “Aujourd’hui le passe, ce n’est pas l’endroit où l’on passe une assiette mais une histoire.

Célia Tunc, Secrétaire Général du CCF annonce l’an prochain la tenue d’un grand salon/ marché des producteurs et artisans de qualité. Mais, pour cela 30€ sera demandé à chaque membre lors de la cotisation pour le réaliser et maintenir également cette indépendance et autonomie financière.”

Par Sandrine Kauffer-Binz
Crédit photos ©CCF

www.college-culinaire-de-france.fr